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Algérie

Le gouvernement algérien a excellé dans la gestion par effets d’annonce

Par Maghreb Émergent
juillet 14, 2014
Le gouvernement algérien a excellé dans la gestion par effets d’annonce

Ouverture d’un couloir vert pour les transports en communs (Bus) à Alger, acquisition d’un bateau pour une navette entre Alger et El Djamila, réduction des tarifs d’Air Algérie, le ministre des transports, Amar Ghoul, détient la palme des annonces gouvernementales sans lendemain.

Début 2014, le même ministre annonçait une autre navette maritime pour juin, dans le sens inverse, Port d’Alger vers Tamenfoust (Ain Taya). Entre temps, l’enlèvement des marchandises du port d’Alger par rail, la mise en place d’un centre de contrôle de la circulation automobile et l’installation de feux tricolores, annoncés lors de la campagne électorale présidentielle, se sont, en chemin, transformés en « projets d’études ». La direction de la SNTF a déjà signifié que l’opération de transport des marchandises par rail du port d’Alger au port sec de Réghaia est techniquement impossible, eu égard à la configuration et à la capacité du réseau actuel. Amar Ghoul a même promis un pont aérien vers le Brésil, alors que les Algériens attendaient de lui, de tenir sa promesse de réduire les tarifs imposés par Air Algérie et une meilleure ponctualité.
Mais M. Ghoul, qui a usé et abusé de la même méthode, dans le secteur des travaux publics, notamment dans la gestion du chantier du siècle – l’autoroute Est-Ouest – avec ses records de rallonges en temps et en argent, a fait bien des émules parmi ses pairs au gouvernement.
Amara Benyounès s’y met aussi
Le ministre du Commerce, M. Amara Benyounès, lui-même ex-ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, a marqué son passage dans ce dernier secteur par l’annonce de la dotation « des 48 wilayates du pays par des incinérateurs », pour venir à bout de la gestion des ordures ménagères, avec la promesse d’éradication des décharges sauvages. Depuis, les déchets urbains s’amoncellent et le ministre a annoncé, solennellement, que « le président Bouteflika l’avait chargé d’accélérer l’adhésion de l’Algérie à l’OMC ».
Dans le registre des annonces sans lendemain, ou plutôt vite démenties par les faits, Sonelgaz est à sa énième promesse d’un été sans délestages, avec force explications techniques. Mais les coupures d’électricité sont toujours là, et les responsables de l’entreprise publique aussi. Pour rester dans le secteur de l’énergie, l’annonce par le gouvernement de produire 40% d’électricité grâce au renouvelable (solaire, éolien) à l’horizon 2030 bat de l’aile. Les « 10 MW » d’Adrar, sur 420 prévus, livrés après une année de retard ne peuvent cacher les tâtonnements pour la mise en place d’une industrie du photovoltaïque.
L’allocation touristique, promesse «post-Printemps arabe»
L’augmentation de l’allocation touristique fait aussi l’objet de multiples déclarations de circonstances, après les émeutes de janvier 2011. Le gouverneur de la Banque d’Algérie avait affirmé à maintes reprises que «l’allocation de change sera revue à la hausse par la Banque d’Algérie dans le but de freiner l’élargissement du marché parallèle des devises». La bonne nouvelle, attendue depuis des années par des millions d’algériens au regard de l’aisance financière du pays, avait alimenté les espoirs pour quelque temps. Mais là aussi, l’ex-ministre des finances, Karim Djoudi, a tenu à remettre les pendules à l’heure, juste avant son départ : en marge d’une rencontre organisée par la Cosob, en déclarant que la «révision de l’allocation touristique n’est pas à l’ordre du jour».
Avant, il y avait Ould Abbes
Parmi les anciens ministres qui affectionnaient les annonces tonitruantes, Djamel Ould Abbes a longtemps tenu la haut de l’affiche. L’homme que les syndicalistes de la Santé appelaient « monsieur réponse à tout », promettait, dans le tas, la construction de centres anti-cancer dans chaque wilaya, la dotation des hôpitaux de moyens supplémentaires, en passant par le règlement de situations particulières ou personnelles. A l’hôpital de Khemis-Miliana, le personnel avait fait part d’un manque crucial de radiologue pour le scanner tout neuf. Oud Abbes se tourne vers un membre de son staff et lance : «Dès que je rentre au ministère, je vous détacherai un radiologue provisoirement en attendant de vous en affecter un à titre définitif.» Inutile de rappeler qu’aucun radiologue ne s’est pointé à l’hôpital.
Ce style, le ministre l’a perfectionné à merveille au département de la Solidarité, de la famille et de la communauté algérienne établie à l’Etranger. Mais une de ses fausses promesses a donné lieu à des émeutes. Comme celle faite dans le quartier populaire de Oued Koriche, dans la capitale, où il avait promis le relogement des familles sinistrées suite à une explosion de gaz. « Cela se fera dans un délai ne dépassant 24 heures, c’est une instruction du président de la république » avait-il dit.
700 milliards de dollars engloutis
La compilation n’est pas exhaustive mais dans cette frénésie de la course aux annonces, la palme reviendrait probablement au secteur des télécommunications avec la fameuse 3 G. Près d’une dizaine d’années d’attente et de multiples reports pour finir dans le bas du classement mondial. Rien que pour les reports survenus depuis 2011, Younes Grar, consultant en nouvelles technologies et ancien conseiller au ministère de la Poste et des technologies de l’information et de la communication, a estimé les pertes financières de ce retard à 600 millions de dollars.
L’ancien chef du gouvernement, Ahmed Benbitour, estime que pas moins de 700 milliards de dollars ont été « engloutis » dans les plans quinquennaux du président Abdelaziz Bouteflika. Malgré ces investissements, le pays demeure toujours empêtré dans la crise du logement, de la mauvaise qualité des soins de santé, du chômage et de la précarité, l’absence de stratégie industrielle. Mais il y a toujours les promesses pour gagner du temps et entretenir l’attente et l’espoir parmi population.

 

 

 

 

 

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