Après des décennies de silence, le projet ambitieux de tunnel reliant le Maroc et l’Espagne sous le détroit de Gibraltar revient à l’avant-scène en 2024. Cette infrastructure sous-marine, longue de 42 kilomètres, dont 27,7 km immergés, vise à relier Punta Paloma en Espagne à Punta Malabata au Maroc.
Selon des observateurs, le tunnel, composé de trois tubes (deux dédiés au transport ferroviaire et un à la sécurité et aux services), s’inscrit dans une perspective stratégique et symbolique, offrant un lien direct entre l’Europe et l’Afrique.
La relance du projet coïncide avec la désignation conjointe de l’Espagne, du Maroc et du Portugal pour l’organisation de la Coupe du Monde de la FIFA en 2030. Ce contexte a motivé les gouvernements marocain et espagnol, qui ont renouvelé leur engagement en accélérant les études de faisabilité. Celles-ci explorent les aspects techniques et financiers nécessaires à la réalisation de cette liaison.
Études techniques et défis sismiques
Pour garantir la sécurité de l’ouvrage dans une zone géologiquement complexe, l’Espagne a pris l’initiative de lancer des études sismotectoniques. Ce projet inclut le déploiement de quatre sismomètres marins, capables de fonctionner entre 6 mois et 2 ans à des profondeurs allant jusqu’à 6 000 mètres. Fournis par l’entreprise madrilène TEKPAM Ingenieria, ces instruments sophistiqués représentent une étape clé pour analyser les risques de tremblements de terre dans le détroit de Gibraltar. Le projet est supervisé par la Société Espagnole d’Études pour la Communication Fixe à travers le Détroit de Gibraltar (SECEGSA).
L’appel d’offres espagnol pour les sismomètres, d’une valeur de 488 000 euros, marque un tournant décisif. Cet investissement reflète l’engagement des deux pays à surmonter les défis considérables que présente ce projet, estimé aujourd’hui à près de 30 milliards d’euros, soit le double des prévisions initiales faites il y a 30 ans. Les failles sismiques actives, la profondeur extrême du détroit et les conditions géologiques complexes représentent des obstacles majeurs.
Ces études font suite à des travaux précédents, comme ceux menés en 2014 par la professeure Elisa Buforn de l’Université Complutense de Madrid. Elle avait alors identifié des risques de séismes d’intensité supérieure à 4, à une profondeur de 40 kilomètres. Ses recommandations ont encouragé une exploration approfondie de ces phénomènes sismiques.