Le grand dilemme qui a traversé l’opposition algérienne de Zeralda au sujet de l’élection législative de main 2017 a traversé le Café presse politique (CPP) de cette semaine. Y aller ou pas? Et pourquoi?
Il faut une bonne dose d’ingéniosité pour trouver un intérêt stratégique plus grand à la législative prochaine comparée à celle du printemps 2012 en pleine ébullition encore du printemps arabe. Le Café presse politique a donc presque donné raison aux participants de l’opposition de Zeralda, (FFS, RCD, MSP,) autant qu’aux boycotteurs (Talaie Al Houria, Jil Al Jadid).
Dilemme qualifié par Abed Charef de « grande douleur » pour les partis qui ont un projet politique et qui ont décidé d’y aller. En sachant que « cette élection ne sert à rien ». Pourquoi ? Parce que le mécanisme de la fraude est toujours en place. La haute instance indépendante chargée de la surveillance des élections, revendiquée par l’opposition, a été dévoyée au profit de l’administration.
Le fichier électoral artificiellement gonflé reste interdit d’accès y compris à cette haute instance de surveillance. Ce qui a fait dire à Djaafer Khelloufi (nouveau membre du CPP) de son président Abdelawaheb Derbal, « il a démarré et il a tout de suite calé ».
Tarik Hafidh a montré que le mécanisme habituel des « grands électeurs », c’est à dire les 48 walis, va pouvoir à nouveau redimensionner les résultats qui remontent des bureaux de vote dont tout le monde s’accorde à dire, Abed Charef en témoigne, qu’ils ne sont pas l’objet de contestation au moment du dépouillement.
La mécanique de la fraude intervient plus tard sur le chemin institutionnel qui conduit à la wilaya puis au ministère de l’intérieur. Le FFS et le RCD ont déjà diffusé les éléments de langage de la dénonciation des futurs résultats. Ce qui fait dire au CPP que la non-participation n’est tout de même « pas un suicide politique ».
Une occasion manquée avec la révision de la constitution
Pour El Kadi Ihsane, le président Bouteflika a raté une occasion de redonner de l’importance aux élections législatives au moment de la révision de la constitution il y a une année. Il n’a pas rendu du pouvoir au parlement et a renoncé à l’article qui oblige, comme au Maroc, de choisir le premier ministre au sein du parti qui gagne les élections ».
Le scénario est donc bien en place pour une nouvelle désaffection populaire à l’élection législative du 04 mai prochain, « 35% de participation seulement en 2012 ». Il restera alors les enjeux secondaires de la distribution des sièges sur un faible vote exprimé.
Tarik Hafid rappelant d’ailleurs que même des partis de l’opposition pouvaient dans certains cas en bénéficier « en récompense de leur participation », il a cité en cela le témoignage de l’ancien premier secrétaire du FFS, Karim Tabou (ce que le FFS a démenti).
Pour Djaafer Khelloufi la principale nouveauté en 2017 est la recomposition d’un pôle islamiste : « du bon travail de Derbal » président de la Haute Instance de surveillance, qui a fortement conseillé les différentes fractions du courant islamistes des frères musulmans en Algérie de se présenter en rang uni.
« Cela va permettre aux islamistes de faire un score meilleur qu’en 2012 » pour Abed Charef, sans que cela ne le perturbe outre mesure. « Le fait est que pour ce courant nous sommes en fin de cycle. L’illusion islamiste est dernière nous en Algérie. Ce en quoi nous sommes, pour une fois, en avance sur le Maroc ou elle joue encore ».
Comment importer le rejet Fillon en Algérie ?
Est-ce que l’opinion publique française a atteint le seuil de tolérance au-delà duquel la candidature de François Fillon ne peut plus passer ? Djaafer Khelloufi demande à voir lorsque El Kadi Ihsane, souligne lui, que les opinions des pays qui ont été laminées par la crise et les politiques d’austérité «ne veulent plus rien laisser passer dans l’exemplarité de ceux qui vont les diriger ». D’où le soldat Fillon est devenu un cas désespéré.
Le CPP a donc épilogué, en sa deuxième partie sur les nouveaux comportements électoraux dans les pays démocratiques avancés qui pourraient indiquer l’avenir pour des pays comme l’Algérie. Abed Charef relève surtout que dans ces pays-là « on vote aujourd’hui par défaut pour empêcher une personne ou un programme de passer » et non plus par adhésion.
« La France reste une belle démocratie » pour Tarik Hafidh qui salue le rôle de la presse et de la justice qui s’est autosaisie dans le cas de Fillon. Abed Charef qualifie de légal en Algérie la pratique de donner des terrains à ses enfants quand on est ministre « mais pas morale » et insiste sur ce qui sur, le plan sociétal, est devenu secondaire dans les pays avancés.
El Kadi Ihsane estime qu’il n’y a pas, dans les opinions de ces pays-là, d’équivalence entre les casseroles type Trump (sexisme, machisme, racisme ect …) et la relation à l’argent public comme dans le cas Fillon. Il considère, pour des pays comme l’Algérie, comme « une excellente nouvelle » que sa candidature « se casse la gueule » car il faut que l’impunité cesse. Mais pourquoi dans les cas de Khellil, Bouchouareb et Sellal et d’autres l’impunité perdure ? C’est sur l’audio et la vidéo de l’émission.