Il ressort de l’analyse de Abdelmadjid Attar, qui était hier l’invité du direct de Radio M, que l’anomalie du marché a été la hausse du prix du baril et non pas sa baisse observée depuis 2014 : « Le véritable choc pétrolier au cours des deux dernières décennies a été l’augmentation dépassant toutes les prévisions au cours de 2009 et 2014. »
Entre 40 et 60 dollars le baril, le marché pétrolier mondial a atteint son « point d’équilibre », juge Abdelmadjid Attar, qui était hier mercredi l’invité de Radio M, la web radio de Maghreb Emergent. Désormais, le prix du baril de pétrole, explique-t-il, est corrélé principalement à l’entrée dans l’ère des énergies renouvelables et à l’avancée technologique dans le développement des énergies non-conventionnelles : « L’évolution du prix du pétrole est à présent indépendante de tout acteur ou accord entre Etats (tel que celui signé entre la Russie et l’Arabie saoudite sur le gel de leur production, NDLR). »
L’ancien PDG de Sonatrach estime qu’à court terme, la tendance baissière des cours du pétrole pourrait être entraînée par l’éventuelle augmentation de la production libyenne, mais surtout de celle de l’Irak : « Pour les six prochains mois et pour 2017, le risque ne vient pas de l’Arabie Saoudite. Le risque vient d’une éventuelle augmentation de production de la Lybie, le retour de l’Iran (qui est déjà sur le marché produisant des centaines de milliers de barils/jour supplémentaires, NDLR), mais surtout de l’Irak ! »
Pour Abdelmadjid Attar, ce dernier pays, « qui produit plus de 4 millions de barils de pétrole/jour, est encore loin de son quota d’avant ». En plus, explique-t-il, « l’Irak a des gisements qui ont une capacité de production extraordinaire » et sont « beaucoup plus faciles à exploiter ».
« Le prix du pétrole est à son point d’équilibre »
L’évolution du marché pétrolier doit être appréhendée en termes de tendances observées sur une longue durée, souligne l’invité du direct de Radio M : « Ce n’est pas le prix d’un jour ou d’une semaine qui est important, c’est plutôt la moyenne trimestrielle ou semestrielle. »
S’agissant des dernières évolutions des cours pétroliers, M. Attar juge qu’« on ne peut pas parler de ‘’redressement’’ car le marché est toujours le même depuis pratiquement la fin 2015 », soutenant plutôt « qu’à cette fourchette de prix, le baril a atteint sa capacité de résistance sur le marché mondial ». Cependant, indique-t-il, un facteur récent pourrait entraîner l’augmentation du prix du baril. Il s’agit du désinvestissement dans l’amont pétrolier : « Si ce désinvestissement s’accentue, on aura une demande plus importante que l’offre. Ce qui donnera une augmentation du prix du baril. »
Il ressort de l’analyse de Abdelmadjid Attar que l’anomalie du marché a été la hausse du prix du baril et non pas sa baisse observée depuis 2014 : « Finalement le véritable choc pétrolier au cours des deux dernières décennies a été l’augmentation dépassant toutes les prévisions au cours de 2009 et 2014. Maintenant, on est en train de revenir à un prix raisonnable les 40 et 60 dollars. »
Guerre économique entre énergie conventionnelle et non conventionnelle
Outre la baisse de la croissance des pays de l’OCDE, la chute des prix du baril a été entraînée par l’émergence des énergies non conventionnelles. Effectivement, a déclaré l’ex-patron de Sonatrach sur les ondes de Radio M, la chute des prix est survenu « au moment où les USA ont commencé à s’auto-suffire en matière de gaz, arrivant même à exporter, en plus d’une production assez importante de pétrole de schiste ».
L’avenir des énergies carbonées ne sera pas uniquement tributaire de leurs prix sur le marché mondial. « Il y a eu des progrès technologiques extraordinaires », rappelle cet expert en énergie. « Les producteurs (de schiste, NDLR) se sont organisés malgré leurs endettement. Ils ont commencé à forer pas cher, à produire pas cher, à faire des économies », souligne-t-il ajoutant qu’actuellement, à 40 dollars le baril de brut, 50% des hydrocarbures américains non conventionnels sont commercialisés et rentables pour leurs producteurs.
Abdelmadjid Attar estime qu’un prix du baril inférieur à 60 dollars est de nature à empêcher le pétrole et le gaz de schiste de submerger le marché mondial. C’est ce qui expliquerait la stratégie saoudienne de maintien d’un rythme de production élevé. Au-delà de 65 dollars le baril, au minimum « 70% de la production de schiste des USA reprendra », soutient-il. Selon lui, cette reprise de production n’engendrerait, toutefois, pas de bénéfices pour les producteurs mais elle leur permettrait de rembourser leurs dettes. « Aujourd’hui 40% des puits non conventionnels continuent à produire aux USA », rappelle-t-il encore.
Ecouter l’émission « L’invité du direct » :