Gouvernement et consommateurs algériens sont satisfaits du niveau de prix pendant le Ramadhan. Mais les fellahs sont au bord de la rupture.
Le consommateur algérien a passé un bon Ramadhan 2017. Les prix des fruits et légumes sont restés très bas depuis le depuis le début du mois de jeûne, il y a trois semaines, alors que traditionnellement, le Ramadhan entraine une flambée des prix.
Si le consommateur trouve son compte dans cette évolution des prix vers le bas, le producteur en subit brutalement les effets, avec une réduction considérable de ses marges bénéficiaires, quand il ne s’agit pas de pertes sèches.
Sur les marchés de gros du centre et du centre-ouest, de Boufarik à Chlef, en passant par Attatba et Bougara, les prix n’ont probablement jamais été aussi bas, à prix constants.
La tomate est à peine au-dessus de dix dinars le kilogramme, les haricots verts à moins de cinquante dinars, tout comme les poivrons. Les aubergines et la courgette trouvent difficilement preneur, autour de dinars le kilo. La pomme de terre, produit phare, reste au-dessous de25 dinars.
Les fruits de saison, pastèques et cantaloup, frisent les dix dinars, alors que le melon jaune reste un cran au-dessus, autour de trente dinars. Salade verte, betteraves, et autres produits communs sont également au plus bas.
Légère variation attendue
Des changements mineurs pourraient intervenir durant les dix prochains jours, en raison de la déstabilisation du marché que risque de créer les fêtes de l’Aïd, avec une longue pause de quatre jours. Mais la situation devrait revenir rapidement à ces mêmes niveaux, l’été étant traditionnellement une saison d’abondance.
Ces niveaux de prix trouvent confirmation auprès des marchands ambulants, qui pratiquent des prix proches de ceux des marchés de gros. Quant au prix chez les détaillants, ils varient selon les villes et les quartiers, et ils sont parfois totalement déconnectés des prix de gros. Comme les commerçants maintiennent leur marge, quel que soit le prix, c’est le revenu de l’agriculteur qui se trouve mis sous pression.
La pomme de terre dicte toujours les prix
Un fellah s’étonne de cette situation. « Cela fait vingt ans que je vends la tomate de saison au même prix de gros », alors que prix de tous les autres produits ont explosé, dit-il.
Comment expliquer ce bas niveau de prix ? Abondance de la production, baisse des revenus des ménages, qui achètent moins, premiers résultats de la politique agricole du gouvernement, et même « baraka du Ramadhan », tout a été dit. Mais un opérateur, régulièrement consulté, maintient ses propos, avec une constante : selon lui, c’est la chute du prix de la pomme de terre qui entraine tout le reste.
La pomme de terre « opère comme un régulateur du marché » indique-t-il. Quand son prix a explosé en mars-avril, tout le reste a suivi. A l’inverse, depuis le reflux enregistré début mai, quand le prix de la pomme de terre est passé 60 à 22 dinars sur les marchés de gros, tout le reste s’est dégonflé.
Les fellahs se ruinent
Ces prix font le bonheur des consommateurs. Le gouvernement est lui aussi satisfait d’une évolution qui conforte la préservation de la paix sociale. Par contre, les fellahs se sont à la peine. Leur marge est réduite à l’extrême, et beaucoup perdent de l’argent. Il suffit de comparer le prix de vente de certains produits, en gros, et le coût de production pour s’en rendre compte.
Les coûts de production, pour une récolte correcte, tourne autour de 25 dinars le kilo pour la pomme de terre, 20 dinars pour la tomate. Le coût de la semence constitue près de la moitié du coût pour ces produits.
Deux facteurs permettent aux fellahs de tenir le coup Une hausse de la productivité est régulièrement enregistrée, avec l’introduction de semences, de plus en plus chères, certes, mais de plus en plus performantes ; et la non comptabilisation des frais liés à la terre et aux équipements déjà amortis.