Alors que la France brandit depuis plusieurs jours la menace de suspendre son aide au développement à l’Algérie, les statistiques de la Commission européenne citées par la Radio algérienne dressent un tableau bien différent de cette prétendue assistance financière.
Premier constat surprenant : alors que certains cercles français évoquent une aide de 800 millions d’euros, la Commission européenne avance un chiffre bien plus modeste de 132 millions d’euros pour 2022. Plus étonnant encore, selon les autorités algériennes, l’aide réellement perçue ne dépasse pas les 5 millions d’euros.
Mais le plus inattendu reste à venir. Sur ces 132 millions d’euros annoncés, 106 millions ne quittent jamais le sol français. Cette somme, qui représente 80% du total, est directement versée aux écoles et universités françaises qui accueillent des étudiants algériens. Le choix des formations répond d’ailleurs aux besoins de l’économie française.
Que devient le reste ? Les 20% restants servent principalement à financer la promotion de la culture française en Algérie, les ONG françaises présentes sur place et le développement des intérêts économiques français dans notre pays.
En réalité, souligne la Radio algérienne, les véritables enjeux économiques se situent ailleurs. Les entreprises françaises ont exporté pour 3,2 milliards de dollars vers l’Algérie en 2023. Leurs investissements, qui s’élèvent à 2,5 milliards de dollars, sont pourtant loin derrière ceux d’autres pays comme les États-Unis, la Turquie, l’Italie, le Qatar, Oman ou l’Égypte.
Cette situation n’est pas nouvelle. En 1994 déjà, l’Algérie avait choisi de renoncer d’elle-même à un système similaire de financement des exportations françaises, qui était aussi présenté comme une aide au développement, rappelle encore la Radio algérienne.
Le plus significatif dans ce dispositif actuel est peut-être l’absence totale de l’État algérien dans son fonctionnement. Notre pays n’a son mot à dire ni sur la conception des programmes, ni sur leur orientation, ni sur leur mise en œuvre. Une réalité qui interroge sur la pertinence des menaces de suspension d’une aide qui, finalement, profite surtout à la France elle-même.
Yasser Kassama