L’économiste Belkacem Boukherouf estime que « la culture fiscale des Algériens peut être une entrave à la mise en œuvre de l’ISF (impôt sur la fortune) et aggraver la crise fiscale que notre économie vit, l’informel pouvant ressurgir et la débancarisation des avoirs pouvant s’accélérer ».
Un impôt sur la fortune a été introduit par le PLF 2018. Y seront assujetties les personnes détenant un patrimoine d’une valeur supérieure à 50 millions DA et qui se décline notamment en résidences secondaires, yachts, avions privés, voitures de luxes, pierres précieuse, etc. 50 millions de dinars, est-ce une fortune ? Belkacem Boukherouf, économiste, estime que le montant est trop élevé. « Le seuil de 50 millions est, à mon sens, trop élevé. Il devrait être ramené à des proportions moindres, histoire d’inciter les détenteurs d’avoir à les réinvestir au lieu de les thésauriser », plaide-t-il rappelant que « l’impôt sur la fortune a été, pendant longtemps, une exception française puisque c’était le seul pays à taxer le patrimoine des personnes physiques en plus de leurs revenus » et en expliquant que « cette taxe revêt, dans son esprit, un caractère de solidarité, en lui faisant jouer le rôle de mécanisme de péréquation et de redistribution de la richesse en ôtant au riches une partie de leurs avoirs ».
Par ailleurs, relevant une particularité de la situation prévalant en Algérie, Belkacem Boukherouf estime que « l’’ISF est par nature progressif et plusieurs paliers de fortune y sont définis pour soumettre les concernés à des taxations graduelles ». « L’ISF augmente au fur et à mesure qu’augmente la fortune des personnes physiques. 1% sur une fortune personnelle de 50 millions de dinars représenterait 500000 DA. Pour une personne physique, ce n’est pas trop payé », ajoute-t-il.
Toutefois, M. Boukherouf considère que la culture fiscale des Algériens peut être une entrave à la mise en œuvre de l’ISF. « Le problème est que l’aversion à l’impôt qu’on connait à l’Algérien peut aggraver la crise fiscale que notre économie vit, l’informel pouvant ressurgir et la débancarisation des avoirs pouvant s’accélérer », avertit-il en comparant l’Algérie à la France « où la tradition fiscale est ancrée et où les dispositifs de contrôle et de mesure de la fortune sont fiables ». « Le gouvernement algérien, à moins d’opérer par forcing, ne disposera pas à court terme, de ces dispositifs opérationnels de collecte et de contrôle. Il sera question d’estimer les valeurs immobilières et foncières des concernés, les droits d’usufruit et d’usage ainsi que les actions, les obligations et autres titres détenus », assure-t-il.