Le décret royal autorisant les femmes à conduire des véhicules va bouleverser l'économie - Maghreb Emergent

Le décret royal autorisant les femmes à conduire des véhicules va bouleverser l’économie

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Pour la main d’œuvre étrangère, en revanche, il aura des conséquences négatives puisque des centaines de milliers de chauffeurs, en grande majorité originaires de l’Asie du Sud-Est et des Philippines, perdront leur emploi. Dès lors, ils ne rapatrieront plus leurs salaires, ce qui améliorera la balance des paiements saoudienne tout en pénalisant les rentrées de leurs pays d’origine.

 

  

En autorisant les femmes à conduire, le décret signé mardi par le roi Salman d’Arabie saoudite permettra à la population d’économiser des milliards de dollars, de stimuler le secteur automobile tout en rassurant les investisseurs sur la volonté de réforme du royaume.

De plus en plus de femmes devraient pouvoir rejoindre la population active et améliorer la productivité de l’économie, même si certains analystes estiment que, dans un premier temps, les effets sur la croissance seront modestes.

Pour la main d’œuvre étrangère, en revanche, le décret royal aura des conséquences négatives puisque des centaines de milliers de chauffeurs, en grande majorité originaires de l’Asie du Sud-Est et des Philippines, perdront leur emploi. Dès lors, ils ne rapatrieront plus leurs salaires, ce qui améliorera la balance des paiements saoudienne tout en pénalisant les rentrées de leurs pays d’origine.

Actuellement, 10 millions de femmes sont âgées de plus de 20 ans, étrangères comprises, en Arabie saoudite. Plus de 1,4 million d’étrangers sont quant à eux employés comme chauffeurs domestiques pour un salaire moyen de 500 dollars (426,25 euros) auquel il faut ajouter le coût de l’hébergement et de l’alimentation, soit 8,8 milliards de dollars chaque année, selon une étude de Monica Malik, chef économiste à l’Abu Dhabi Commercial Bank.

“En supprimant cette nécessité d’avoir un chauffeur domestique, même lorsque les femmes ne travaillent pas, on dope le salaire réel des familles à moyen et bas revenu”, explique-t-elle.

Le secteur automobile pourrait quant à lui bénéficier d’un effet d’aubaine à la faveur des achats et des locations de véhicules, de même que celui des assurances.

L’ampleur de la vague des licenciements de chauffeurs et leur retour dans leur pays d’origine pourrait en revanche pénaliser la demande en Arabie saoudite, déjà mise à mal par la faiblesse des cours du pétrole, et limiter la hausse de la croissance saoudienne à quelques dizaines de points de pourcentage, dans les premières années du moins.

 

Changements progressifs

 

A plus long terme, l’impact de la réforme pourrait toutefois s’avérer spectaculaire car elle lèvera l’un des obstacles qui entravent l’accès au travail des Saoudiennes.

Les réformes lancées l’année dernière par le prince héritier Mohamed Ben Salman ont pour ambition de porter à 30% la part des femmes dans la population active d’ici 2030 contre 22% actuellement.

A moyen terme, d’autres obstacles pourraient progressivement être levés, comme la tutelle masculine qui oblige chaque femme à demander à un homme, époux ou parent, l’autorisation de voyager à l’étranger, se marier, ou même bénéficier de soins médicaux et confère à la femme saoudienne un statut légal s’apparentant à celui d’un mineur.

“Les bouleversements économiques seront sans doute progressifs, en raison notamment de la fragilité du climat de l’économie, mais l’impact social sera considérable”, dit Monica Malik.

Selon Khalid Alkhudair, directeur général de Glowork, une agence de placement à destination des femmes, il y a actuellement 400.000 à 450.000 postes ouverts aux femmes dans le secteur saoudien de la distribution mais ils ne sont pas pourvus, faute pour les candidates de pouvoir s’offrir les services d’un chauffeur.

“Cette loi va encourager la mobilité de centaines de milliers de femmes. Le principal obstacle auquel nous sommes confrontés est celui du transport, c’est donc une formidable réforme.”

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