La fuite massive et organisée des sujets du baccalauréat 2016 a provoqué un scandale national qui a agité la scène médiatique de ces dernières semaines. Pendant que l’enquête se poursuit et que des arrestations sont en cours, le Café presse politique (CPP) de la webradio Radio M, du mercredi 8 juin (enregistrée en soirée à l’occasion du mois de ramadhan) s’est emparée de l’affaire pour tenter de décrypter ce qu’elle révèle au-delà de l’indignation et des accusations.
Avant de se plonger dans les interprétations, Akram Kharief, éditeur du site « Secret difa3 » est revenu sur les détails de l’enquête. « L’enquête technique révèle qu’une partie de l’attaque est venue de l’étranger et qu’il y a eu une complicité à large échelle, y compris hors-frontière », a-t-il informé. Ce qui ferait dire à la source interrogée que c’est le « bac algérien qui serait visé », a-t-il ajouté.
Adlène Meddi, rédacteur en chef de « El Watan week-end », s’est dit « terrorisé par la façon dont le fait de tricher a été banalisé ». « En 1992, ceux qui trichaient avaient honte de la dire, aujourd’hui on l’affirme ouvertement ». Une attitude guère surprenante selon Tarik Hafid, rédacteur en chef du site Impact 24, car « nous vivons dans une société où la triche est institutionnalisée ».
« Le pays a intériorisé la fraude » a renchéri Abed Charef, journaliste politique, en citant l’incapacité de l’Algérie à organiser des opérations de commerce extérieur, des élections crédibles, un bac crédible, etc.
« Mais je suis positivement surpris par la réaction de la société », a-t-il nuancé, « nous sommes encore capable d’être scandalisés par la fraude ». « En fait, cette affaire trahit l’écart entre la société et l’administration » a résumé Ihsane El Kadi, directeur de Interface Médias, l’agence éditrice du site Maghreb Emergent. « La société s’est mise à jour vis à vis du reste du monde mais l’Etat demeure en retard d’une guerre ».
Benghebrit, une ministre du 4e mandat
« La ministre de l’Education est née avec le 4e mandat, qui est la consécration sublime de la fraude, ce qui lui enlève toute velléité pour combattre la fraude », a analysé Abed Charef en précisant « qu’il ne faut surtout pas personnaliser le problème mais le poser en termes politiques ».
« La ministre Nouria Benghebrit joue un rôle alibi de la modernisatrice » a ajouté Ihsane El Kadi. « Elle montre, aux yeux du monde, qu’il y a une volonté de réforme au moins sur le secteur de l’éducation ». Ce qui est faut, il n’y a pas de vraies réformes car l’Etat est incapable de les mettre en œuvre.
La déception de la Tripartite
En second partie d’émission, le Café presse politique du mercredi 8 juin est revenu sur la tripartite qui a réuni le gouvernement, les syndicats et patronat dimanche dernier. « Les présents espéraient avoir le document des experts de la Task Force et non la restitution par MM. Sellal et Benkhalfa », a expliqué Ihsane El Kadi, présent à la rencontre, qui s’est dit déçu par ce rendez-vous. « On ne peut pas dire que la Tripartite à endosser quoi que ce soit ».
« La trajectoire proposée par le nouveau modèle économique de Sellal veut revenir progressivement à une situation soutenable des dépenses publiques et de l’endettement », a tempéré plus optimiste Hassan Haddouche, journaliste économique qui a rejoint le CPP en seconde partie.
« Le problème c’est que le gouvernement est incapable de mettre en œuvre cette feuille de route » a souligné Tarik Hafid. Un avis partagé par Abed Charef : « Je ne crois pas que Sellal soit capable d’un nouveau modèle économique sinon il l’aurait fait il y a déjà 4 ans ou même avant », a-t-il relevé avant de poursuivre : « Le pays n’a pas les institutions nécessaires pour faire cette mutation, on reste dans des intentions mais pas dans la gestion économique ». Et d’ajouter : « Sur le plan technique on sait ce qu’il faut faire mais on sait que ça ne se fera pas tant que le président Bouteflika sera là ».
Ecouter l’émission :