Epineuse question posée au CPP, le Café Presse Politique de Radio M. Comment l’Algérie, qui a les ambitions d’une puissance régionale, n’arrive-t-elle pas à décrocher l’organisation de la coupe d’Afrique des Nations de football ?
Le CPP a raté sa reconversion au football. Au lendemain de l’échec de l’Algérie dans la course à l’organisation de la coupe d’Afrique des Nations 2017, le Café Presse Politique de Radio M. a tenté de débattre de football. Il s’est retrouvé empêtré dans des discussions sur la politique internationale, la vocation africaine de l’Algérie, les erreurs d’appréciation et l’inadéquation de son système politique avec les exigences du monde moderne.
El Kadi Ihsane a rappelé que la CAN « est le premier évènement qui réunit les Africains, avant les sommets de l’Union africaine » et les épisodiques festivals de la jeunesse. Mais la tentative algérienne s’est transformée en « une véritable Bérézina », d’autant plus que le pays qui a obtenu la CAN 2017, le Gabon, a déjà organisé celle de 2012, alors que l’Algérie n’a organisé la compétition qu’une seule fois, en 1990. « C’est Gao bis, en moins dramatique. L’Algérie a fait une lecture inadaptée des rapports de forces, des réseaux et des évènements », ajoute-t-il. Pour lui, « les arguments de celui qui vient avec une valise d’argent sont plus convaincants que celui des réseaux politiques ».
C’est un « camouflet », renchérit Khaled Drareni. C’est aussi « un échec de la diplomatie algérienne qui était partie prenante », ajoute-t-il, rappelant que le discours officiel fait état d’un « complot » dont l’Algérie aurait été victime.
Histoire de pots-de-vin
Saïd Djaafar se déclare « plutôt content » que l’Algérie n’ait pas obtenu l’organisation de la CAN, car ce serait « le signe qu’on n’a pas graissé la patte ». Si on n’a « rien dépensé, ce serait parfait », dit-il, mais il redoute qu’on ait dépensé de l’argent, « mais pas là où il fallait. Ce serait plus grave ».
Abed Charef avoue qu’il ne sait pas sur quel terrain s’est jouée la décision. Il faudrait savoir si ça s’est joué sur le terrain diplomatique, celui des réseaux, sur le champ émotionnel avec la mort d’Albert d’Ebossé, le joueur camerounais de la JSK tué dans un stade, sur les commissions non versées ou mal versées, ou peut-être même parce que l’appareil qui gère ce type de candidatures n’a pas fait le travail. Il relève que « les astres étaient alignés » pour que l’Algérie obtienne la CAN 2017. Mais elle a réussi à ne pas l’avoir, pour se demander si l’Algérie voulait vraiment cette CAN.
Dans le ton général entourant cette affaire, il se déclare aussi gêné par « un discours méprisant », selon lequel « l’Afrique ne fonctionnerait que par la corruption. C’est une tonalité générale, à la limite du racisme ».
Et Abdelkader El Mali ?
Cet échec serait-il une conséquence de la mort d’Ebossé, ose Souhila Benali. « Ce serait réparateur », estime El Kadi Ihsane, qui avait écrit, au lendemain de la mort d’Ebossé, que « l’Algérie avait perdu moralement le droit d’organiser la CAN ». Avec la violence dans les stades, l’agression dont a été victime cette semaine le gardien international Azzeddine Doukha, le dossier algérien était mal perçu.
Mais c’est le côté obscur du football qui a dominé les discussions. Pour El Kadi Ihsane, « le Qatar a acheté la coupe du monde 2022, le Gabon a acheté la CAN 2017 », dit-il, pronostiquant que ça finira par se savoir. Mais pour lui, « on n’engage pas un pays comme l’Algérie, troisième PIB de l’Afrique, de cette manière. Il fallait s’organiser. Quand le Maroc a décidé d’avoir la CAN, il a l’a eue, il sait comment faire ».
Pour Abed Charef, cela s’appelle « avoir une politique sportive, qui accompagne une politique étrangère, une politique économique, etc. » Il note aussi que « le regard de la société envers les Africains n’est pas très positif, il est parfois raciste », et que la dernière grande actualité africaine a été l’organisation du départ de milliers de ressortissants nigériens.
Une attaque trop faible
Saïd Djaafar note à ce sujet qu’on « vit grâce à un capital ancien, celui de la guerre de libération, alors qu’il fallait travailler autrement. On est figé dans un modèle dépassé », dit-il. Dans le même sens, Khaled Drareni souligne que « l’approche africaine de l’Algérie a changé ». Il observe que « l’Algérie se sépare de l’Afrique », et rappelle qu’il n’y a eu « aucun déplacement du président Bouteflika en Afrique ». Pourtant, rappelle Abed Charef, le surnom du président Bouteflika pendant la guerre de libération était « Abdelkader El Mali ». Autre énigme : l’Algérie peut-elle organiser une CAN si le chef de l’Etat ne peut assister ni à la cérémonie d’ouverture, ni à la finale ?
Les deux attaquants alignés par l’Algérie dans cette affaire, Mohamed Raouraoua et Mohamed Tahmi, se sont révélés peu efficaces. Même si Hadj Mohamed Raouraoua a dribblé tout son monde, en donnant l’impression d’être tout puissant. Pourtant, c’est M. Tahmi qui risque d’être sanctionné d’un carton rouge lors du prochain remaniement.
Extraits vidéo : http://bit.ly/1z251at