Les retenues hydrauliques en Tunisie s’appauvrissent à un rythme très inquiétant. Le déficit pluviométrique s’élève à 28% cette année selon l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP). L’agriculture déplore déjà des pertes financières et la population endure des coupures d’eau répétitives.
«L’eau, bientôt un luxe en Tunisie?», titrait ce mois d’août un site d’information tunisien. Le mécontentement des Tunisiens s’accentue de plus en plus à cause des multiples coupures d’eau potable depuis mars 2016, selon l’Observatoire tunisien de l’eau. De surcroit, l’eau est de mauvaise qualité (couleur, odeur), relève-t-on. L’agriculture est, quant à elle, d’ores et déjà impactée par le manque d’eau d’irrigation.
Les barrages hydrauliques en Tunisie enregistrent leur plus bas niveau en comparaison aux trois dernières années. C’est le triste constat fait par l ’UTAP. En effet, «les réserves des barrages ont atteint 760,8 millions de m3, fin août 2016», sachant qu’au cours de la même période précédente, le pays enregistrait environ 1212.5 millions de m3. Il s’agit d’un manque estimé à 451 millions de m3», déplorent les représentants de l’UTAP, en rappelant que «ces réserves se montent en temps normal à près de 1500 millions de m3».
Inquiétude de la population urbaine
Cette baisse a affecté directement l’alimentation en eau des ménages tunisiens, au point où la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (SONEDE) a dû recourir à des coupures d’eau, incluant même le nord du pays qui détient environ 46% des ressources en eau.
Le 23 juillet 2016, des citoyens ont coupé la route principale de Tunis pour protester contre ces coupures. La SONEDE reconnaissait alors que ces coupures répétitives étaient «essentiellement dues au manque de ressources hydriques», appelant les Tunisiens à «faire preuve de compréhension».
La cause de cette pénurie réside principalement dans la baisse de la pluviométrie observée au cours des deux dernières années. Mais le problème est, en outre, aggravé par le «nombre énorme de puits creusés partout en Tunisie», puisant dans la nappe phréatique, avait expliqué l’ancien ministre de l’Agriculture, des Ressources Hydriques et de la Pêche M. Saad Seddik lors d’une émission télévisée.
En somme, la Tunisie qui a su satisfaire les besoins en eau du pays durant plusieurs années, fait face aux sérieux effets du réchauffement climatique, estiment les spécialistes.
Le manque d’irrigation dessèche les récoltes et des pertes financières de près de 2000 MD
«Les pertes financières dans le secteur agricole sont estimées à 1994 millions de dinars, pour la saison 2015-2016», selon les représentants de l’UTAP, qui déclaraient ce jeudi, lors d’une conférence de presse, que «ce chiffre représente 21% de la valeur de la production agricole (9546 MD) et 7% du budget de l’Etat (29.250 MD). »
Interviewé sur MosaïqueFm, le président de l’UTAP, Abdelmajid Ezzar, a fait un constat alarmant sur la situation de l’agriculture. En fait, la Tunisie pourrait se retrouver contrainte d’augmenter ses importations agricoles. Citant en exemple la ville de Monastir, M. Ezzar fait savoir que la superficie des cultures sous serres s’est rétrécie à 2 millions de m², sachant que la capacité est de l’ordre de 60 millions de m². « Les légumes se feraient rares et le piment qui se vend à 2 dinars sera commercialisé bientôt à 6 dinars…si déjà on arrive à le trouver sur les marchés ! » s’inquiète ce responsable.