M A G H R E B

E M E R G E N T

Algérie

L’économiste Nour Meddahi franchit le pas : La solution de la crise économique est politique

Par Yazid Ferhat
novembre 12, 2017
L’économiste Nour Meddahi franchit le pas : La solution de la crise économique est politique

 

« L’absence de cap qui a le soutien de la majorité des forces vives du pays est ce qui nous inquiète le plus », écrit l’économiste Nour Meddahi dans un document rendu public vendredi.

 

Nour Meddahi franchit le pas. L’économiste, professeur d’économétrie et finances à la Toulouse School of Economics, exprime son inquiétude face à « l’absence de cap » de l’économie algérienne. Dans un long texte rendu public vendredi, il maintient son analyse sur la nécessité de réformes économiques profondes, mais il situe désormais le problème sur un terrain politique.

« C’est le président qui doit mener les réformes en discutant avec les partenaires sociaux, en faisant les arbitrages et en s’adressant à la Nation pour expliquer les choix douloureux, écrit-il. Il réfute l’idée que les décisions à prendre soient de simples mesures techniques pour s’adapter aux fluctuations des revenus extérieurs du pays. « Les réformes structurelles de grande envergure, de fait impopulaires, ne peuvent être faites par un Premier ministre qui peut être débarqué du jour au lendemain », ajoute-t-il.

M. Medahi avait été associé à la réflexion sur les moyens de faire face à la chute des prix du pétrole. Il avait publié plusieurs documents sur la question lorsque M. Abdelmalek Sellal était à la tête du gouvernement. Résultat plus notable de cette réflexion, la « trajectoire budgétaire » qui devait contraindre le gouvernement à se soumettre à un stricte discipline budgétaire, politique abandonnée par M. Ahmed Ouyahia au profit du « financement non conventionnel ».

Feuilles de route divergentes

Nour Meddahi se place sur un terrain résolument politique quand il évoque les acteurs en compétition au moment où le pays traverse la crise actuelle. Il parle notamment des puissances d’argent, surreprésentées, alors que les autres catégories sociales sont absentes. « Les priorités et les ressources nécessaires doivent être définies. Les oligarques et les ultra-libéraux ont leurs priorités qui sont clairement affichées. Ils ont les moyens financiers (provenant de l’étranger pour certains)  pour payer des études, organiser des évènements et financer des médias pour promouvoir leurs priorités. La gauche a un rôle historique dans la défense de l’Etat social. Elle est totalement désorganisée et presque inaudible. Elle doit absolument avoir un programme social soutenable dans le temps et loin de toute démagogie, ce qui implique un programme chiffré et soutenable. Dans le cas contraire, c’est les oligarques et les ultra-libéraux avec l’aide des organisations internationales qui vont établir ce programme ».

Rien à attendre de Ouyahia en matière de réformes

S’attend-il à une action du gouvernement pour réformer l’économie ? « Le plus probable est que rien d’important ne sera fait d’ici avril 2019. Le pire, à savoir le maintien du statu quo jusqu’à épuisement des réserves de change, n’est pas exclu », écrit-il.

Il regrette que les dirigeants algériens n’aient pas mené les actions nécessaires quand la situation était plus favorable. « Au début du contre-choc pétrolier », rappelle-t-il, « le pays possédait deux atouts majeurs pour faire face à la crise : une épargne importante (FRR) et des réserves de change très importantes » s’élevant à près de 200 milliards de dollars. Plus de trois ans plus tard, l’épargne a été totalement dépensée comme la moitié des réserves de change. Les niveaux des déficits budgétaires et de la balance des paiements sont à des niveaux extrêmement élevés ».

L’économiste met également en doute les prévisions du Gouvernement. « Un déficit de près 2.000 milliards de dinars est annoncé pour 2018. Comment croire que le déficit annoncé de 600 milliards de dinars pour 2019 sera respecté pour une année électorale, au moment où la première trajectoire budgétaire a été piétinée ? », se demande-t-il.

Mauvis présage

Certes, admet-il, « le niveau actuel des réserves de change permet d’utiliser un financement monétaire car la Banque d’Algérie est appelée à faire des bénéfices de change. Ce financement ne règle ni le problème de dépenses excessives par rapport aux ressources du pays, ni les problèmes structurels de l’économie du pays. Il donne de l’air pour que le Gouvernement fasse l’ajustement. L’annonce d’un déficit de 2.000 mds DA pour 2018 est un mauvais présage ».

Pour Nourd Meddahi, « il n’est plus possible de continuer sur la même trajectoire étant donné la contraction des ressources du pays ». Par contre, « il est vraiment urgent de réduire le train de vie du pays et de lancer les réformes structurelles ». Ce n’est pas le choix du Gouvernement Ouyahia, dont la politique « n’a rien de rassurant en ce qui concerne le redressement des finances publiques. Une importante échéance électorale est prévue dans 17 mois. L’absence de cap qui a le soutien de la majorité des forces vives du pays est ce qui nous inquiète le plus ».

ARTICLES SIMILAIRES

Á la une Algérie

Elle mène campagne au profit de Tebboune à Tizi-Ouzou : revoilà Naima Salhi !

Naïma Salhi-Leghlimi, ancienne députée de la wilaya de Boumerdès et présidente du Parti de l’Équité et de la Proclamation (PEP), revient sous les projecteurs malgré son statut de femme politique… Lire Plus

Algérie Politique

Présidentielles : la crise politique passée sous silence 

Les jours se suivent et se ressemblent pour les trois candidats à la présidentielle en Algérie, Abdelmadjid Tebboune, Youcef Aouchiche et Abdelali Hassani Cherif. Depuis le début de la campagne… Lire Plus

Actualités Algérie

Tensions lors de la commémoration du Congrès de la Soummam : l’accès au site historique restreint

Le 20 août 2024, jour de commémoration du Congrès historique de la Soummam, a été marqué par des tensions significatives à Ifri, lieu emblématique où s’est tenu cet événement crucial de… Lire Plus

Á la une Actualités

L’ANIE rappelle les règles de couverture médiatique après des accusations de biais en faveur d’Abdelmadjid Tebboune 

L’autorité nationale indépendante des élections (ANIE) est intervenu vendredi pour recadrer les médias publics et privés, suite aux accusations de « biais médiatique en faveur du président Abdelmadjid Tebboune »…. Lire Plus

Ihsane Visuel
Actualités Algérie

Ihsane El Kadi condamné avant d’être jugé : retour sur des révélations inédites

Il y a un an, le 4 mars 2023, les avocats d’Ihsane El Kadi, Zoubida Assoul, Nabila Smail, Abdallah Haboul et Said Zahi ont révélé, lors d’une conférence de presse,… Lire Plus