Le CPP n’arrive plus à échapper à l’état de santé du président Abdelaziz Bouteflika. Les visiteurs étrangers non plus, d’ailleurs. Dans un pays qui vit au rythme des scandales, cela met en valeur les propositions de Nabni, qui appelle à se lancer vite dans la réforme.
Khaled Drareni a attaqué, d’emblée, le CPP de cette première semaine de Ramadhan : qu’est ce qui a motivé la visite de François Hollande à Alger? Les participants au Café Presse Politique de radio M ont toutefois botté en touche. Ils ont d’abord insisté sur le côté ubuesque de ces visites de chefs d’Etats étrangers. Visite de travail ? Non, visite de compassion, affirme Abed Charef, qui exprime sa gêne.
Le commentaire le plus attendu durant la visite de François Hollande se rapporte à l’état de santé du président Bouteflika. « C’est le moment clé de la visite. Est-ce qu’il est apte ou pas ? », se demande-t-on, alors qu’on « devrait parler du président de la république, de sa politique économique, des mesures qu’il prend pour faire face à la crise, de sa politique maghrébine et méditerranéenne. Il n’en est rien. Il y a deux grands foyers de tensions aux frontières algériennes, Mali et Libye. Ils ont été occultés », dit-il, ajoutant que « c’est humiliant d’entendre François Hollande dire que le président Bouteflika a une capacité rare de jugement ».
Mounir Boudjemaa relève que tous les visiteurs étrangers disent que le président Bouteflika va bien. Faut-il y voir « un délit de mensonge collectif? Est-ce possible qu’ils mentent tous ? Ce serait extraordinaire », dit-il. Mais l’attitude de François Hollande apparait forcément comme une réponse à ce que dit l’opposition sur la capacité du président Bouteflika à diriger le pays. Ce qui est « insupportable », c’est « cette impression qu’on était en 1827 », et qu’on attend que Hollande vienne décider de la succession en Algérie ».
Faiblesse
Saïd Djaafar estime que ces visiteurs étrangers « ne veulent pas créer un incident diplomatique ». Pour lui, « François Hollande a fait le job ». El-Kadi Ihsane souligne que « les Algériens n’ont plus les moyens de vérifier l’état de santé physique et mental du président ». Lors de cette visite, « l’évènement, c’est Hollande, c’est sa visite, sa conférence de presse. Il est en campagne, Bouteflika est hors champ », souligne-t-il. Il déplore aussi de ne pas avoir « entendu une phrase cohérente de Bouteflika depuis très longtemps ».
Le résultat politique est là. L’Algérie n’a jamais été aussi faible face à la France. Ce qui a permis à François Hollande d’annoncer que Peugeot va investir en Algérie, alors qu’on sait que Peugeot a choisi le Maroc pour produire 200.000 véhicules par an, destinés à l’export. D’ailleurs, Peugeot l’a rappelé dès le lendemain. Pour l’Algérie, Peugeot se contentera d’une sorte de Oued Tlelat bis, une « prime de consolation ». Mais son grand projet maghrébin, ce sera au Maroc.
Impossible d’arriver à ces résultats
Toujours concernant Peugeot, Abed Charef s’est demandé comment l’Algérie réussit à se faire avoir de manière répétée, avec le nouveau scandale des concessionnaires qui transfèrent massivement les devises. « Comment avaler cette pilule? », s’est-il demandé. Peugeot a déclaré une perte de 740 millions de dinars en 2013. D’autres concessionnaires ont fait état de résultats similaires, ce qui est impossible.
Comment l’administration algérienne réussit-elle à ne rien voir alors que ces pratiques, d’une « banalité affligeante », selon la formule de El-kadi Ihsance, durent depuis des années ? « C’est le gouvernement algérien qui a intronisé cette pratique », rappelle El-kadi Ihsane. Il a interdit aux entreprises qui vendent en l’état de rapatrier leurs dividendes, elles recourent à cette pratique ».
« Je ne peux pas admettre que le gouvernement ne savait pas », affirme Abed Charef. « Dans ces conditions, Hollande va remettre Peugeot en selle », estime Mounir Boudjemaa, ajoutant que les Américains, à leur tour, ont demandé que leurs entreprises puissent bénéficier des mêmes privilèges.
Une task force pour encercler Radio M ?
Le CPP a eu droit à un scoop. C’est Cevital, le groupe de Issaad Rebrab, qui a donné la mèche. Cevital a discrètement élaboré un rapport, après avoir constaté que des concessionnaires se déclaraient déficitaires alors qu’ils vendaient cinq fois plus de véhicules. Le ministre du commerce Amara Benyounès a ensuite pris le relais. Mais cela ne règle pas le problème de la gouvernance du pays. Car après l’affaire Khalifa, celles de l’autoroute, la CNAN, la DGSN, et Sonatrach, ce nouveau scandale montre qu’une profonde réforme des méthodes de gestion est vitale pour le pays. Ce qui donne toute leur valeur aux dernières propositions de Nabni, le groupe de réflexion qui invite le gouvernement à se lancer sans délai dans le changement.
El-Kadi Ihsane a rappelé que Nabni maintient son programme de réformes globales, mais il a choisi de mettre en avant douze mesures, à lancer dans l’immédiat, du moment que le pays ne dispose pas d’une administration capable de mener l’œuvre de changement. Pour pallier au déficit manageriel de l’Etat, Nabni prône de créer une « delivery unit », une structure rattachée à la Présidence de la république ou au Premier ministère. Avant, cette structure s’appelait « task force », a rappelé Abed Charef. Et la seule task force que montait Gaïd Salah, c’est une task force qui va encercler le siège de Radio M, qui avait abrité, mardi, la conférence de presse de Nabni.
Extraits vidéo : http://bit.ly/1HXj5di
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