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Algérie

L’article 87 bis, combien ça pourrait coûter ?

Par Yazid Ferhat
septembre 16, 2014
L’article 87 bis, combien ça pourrait coûter ?

 

L’abrogation de l’article 87 bis devrait avoir  des conséquences macroéconomiques en chaine aussi bien  sur le budget de fonctionnement de l’Etat que sur les entreprises du secteur économique .Les économistes signalent que les conséquences devraient aussi concerner nos équilibres financiers extérieurs devenus très fragiles depuis la fin de l’année dernière.

 Quel sera le coût macroéconomique de l’abrogation de l’article 87 bis annoncée pour le début 2015? Une évaluation précise semble aujourd’hui bien difficile à réaliser même si certains de nos économistes les plus réputés n’ont pas hésité au cours des derniers mois  à prendre le risque de tenter de le mesurer. Il y a d’abord ces chiffres déjà anciens, révélés en 2005 ou 2006, par lesquels le gouvernement algérien estimait lui-même l’impact financier de cette mesure à 500 milliards de DA pour l’État et 40 milliards pour les entreprises, soit près de sept milliards de dollars. C’est ce qui conduisait logiquement Aderrahmane Mebtoul, compte tenu de l’augmentation de la masse salariale depuis cette date, à évaluer, au printemps dernier, sur les ondes de radio M, les incidences financières d’une abrogation de l’article 87 bis dans une fourchette allant «de 9 à 11 milliards de dollars en rythme annuel».

Au mois de mai dernier, avant même que les travaux de la tripartite gouvernement-patronat-UGTA ne débutent à Djenane El-Mithaq, l’économiste Abdelhak Lamiri évoquait de son côté, de façon très imprécise, un risque de «relèvement de 10 à 20%, voire de plus de 30% de la masse salariale », avant de parler d’un impact possible de «  6 à 7 milliards de dollars ».

Du coté de L’UGTA qui, ainsi que l’indique le communiqué de la dernière tripartite de février 2014, porte depuis des années la revendication de l’abrogation du 87 bis, les évaluations sont beaucoup plus disparates, et un secrétaire national de l’organisation syndicale n’hésitait pas voici quelques semaines à mentionner le chiffre faramineux de 2.400 milliards de dinars, soit près de 24 milliards d’Euros. Pour un spécialiste comme Said ighil Ahriz, Directeur du bureau d’études Ecotechnics, ces différents chiffrages restent relativement hasardeux. En l’absence de données véritablement fiables, il considère que le « seul impact mesurable avec une certaine précision concerne la fonction publique pour laquelle il pourrait atteindre près de 3 milliards de dollars ». Des évaluations qui illustrent non seulement  la faiblesse des outils économétriques disponibles, mais également les incertitudes qui portent sur le futur cadre réglementaire lui-même qui est loin d’avoir été entièrement précisé.

Le budget de fonctionnement en première ligne

Quelle que soit l’hypothèse d’impact financier retenue, le budget de fonctionnement de l’Etat sera en première ligne et on peut déjà s’interroger sur le fiabilité des prévisions de l’avant projet de loi de finances pour 2015 qui prévoit, de façon très conservatrice, une croissance des dépenses de fonctionnement limitée à 5%; le même document annonce officiellement la constitution d’une provision de 100 milliards de dinars (environ un milliard d’euros) pour financer la hausse des salaires induites par l’abrogation du 87 bis. Dans ce domaine, c’est  Abderahmane Mebtoul qui rappelle très opportunément que la masse salariale de la fonction publique a déjà  atteint 34 milliards de dollars en 2013.Elle devrait dépasser très largement le cap des 40 milliards de dollars l’année prochaine, compte tenu non seulement des augmentations de salaires prévues, mais également des dizaines de milliers (plus de 100.000 en deux ans)  de fonctionnaires dont le recrutement est prévu en 2014 et 2015.

La balance des paiements dans le rouge dès 2015 ?

Mais les conséquences ne s’arrêteront pas là. Le principal intérêt des avertissements délivrés par de nombreux économistes algériens, imités par le FCE, qui évoque un risque d’ « effet accordéon » sur l’ensemble de la grille des salaires, concerne aujourd’hui la réduction des marges de manœuvre financières de notre pays, dont les équilibres financiers extérieurs sont  devenus très fragiles depuis la fin 2013. Abdelhak Lamiri annonce une aggravation de la facture des importations, “puisque 79 à 80% des biens consommés par les Algériens sont des biens importés”. Suivant les différentes hypothèses d’impact financiers retenues, l’excédent de la balance commerciale, déjà fortement mis à mal au cours des dernières années et inférieur à une dizaine de milliards de dollars en 2013, pourrait de nouveau être réduit de moitié, voire disparaître presque complètement dès 2015. La balance des paiements, tout juste équilibrée en 2013 et déjà légèrement déficitaire au cours du premier trimestre 2014, ainsi que le signalait le rapport de conjoncture de la Banque d’Algérie publié au début du mois d’août dernier, devrait alors plonger dès 2015 dans un déficit considérable, compris dans une fourchette de 4 à 8 milliards de dollars. Une estimation qui ne préjuge pas de l’impact supplémentaire sur la balance des paiements qui pourrait provenir de la poursuite de la baisse des exportations d’hydrocarbures en volume, ou d’une érosion du prix du baril, déjà entamée en 2013, et qui semble s’accélérer depuis l’été  2014.

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