L’ancien ministre délégué au budget et ex candidat à l’élection présidentielle de 2014, Ali Benouari, estime que l’Algérie n’a pas un problème d’approvisionnement en énergie, comme les USA ou l’Europe, « qui pourrait conférer au gaz de schiste une place centrale parmi ses préoccupations ».
S’ajoutant aux voix opposées au gaz de schiste en écho aux protestataires d’In Salah, Ali Benouari pense dans une tribune parue ce jeudi dans le quotidien Liberté, que le problème de l’Algérie est qu’elle n’exporte rien d’autre « que son pétrole et son gaz, qui font vivre tout le pays, d’où l’exploitation effrénée des gisements à laquelle nous assistons, qui ne fait que retarder le moment où il faudra s’attaquer aux vraies difficultés ». Pour l’ancien ministre, l’exploitation du gaz de schiste comporte un grand risque de pollution pour les nappes albiennes du Sahara. Des nappes qui, dit-il, sont un vrai trésor à protéger, car « mieux que le pétrole et le gaz, elles sont à même de nous prémunir des effets néfastes du changement climatique, l’augmentation du stress hydrique et la réduction des surfaces agricoles pouvant entraîner des famines éventuelles ». Pour Ali Benouari, polluer ces réserves revient à commettre un « crime » semblable à un empoisonnement de puits. L’ancien ministre délégué au budget des années 1990 vilipende les pouvoirs publics qui, selon lui, ont caché au peuple que la décision d’exploiter le gaz de schiste a été prise « il y a déjà plusieurs années », leur reprochant au passage de refuser, une fois démasqués, de faire la seule chose qui soit raisonnable selon lui : entamer le dialogue avec les populations du Sud « légitimement inquiètes et traumatisées par les radiations provoquées par les explosions atomiques françaises de 1960 ».
Sortir de la dépendance excessive des hydrocarbures conventionnels
Le gouvernement aux yeux de Benouari ne voit dans la contestation grandissante des populations qu’ « un vulgaire trouble » à l’ordre public, qu’il faut « réprimer sans état d’âme ». Mauvais calcul, note-t-il, car il juge que ce refus de dialoguer ne fait qu’alimenter les rumeurs sur « des contrats passés avec des multinationales, contrats qu’il faut honorer coûte que coûte ».
L’exploration comme l’exploitation du gaz de schiste doivent être rejetées, selon Ali Benouari. Pour deux raisons. « Non seulement en vertu du principe de précaution (dangers environnementaux non maîtrisés au vu des technologies actuelles), mais aussi pour sortir de la dépendance excessive vis-à-vis des hydrocarbures conventionnels ». Il préconise comme d’autres l’ont fait de diversifier notre économie et nos sources d’énergie. « Le Sahara, dit-il, nous offre justement la plus grande et la plus inépuisable d’entre elles, l’énergie solaire ». « L’alternative au pétrole et au gaz conventionnels, ce n’est pas le gaz de schiste, c’est le soleil ! », clame Ali Benouari pour qui le gaz de schiste, non seulement, pollue les nappes d’eau souterraines, mais renforce la dépendance du pays, le soleil les valorise au contraire.
Une fuite en avant
Poursuivant son réquisitoire, Ali Benouari pense que l’idée d’exploiter le gaz de schiste, envers et contre tous, « est une sorte de fuite en avant ». Une manière « pour le pouvoir de rassurer une population rendue inquiète par la baisse des prix du pétrole, de lui faire croire que nous avons une autre source d’énergie, quasi inépuisable ». Cette fuite en avant, soutient-il, le dispensant d’affronter la dure réalité et de devoir entamer des réformes qui seront la négation de tout ce qu’il a fait depuis 15 ans.