L’Algérie gagne peu de procès lors des arbitrages internationaux. Le ministère des affaires étrangères tire la sonnette d’alarme, et ébauche une démarche pour arrêter la saignée.
Le gouvernement algérien veut mettre fin aux procédures d’arbitrage international qui se terminent systématiquement en défaveur des entreprises algériennes. Une note du ministère des affaires étrangères, validée par le premier ministère et transmise à différents départements pour « approfondir la réflexion » et prendre les premières mesures en vue de stopper ce phénomène, révèle l’inquiétude du gouvernement à ce sujet.
Le document souligne « les difficultés récurrentes et systémiques à l’occasion d’arbitrages commerciaux internationaux » auxquels sont confrontés Etat algérien, à travers les entreprises dans lesquelles il est actionnaire unique ou majoritaires, et compagnies publiques, insuffisamment armées face à telles procédures. Bien que la note du ministère des affaires étrangères ne soit « pas basée sur une étude au cas par cas des affaires d’arbitrage conclues par un échec, pour une période donnée, en l’absence de décompte précis des affaires en question », le document veut « cerner les causes des difficultés et propose une ébauche de solutions ». En tout état de cause, elle invite à « approfondir la réflexion de manière coordonnée ».
Les plus grandes affaires d’arbitrage avaient opposé Sonatrach à la compagnie américaine Anadarko, qui avait obtenu plus de quatre milliards de dollars de dédommagements à l’issue d’une procédure controversée du temps de Chakib Khelil.
Lacunes juridiques
Selon la note du ministère des affaires étrangères, les parties algériennes perdent les procédures d’arbitrage à causes d’erreurs commises durant « toutes phases du contrat », allant de la période de négociation à celle du contentieux, en passant par celle de l’adoption de la convention ou du contrat, de son exécution, et de la période du précontentieux ».
Parmi les causes citées, figure le recours à des contrats « standard » préparé par le partenaire externe, alors que la partie algérienne reste dans une « attitude passive ». Le document recommande de « s’éloigner des contrats type », pour les adapter « aux réalités institutionnelles et économiques, et aux intérêts des entreprises » algériennes. Une des erreurs récurrentes concerne le mauvais choix de « la procédure arbitrale et du droit applicable ». Les parties algériennes ont aussi tendance à négliger la clause sur la manière automatique de reconduire les contrats, alors qu’il est préférable de « prévenir le partenaire » d’une volonté de renégocier le contrat.
Il y a également « les lacunes juridiques » dans la phase de négociations et de rédaction des contrats, ainsi que « le manque d’initiative, la non utilisation de compétences techniques et juridiques » disponibles en Algérie. Le document recommande de favoriser une plus grande présence algérienne dans les négociations des instruments futurs en matière d’arbitrage
Recourir à des cabinets d’avocats algériens
La gestion des conflits pose aussi de sérieux problèmes, laisse entendre le document, qui fait état d’erreurs aux « conséquences lourdes ». Durant la période d’exécution des contrats, la partie algérienne a recours à « des mesures unilatérales aux conséquences lourdes, sans en mesurer les conséquences ». Parmi ces mesures, « la résiliation du contrat, sans une évaluation préalable et approfondie des chances de succès de la partie algérienne en cas de recours » par le partenaire à un arbitrage international. En conséquence, le document recommande de « prévoir une évaluation objective avec une expertise multisectorielle. Ceci est capital dan la période précontentieux », car une évaluation juste « impose un choix stratégique », pour aller soit à « un règlement amiable, à une autre formule de conciliation », ou recourir à un arbitrage.
Enfin le document du ministère des affaires étrangères préconise de revoir « la manière dont sont choisis les avocats conseil ». Il recommande d’encourager le recours aux « compétences nationales, en complément ou en remplacement du recours aux cabinets d’avocats internationaux », tout en renforçant « la protection de la confidentialité » en cas de recours à la procédure arbitrale.