Les importations baissent, mais l’économie continue de fonctionner, et le marché est approvisionné normalement. Cette tendance révèle qu’une partie des devises était exportée sans contrepartie.
Une baisse significative des importations algérienne se dessine pour l’année 2015, selon les résultats partiels publiés par les services de douanes. Pour la plupart des produits, le Centre national de l’informatique et des statistiques des douanes (CNIS) fait état d’une baisse allant du quart à la moitié des importations enregistrées durant la période correspondante de 2014. Malgré cela, il n’y a pas de pénurie particulière signalée sur le marché algérien, aussi bien pour les produits destinés à la consommation que pour la matière première, ce qui soulève de sérieuses questions sur l’utilité et sur la réalité même de certaines importations des années précédentes.
Les importations de matériaux de construction sont passées de 1,24 milliard de dollars durant les quatre premiers mois de 2014, à 811,77 millions de dollars durant la même période de 2015, ce qui représente une baisse de 34,5%. En quantité, la baisse est moins importante. On passe de 3.6 millions de tonnes à 3.2 millions de tonnes, ce qui représente un recul de 10.12%. Selon des statistiques de la douane, la moyenne mensuelle s’établit à 202 millions de dollars, contre 304 millions en 2014, et 285 millions en 2013. Pour le ciment, produit central dans ce secteur, la baisse est de 20.28% en valeur. Les importations sont passées de 174 millions de dollars à 138 millions.
Véhicules, produits alimentaires et pharmaceutiques
Pour les produits pharmaceutiques, la baisse est encore plus prononcée. Elle atteint 39.5% en valeur, et de 14% en volume. La facture des importations s’est élevée à 468,6 millions de dollars durant les quatre premiers mois de 2015, contre 774,54 millions à la même période de 2014. En moyenne mensuelle, on retombe à 117 millions de dollars, contre 216 millions de dollars en 2014 et 195 millions en 2013.
Pour les produits alimentaires, les chiffres du mois d’avril 2015 disponibles auprès du centre informatique de la douane font état d’une baisse de 15% par rapport à avril 2014. Les importations avaient atteint 855 millions de dollars, contre 1.006 milliards en 2014. Quant aux véhicules de tourismes, qui continuent leur dégringolade entamée en 2014, la baisse est encore plus importante, puisqu’elle atteint 48.05% Ce chiffre n’est cependant pas significatif, car de sérieuses perturbations ont été enregistrées en raison du cafouillage qui a accompagné l’application du nouveau cahier de charges des concessionnaires. Des milliers de véhicules étaient restés en rade, faussant les données du mois d’avril
Importations surévaluées
Les importations algériennes, qui se font essentiellement en euros, ont bénéficié de la hausse du dollar, qui s’est nettement raffermi face à la monnaie européenne. Mais ceci ne suffit pas pour expliquer les baisses enregistrées. Plusieurs autres facteurs entrent en jeu, comme les retards enregistrés auprès des banques et de différents services administratifs », « instruits » pour compliquer la tâche des importateurs.
Mais c’est une plus grande rigueur, imposée par les difficultés financières du pays, qui serait à l’origine de cette baisse des importations. « Il suffit d’éliminer les surfacturations, les opérations douteuses et d’imposer un minimum de contrôle pour changer la donne », selon un économiste, qui estime que les « importations algériennes étaient nettement surévaluées de cinq à dix pour cent probablement». « Le simple fait de se savoir surveillés a poussé de nombreux opérateurs à opérer de manière différente », ce qui devrait aboutir à une baisse sensible de la facture des importations », dit-il. A contrario, cela prouve l’incroyable gabegie qui régnait dans les opérations d’importation, comme l’a révélé le récent scandale des concessionnaires automobiles, qui transféraient leurs bénéfices à l’étranger par un simple jeu de facturations.
Pas de pénurie
Il faut cependant attendre la fin de l’année pour vérifier si cette tendance va se poursuivre durant le second semestre, et si elle a un impact sur l’économie du pays. Pour l’heure, le marché est correctement alimenté en produits de consommation. Des chefs d’entreprises, interrogés par Maghreb Emergent, ne font pas part de difficultés particulières pour s’approvisionner en matières premières. « Il n’y a pas de pénurie », a déclaré le PDG d’un groupe privé.
Si cette situation devait se prolonger, elle confirmerait que le pays peut vivre avec beaucoup moins d’importations, sans que cela ait un effet significatif sur la consommation et sur l’activité industrielle. Ce qui, au final, signifierait qu’une partie des devises du pays étaient exportées inutilement.