Le DG de l’Insim, qui était hier l’invité de Radio M, garde son franc parler et livre une lecture très critique des orientations de la politique économique gouvernementale même s’il croit observer quelques infléchissements récents.
L’expert algérien juge tout d’abord « trompeur et insuffisant », le taux de croissance de 4% enregistré cette année par l’économie algérienne dès lors que pour parvenir à ce résultat on a dû injecter des dépenses publiques massives dans l’économie. Pour Lamiri : « notre croissance est artificielle c’est une croissance extensive. En Algérie, il faut investir 4 dollars pour produire 1dollars ». Et pour cause, au lieu de suivre l’exemple des pays du sud « qui ont réussi leur émergence économique en investissant d’abord dans la mise à niveau de leurs ressources humaines et de leur appareil institutionnel, notre pays a fait, au cours de la décennie écoulée, le choix inverse d’injecter des ressources financières massives dans un corps malade incapable de les absorber et de les utiliser efficacement ».
Un début de prise de conscience
Présent en qualité d’expert indépendant aux dernières éditions de la tripartite, il relève une « prise de conscience croissante de la plupart des agents économiques nationaux à l’égard de la précarité de nos équilibres macroéconomiques » .Une fragilité soulignée récemment encore à la fois par les résultats des appels d’offre lancés par le secteur des hydrocarbures et l’évolution à la baisse des prix pétroliers. Plus largement, A. Lamiri évoque à propos des politiques gouvernementales dans notre pays : « une corrélation très forte entre l’aisance financière et le laxisme budgétaire, les assainissements financiers sans fin des entreprises publiques et les choix économiques irrationnels. Dès que les recettes diminuent, on introduit plus de rationalité économique. Si on introduisait plus de rationalité avant que les recettes diminuent ce serait mieux».
De ce point de vue, A. Lamiri croit déceler des « indications positives » dans le fait que, contrairement aux exercices de planification précédents, le plan de développement pour la période 2015-2019,en cours d’élaboration, devrait « réserver une priorité moins franche que ses prédécesseurs aux infrastructures économiques et s’intéresser davantage à l’économie productive ». Une évolution qui n’empêche pas l’expert algérien de continuer à plaider auprès des pouvoirs publics en faveur des développements, encore très largement négligés, à la fois de l’ « économie du savoir et de l’investissement dans les ressources humaines ».
La priorité aux entreprises publiques, une fausse piste
Pour Lamiri, cet intérêt renforcé en faveur du secteur productif devrait bénéficier accessoirement à l’agriculture et principalement au secteur industriel public. Mais peut-on booster l’économie algérienne en faisant le choix prioritaire de la relance des investissements des entreprises publiques ? En guise de réponse à cette question, A.Lamiri propose une typologie des « expériences économiques réussies » au cours des 2 ou 3 dernières décennies. Selon lui, les réussites les plus probantes sont celles de pays comme la Corée, ou plus récemment la Pologne, qui « ont fait un choix clair en faveur de l’émergence d’un secteur productif privé ». Un deuxième cas de figure est celui de la Chine « ou les entreprises publiques et privées sont placées sur un pied d’égalité dans un cadre de marché. Celles qui réussissent peuvent se développer et celles qui échouent, quelque soit leur statut juridique, partent en faillite ». Le troisième cas est celui des pays qui, à l’image de l’Algérie, « continuent à privilégier le secteur public »et pour lesquels « il n’y a aucune expérience réussie ».
Quid du partenariat international ?
A.Lamiri qui regrette que les choix effectués par les autorités algériennes ne tirent pas suffisamment les leçons de ces expériences internationales se montre également relativement sceptique vis-à-vis des orientations récentes des pouvoirs publics en faveur du partenariat international entre groupe publics algériens et grandes entreprises étrangères. Une option qui selon lui : « peut améliorer les choses mais aucun pays ne s’est développé à travers le partenariat. Il vaudrait mieux utiliser nos ressources financières pour acheter des entreprises et réaliser des transferts de savoir faire ». Les entreprises privées seraient elles de leur côté victime d’un ostracisme de la part des pouvoirs publics algériens? Pas forcement selon A.Lamiri qui relève cependant qu’ « on ne fait rien ni pour ni contre les entreprises privées. On les laisse se débrouiller et on n’aide pas suffisamment les entreprises performantes ».
Extraits vidéos : http://bit.ly/1BSRe73
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