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Tunisie

Le ministre tunisien des Finances à ME : « Nous œuvrons à ce que les échanges intermaghrébins ne soient plus réglés en devises »

Par Yacine Temlali
décembre 22, 2014
Le ministre tunisien des Finances à ME : « Nous œuvrons à ce que les échanges intermaghrébins ne soient plus réglés en devises »

Hakim Ben Hamouda se félicite, dans cet entretien avec Maghreb Emergent, « de la nette progression des ressources fiscales » qui réduirait le recours à l’endettement. Pour lui, le prochain gouvernement « déterminera ses priorités » mais « il faudrait qu’il poursuive dans la maîtrise des dépenses, la stabilisation, les réformes engagées ainsi que la relance des investissements ».

 

Maghreb Emergent : La Tunisie traverse une période économique difficile. Le taux d’inflation pour 2014 est de 5,5% selon la Banque centrale. Le pays compte 700.000 chômeurs et le pouvoir d’achat des Tunisiens est en baisse. Pourriez-vous nous dire dans quel état vous allez laisser les caisses de l’Etat au prochain gouvernement ?

 

Hakim Ben Hamouda : Je pense que la transition politique a été à l’origine des grandes difficultés économiques que connaît le pays. Notre principale préoccupation, à notre nomination en janvier dernier, était d’empêcher une détérioration de la situation économique et d’arrêter la dérive des finances publiques. J’estime que nous avons réalisé un énorme progrès en matière de stabilisation de notre situation économique en 2014, notamment en manière de réduction du déficit des finances publique : on sera au dessous des 5% en 2015, alors que si la tendance de 2013 s’était maintenue en 2014, il se serait aggravé. Le deuxième élément, très important, est la nette progression des ressources propres, en particulier des ressources fiscales dans le budget de l’Etat, ce qui réduirait le recours à l’endettement. Le troisième élément est celui de l’inflation, qui a baissé de 6,5% en 2013, à 5,2% en 2014, ce qui est un progrès très important même si l’on considère que ce niveau est encore élevé. 

Il faudrait maintenant poursuivre dans la voie du redressement économique, car les dossiers économiques seront encore plus importants dans la période qui s’ouvre. Ce sera une période de transition économique dans laquelle il faudrait aller vers un changement de modèle de développement, une relance des investissements et, bien entendu, l’ensemble des réformes économiques, notamment les réformes financières et bancaires.

 

Vous êtes l’un des concepteurs de la loi de finance 2015. Pourriez-vous nous dire sur quoi vous vous êtes basés pour l’élaborer ?

 

Quatre principales préoccupations figuraient dans la loi de finance complémentaire pour 2014 et figurent dans la loi de finance pour 2015. Ce sont la stabilisation macro-économique, la croissance, les réformes économiques et bancaires et, enfin, la relance des investissements, car nous voulions que l’investissement accompagne la stabilisation macro-économique pour éviter que cette dernière ne soit synonyme d’austérité. Nous avons introduit des réformes fiscales en 2014 et nous souhaiterions qu’elles soient accélérées en 2015. Une autre de nos préoccupations est celle relative à la réforme sociale, avec l’implication des organisations syndicales.

 

Pensez-vous que le prochain gouvernement engagera des mesures d’austérité, s’appuyant sur la légitimité des urnes, ce que ne pourrait pas faire un gouvernement technocratique intérimaire?

 

Le prochain gouvernement déterminera ses priorités en matière de politique économique. Il faudrait qu’il poursuive dans la maîtrise des dépenses, la stabilisation, les réformes engagées ainsi que la relance des investissements. Ce sont des éléments qui sont en cœur du redressement économique.

 

L’Europe est le principal partenaire économique de la Tunisie. Elle peine à sortir de sa crise, et les différentes institutions internationales lui prédisent une stagnation à long terme. Ne pensez-vous pas que cela serait un handicap pour la relance de l’économie tunisienne ?

 

C’est effectivement un handicap. La fragilité de l’économie mondiale et son incapacité à la dépasser ont eu un impact négatif sur la relance de l’économie en Tunisie. L’économie tunisienne a été prise entre deux mouvements : le premier est celui de la situation politique interne. Le second est la situation difficile de l’économie mondiale.

L’Europe reste un partenaire classique clé pour nous. L’intégration maghrébine est aussi très importante. Nos relations avec l’Algérie sont excellentes. La situation conflictuelle en Libye a eu un impact sur nos importations et nos échanges extérieurs avec ce pays. Les relations avec le Maroc sont excellentes aussi. Je pense qu’il faudrait accélérer les choses pour nous assurer une véritable zone de libre-échange régionale forte.

 

Quels seraient, selon vous, les obstacles à la concrétisation de cette intégration maghrébine ?

 

Nous essayons d’aller de l’avant. Moi et mes collègues ministres de l’Economie des Etats maghrébins sommes convaincus de l’importance de cette intégration. Nous œuvrons pour en faire une réalité qui soit à la hauteur des aspirations des peuples de la région.

 

Avez-vous pris des mesures incitatives à l’adresse des investisseurs algériens voulant investir en Tunisie ?

 

Nous avons signé l’accord de libre-échange, les choses sont en train d’avancer. Nous travaillons en ce moment pour faire en sorte que les échanges entre les pays du Maghreb ne soient plus réglés en devises étrangères et mettre en place un système de compensation.

 

Pensez-vous que l’aide de 200 millions de dollars octroyée par le gouvernement algérien à la Tunisie est suffisante ? Pensez-vous que l’Algérie aurait pu donner davantage étant donné qu’elle a aidé le FMI avec 5 milliards de dollars ?

 

Nos relations avec l’Algérie sont excellentes. Le ministre algérien des Finances Mohamed Djellab, et moi-même avons d’excellentes relations. Nous avons une excellente coopération politique, économique et sécuritaire, et nous travaillons pour le maintien de ces bonnes relations. Nous saluons l’engagement de l’Algérie en faveur de la Tunisie. C’est un élément très important pour nous.

Interview réalisée à Tunis par Selma Kasmi 

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