La Libye utilise des « méthodes non économes » dans l’exploitation de cette nappe, a affirmé dimanche à la radio le directeur général de l’Institut national de recherche agronomique, M. Fouad Chehat.
Fouad Chehat, directeur général de l’Institut national de recherche agronomique (INRA), a accusé dimanche la Libye de provoquer une détérioration de la nappe albienne, en procédant à un pompage qui ne respecte pas les règles fixées conjointement par les pays riverains. Intervenant dans la matinée au cours d’une émission de radio, M. Chehat a affirmé que la Libye utilise des « méthodes non économes » dans l’exploitation de cette nappe.
La Tunisie exploite « un peu » la nappe, « la Libye beaucoup », a-t-il dit. La partie libyenne « a dégradé les réserves existantes, en utilisant méthodes non économes », a-t-il déclaré. Il a appelé à être « prudent » dans l’exploitation de cette nappe, en utilisant « rationnellement » les réserves disponibles. Il a plaidé pour « une exploitation intelligente de ces réserves, non renouvelables ». Pour lui, il faut « mesurer ce qu’on fait, améliorer très nettement la gestion de l’eau, avec des systèmes économes ».
La nappe phréatique, qui couvre une partie du Sahara algérien, pour s’étendre jusqu’en Tunisie et en Libye, est exploitée selon des accords tripartites fixant les quotas de chaque pays.
Polémique
M. Chehat a également contesté les estimations concernant cette nappe. Alors que certaines études font état de réserves dépassant 40.000 milliards de mètre cube, pouvant être exploités sur cinq mille ans, M. Chehat a affirmé que ces calculs ne sont pas suffisamment étayés. « Je ne suis pas du tout d’accord avec cette idée », a-t-il dit, se demandant « sur quelle base » s’appuient ceux qui donnent ces chiffres. « Sur quelles études hydrogéologiques » s’appuient-il, a-t-il martelé, ajoutant que les études menées jusque-là sont « insuffisantes ». Cela n’empêche pas d’aller à « une utilisation de manière plus importante des nappes phréatiques ».
Sur d’autres chiffres, M. Chehat s’est par contre montré plus indulgent. Il a ainsi affirmé que l’Algérie est passée de 50.000 hectares irrigués « il y a une dizaine d’années » à 1.15 millions d’hectares. Pour lui, elle doit aller « vers l’objectif fixé », qui est d’arriver à deux millions d’hectares irrigués « dans les cinq prochaines années ». C’est la condition première pour maîtriser la balance agricole. L’augmentation de la production doit, en effet, se faire par une amélioration de la productivité, « non en surfaces » par la conquête de nouvelles terres. « On peut gagner 600.000, voir un million d’hectares », mais c’est une limite, a-t-il estimé.
Optimisme pour l’année 2016
Par contre, il est possible de développer « une agriculture durable dans le sud ». Mais il faudrait « développer une agriculture moderne, intensive ». Il « n’est pas question d’une seule culture » par an, ou « de développer le blé seul. Il faut avoir une rotation des cultures, avec au moins deux cultures sur une même parcelle ». Cela passe également par « une modernisation des pratiques et des techniques » et « une amélioration des variétés et des races » animales.
Au sujet de la saison actuelle, marquée par une absence presque totale de pluies jusqu’à fin février, puis par des pluies marquées depuis début mars, M. Chehat s’est déclaré optimiste. Il a affirmé que les pluies de mars-avril peuvent sauver la saison agricole, particulièrement si de nouvelles pluies sont enregistrées en avril-mai. Il s’est déclaré « raisonnablement optimiste » pour la situation dans l’ouest du pays, alors que dans l’est, la situation serait encore meilleure. « L’année peut être sauvée. Globalement, ce sera une année au moins moyenne », a-t-il dit.