Pour l’ancien syndicaliste et expert en relations de travail,, Nouredine Bouderba, la contribution des travailleurs dans le financement des caisses sociales leur donne le droit de revendiquer la retraite avant l’âge légal comme un acquis social.
Nouredine Bouderba, ancien syndicaliste, est revenu dans l’émission l’Entretien de la webradio Radio M, sur le dossier brûlant de la suppression de la retraite avant l’âge légal de 60 ans. Refusant l’approche comptable qu’on appose à ce dossier, il affirme que la retraite est quelque chose de plus sérieux pour le confier aux comptables.
« La retraite c’est le niveau de vie d’une grande partie de la population », a-t-il souligné en rejetant avec vigueur les comparaisons avec l’Europe qui servent d’arguments pour justifier la remise en cause de la retraite proportionnelle.
Chiffre de l’OCDE et d’Eurostat à l’appui, il affirme qu’en Europe, le nombre de salariés actifs cotisants rapporté au nombre de retraités est de 1.65 pour 1, et il sera de 1 pour 1 en 2050. En Algérie, il est de 3.1 pour 1 actuellement, alors qu’il était de 5.7 pour 1 en 1990 et 2.7 pour 1 en 1997, au moment de l’institution de la retraite proportionnelle et la retraite sans conditions d’âge.
Il s’étonne à ce propos que ce ratio était meilleur en 1997, date de l’instauration du dispositif. Et de nuancer à propos des systèmes de retraite de par le monde qui peut être, selon lui, différent d’un pays à un autre en fonction des objectifs et politiques tracés. Il y a ceux qui encouragent la vieillesse active et ceux qui encouragent le travail de la jeunesse pour baisser le taux de chômage à travers les départs à la retraite.
M. Bouderba relève que le choix de l’Algérie s’est porté sur la réduction de chômage qui tournait à l’époque autour de 15% de la population en âge de travailler. Il a fait remarquer que le nombre de départ à la retraite dans le cadre des deux dispositifs (sans condition d’âge et la proportionnelle) n’a pas dépassé les 114.000 entre 1997 et 2001. Il explique ce résultat par le fait que la grande majorité des travailleurs ne remplissaient pas les critères exigés, notamment le nombre d’année de cotisations qui tournaient en moyenne à 25 ans.
Un acquis social des travailleurs
L’ancien dirigeant sydical défend en outre ce qu’il considère comme un « acquis social » des travailleurs. Pour lui, même si le monde du travail n’était pas à l’origine de l’instauration du dispositif, ce sont les travailleurs qui l’ont financé. Pour lui, il revient à l’Etat de corriger les inégalités dans les moments de crise, comme cela se fait de par le monde. Or, en Algérie, l’Etat n’a rien financé. « On a doublé le taux des cotisations à retraite à la charge des travailleurs qui est passé de 3.5% en 1991 à 7% aujourd’hui », a-t-il avancé. En contrepartie, les travailleurs pouvaient partir à la retraite avant l’âge légal.
La contribution des travailleurs est allée plus loin, selon lui, jusqu’à se substituer à l’Etat dans la prise en charge des dépenses de la solidarité, citant le cas des 7 années des fils de chahid, la retraite des gardes communales et les 150.000 travailleurs agricoles mis à la charge de la CNR. Ce dernier cas a engendré le premier déficit de la CNR en 1995.
M.Bouderba revient par ailleurs sur la différence conceptuelle entre le dispositif de départ à la retraite avant l’âge légal et la retraite anticipée qui a été instituée en 1994 comme un amortisseur social qui devait accompagner la plans d’ajustement structurel imposé par le FMI.
Dans le cas de la retraite anticipée le travailleur n’a rien à dire, a-t-il relevé, précisant qu’elle entre dans le cadre de la compression des effectifs des entreprises qui avaient des difficultés économiques.
« Ce dispositif n’a pas été utilisé contrairement à tout ce qui se dit sur la retraite anticipée. Il devait accompagner la mise en chômage de 400.000 travailleurs. Or, les chiffres officiels ne donnent que 40.000 travailleurs partis à la retraite anticipée de 1994 à 2000, soit moins de 7000/an », a-t-il souligné.