Selon Anouar Rahmani, qui vient de publier un roman Les délires de Jibril, il a été convoqué par la police judiciaire de Tipaza en raison de certains passages de son premier roman, La ville des ombres blanches.
Un jeune romancier algérien, du nom de Anouar Rahmani, a été convoqué lundi 27 février 2017 par la Police judiciaire de Tipaza pour « s’expliquer » au sujet d’un de ses romans. Dans un post Facebook publié le lendemain de sa convocation, cet écrivain arabophone, par ailleurs étudiant, blogueur et chroniqueur, affirme avoir été accusé « d’atteinte à l’entité divine et à la religion ».
Anouar Rahmani, qui vient de publier un roman Les délires de Jibril, a été convoqué par la police judiciaire de Tipaza en raison de certains passages de son premier opus, La ville des ombres blanches, explique-t-il.
Mis en ligne à l’automne 2016 sur Internet suite aux refus de plusieurs maisons d’édition de le publier, ce roman raconte une histoire d’amour entre un maquisard du FLN et un pied-noir.
Le bouquin en question contient certains passages où l’un des personnages rencontre un sans-abri se croyant être Dieu.
Sur son compte Facebook, Anouar Rahmani raconte avoir été interrogé pendant plusieurs heures sur ses convictions politiques, ses chroniques publiées sur El Watan, ainsi que ses convictions religieuses. Des questions auxquelles il a refusé de répondre, estimant que « nul n’a le droit d’interroger un citoyen sur sa religion ». « Si j’avais répondu, j’aurais renoncé à l’un de mes droits fondamentaux et constitutionnels », a-t-il dit.
Il a précisé que les éléments de la police judiciaire de sa ville natale lui ont notifié les accusations retenues contre lui, en l’occurrence une « atteinte à l’entité divine et à la religion ». Il a rejeté ses accusations, a-t-il expliqué dans le même post sur Facebook, car les « passages incriminés ne font pas du personnage en question ‘’Dieu’’ mais racontent que ce sans-abri se prend pour un dieu ».
Anouar Rahmani n’est pas au bout de ses peines puisque les éléments de la PJ lui ont également notifié des accusations sur son utilisation de termes qualifiés de « sexuels ». Le blogueur dit avoir expliqué lors de son interrogatoire que ces termes sont « purement scientifiques, que nous pouvons d’ailleurs retrouver dans les livres scolaires de science et biologie ».
« Cette affaire est entre les mains du Procureur général », a annoncé hier cet étudiant en droit, qui dit attendre sa convocation pour le procès pouvant déboucher sur une peine de 10 années de prison. « Ce serait la première fois dans l’histoire du pays qu’un écrivain comparaît devant un tribunal pour ce qu’il a écrit dans une œuvre de création », estime-t-il.
Le roman La ville des ombres blanches suscitait bien de vives réactions chez certains conservateurs, sur les réseaux sociaux et sur les médias. Anouar Rahmani admet tout de même qu’il ne s’attendait pas à ce qu’une « œuvre de création soit jugée par un tribunal ». « Si cela se fait, ce sera la porte ouverte à toutes les répressions », déplore-t-il.
Cette affaire n’a pas manqué de susciter l’indignation des internautes, qu’ils soient journalistes, écrivains ou militants. Certains rappelaient que la Constitution algérienne garantit la liberté du culte et la liberté d’opinion.
(*) Cet article a été publié initialement sur le Huffington Post Algérie.