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La relation entre l’Etat et le business au delà du bras de fer Tebboune -Haddad

Par Yazid Ferhat
juillet 29, 2017
La relation entre l’Etat et le business au delà du bras de fer Tebboune -Haddad

 

La chronique hebdomadaire de El Kadi Ihsane sur El Watan s’est proposée de revisiter l’actualité conflictuelle sous le questionnement de la théorie des sciences politiques. Que dit-elle sur le sujet ?

 

 

Est ce qu’il faut se réjouir de la mise en quarantaine politique dont pourrait devenir l’objet, Ali Haddad, le président du FCE à l’ère du gouvernement Tebboune ?  Il existe dans les réponses, les travaux d’un siècle de sciences politiques appliquées au développement économique. Quel type de relation doit entretenir l’Etat avec le monde du business pour accroitre la croissance, l’emploi et les revenus des populations ?  Dans le cas algérien, cette question est assortie d’une particularité, l’Etat tire l’essentiel de ses revenus fiscaux d’une activité primaire, pétrole et gaz. L’observation intuitive montre que l’Etat (par l’expression du pouvoir politique) est  pro-business lorsque les revenus de la fiscalité  pétrolière sont faibles. C’était le cas à l’arrivée au pouvoir de Abdelaziz Bouteflika, il y’a plus de 18 ans. La même observation relève que l’Etat ne se soucie plus d’élargir l’activité du privé et de l’assiette fiscale qu’elle apporte avec elle, mais vise plus à la contrôler, lorsque les revenus de sa rente minière le dispense de le faire. C’est le virage de 2006-2009  couronné par la LFC de 2009, dont les effets continuent de largement peser sur le dynamisme insuffisant de l’entreprenariat algérien. La théorie des sciences politiques n’est pas totalement convergente sur les facteurs de succès dans le développement. Elle est par contre assez univoque sur  ceux de l’échec.  L’Etat qui se confond avec sa bourgeoisie d’affaire et en devient l’appendice politique ne développe pas une économie. L’Etat qui bloque l’émergence d’un entreprenariat privé dynamique retombe sur son pré-carré minier. Et échoue la diversification de son économie. Le pouvoir de Abdelaziz Bouteflika ne se correspond ni à la première configuration, ni à la seconde. Il n’est pas au service intégral du monde des affaires. Il n’est pas hostile à tout business privé. Où se situe-t-il ? Dans une catégorie « fine » ou le pouvoir politique se sent suffisamment consolidé pour modifier structurellement le rapport de force au sein de son capitalisme national. Changer le leadership économique du business en faveur de ses amis et de sa base de soutien la plus proche. C’est ce projet conscient et volontariste, dont Ali Haddad était l’instrument actif, qui entre à son tour en crise en 2017.  En s’occupant durant une bonne dizaine d’années à vouloir configurer à sa main l’entreprenariat algérien, le pouvoir de Bouteflika a retardé la diversification de l’économie algérienne. Il pensait avoir le temps. Il ne l’a plus.

L’Etat méconnait son chemin de croissance

Dans le discours que tient Abdelmadjid Tebboune, il n’existe pas encore les éléments de langage d’une autre ambition dans la relation entre l’Etat et le monde des affaires.  La volonté de « nettoyer » est très opportune politiquement. Utile pour préserver le vivre ensemble. Elle ne fait pas seule une politique de croissance sur ce front. Or l’enjeu est encore là.  Il s’agit de proposer un nouveau deal aux hommes et aux femmes qui ont choisi l’aventure de l’entreprise en Algérie. Et qui, eux, ont l’ambition de créer de l’emploi domestique, de la matière fiscale pour l’Etat, et, pour beaucoup, des revenus à l’exportation. Sans quoi, il pourrait y avoir anthropologiquement dans le capitalisme algérien politiquement protégé, une ère flen qui succéderait à une ère Haddad qui a succédé à une ère Rebrab. Echec. La relation optimale Etat-Business a besoin d’autres choses. En fait, elle a besoin de driver le monde des affaires de sorte à ce qu’il soit le plus performant possible dans les objectifs que l’Etat se donne. Or les objectifs, définitivement maintenant que le contre choc-pétrolier prend les allures d’une fin d’époque de l’énergie carbonée, sont ceux de la création de l’emploi et de la réduction des déficits de la balance de paiement. Pour développer un secteur privé diversifié et exportateur,  l’Etat doit renoncer à enchaîner les guerres successives contre les entreprises, éviter de laisser grandir des monopoles privés (surtout amis) qui se retournent vite contre la compétitivité intérieure. Il doit veiller à moduler les barrières d’entrée de manière proactive pour renouveler la concurrence. Accompagner les grands acteurs nationaux dans la conquête du monde. Un Etat à bonne distance d’action avec son environnement d’affaires ne donne pas pendant dix ans à ETRHB plus de plan de charge qu’il ne peut réaliser, mais tente en revanche de l’aider à obtenir des marchés de réalisation à l’étranger comme le fait l’Etat turc avec ses entreprises du BTPH. De même que l’Etat qui à une idée claire de son chemin de croissance dans l’économie mondiale d’aujourd’hui, s’allie avec Cevital pour son acquisition à Piombino en Italie et fait rentrer El Hadjar dans la chaîne de valeur internationale qui devrait aller des mines de fer du Brésil jusqu’au marché européen de l’acier. Pour pouvoir agir ainsi il faut que l’Etat lève le nez du monitoring des gestes de sujétions. Les entreprises « amies » sont celles qui soulagent la balance de l’emploi et des devises. Pas celle dont le président est en tournée saisonnière pour soutenir un mandat de plus, un mandat de trop.  La feuille de route des années Bouteflika n’était pas le développement par le dynamisme de la diversification de l’économie. L’expression de cette impasse est que l’entreprise la plus en vue durant ces années est un groupe qui doit presque tout à la commande publique. Et qui n’a pas réussi à en sortir.  Abdelmadjid Tebboune devra définir un nouveau pacte avec l’investissement privé avant de s’aventurer plus loin dans le nettoyage, bien sûr nécessaire, jamais suffisant.

Fiat-Chrysler envers et malgré tout

Il y’a une bonne nouvelle cette semaine, FIAT Chrysler envisage de produire son dernier modèle Tipo en Algérie.  L’ambassadeur d’Italie à Alger Pasquale Ferrara en a parlé en des termes très optimistes à RadioM, jeudi dernier. La délégation italienne a exposé son projet au ministre de l’industrie. Il est ambitieux.  Il prévoit d’amener un de ses principaux sous-traitants équipementier. Mais c’est une première ébauche. Nous sommes en Algérie et le cadre réglementaire change beaucoup. Dans la redéfinition d’une nouvelle relation avec le monde des affaires, la part du capital étranger est en perpétuelle négociation.  En plus, le nouveau gouvernement vient de jeter l’anathème sur l’expérience naissante de l’assemblage automobile en Algérie. Pas suffisamment intégrateur. Gros consommateur de devises. Il était censé en économiser. Un nouveau cahier des charges est en cours de préparation. Là aussi une élévation de la vision est attendue. Peut-on devenir particulièrement attractif dans l’assemblage automobile si le contexte général de l’investissement étranger ne change pas. Il existe des centaines d’entreprises étrangères qui sont paralysées dans leur administration stratégique car le moindre recours au registre de commerce pour modifier une ligne de leur statut, les expose au droit de préemption et à l’application du 49-51. C’est dire d’où il faudra repartir.

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