Entre la préservation de la subvention des hydrocarbures comme « acquis de la révolution algérienne » et la « rationalisation des dépenses énergétiques », le projet de loi comportant augmentation des taxes du gasoil et de l’essence en débat depuis dimanche 22 novembre à l’APN divise les parlementaires.
L’augmentation des taxes sur les hydrocarbures constitue le sujet le plus controversé à l’Assemblée Populaire Nationale et ce, même au niveau d’une même formation politique. Les différentes interventions des 193 députés laissent entendre que le suspens sur son adoption ou non sera maintenu jusqu’au dernier jour. C’est-à-dire jusqu’à lundi 30 novembre. A l’instar du FLN, le premier parti du parlement avec 207 sièges des 462 de l’hémicycle, la question ne fait pas l’unanimité au sein des partis. «La plupart de mes collègues du FLN sont contre. Nous estimons qu’il y a d’autres solutions alternatives à ces mesures d’austérité imposées au citoyen. Programmer plus d’investissement dans le secteur agricole et touristique par exemple », estime une députée du FLN qui a requis l’anonymat. Son collègue M Boudjemline Mustapha voit de son coté que cette augmentation des taxes sur les hydrocarbures n’aura pas d’impact direct sur le citoyen, et vise à rationaliser les dépenses et l’utilisation des hydrocarbures, notamment de l’essence et le gasoil, qui connaissent un grand gaspillage. « Les prix appliqués actuellement sur le marché algérien sont très en deçà de leur valeur réelle. Nous produisons du pétrole brut et nous le raffinons à 3 milliards d’euros pour le subventionner. N’est ce pas un gâchis dans la gestion ? », s’est-il interrogé. Il ajoute : « ces prix subventionnés favorisent les trafics de ces produits au niveau de nos frontières ».
Ce n’est pas au peuple de payer la mauvaise gestion du gouvernement
Le député Smail Kouadria, du Parti des Travailleurs et ancien responsable syndical du complexe sidérurgique d’El Hadjar, y voit une perte dangereuse des acquis sociaux de la révolution algérienne. « Durant toutes les années fastes, on n’a pas pensé à injecter les milliards dans des plans de développement. Aujourd’hui, en ces temps de crise, on attaque les poches du citoyen en faisant que le pauvre devienne plus pauvre et les nouveaux riches s’enrichissent davantage »explique t-il à Maghrebemergent, rejetant en bloc ces nouvelle mesures fiscales. Le maintient du caractère social de l’Algérie est aussi le motif principal de l’opposition du Front des Forces Socialistes FFS à ces meures « d’austérité ». Le président du groupe parlementaire du FFS Chafae Bouaich, estime que « ce n’est pas au peuple de payer la mauvaise gestion du gouvernement pendant des années, car la crise que nous traversons n’est pas le résultat de la baisse des prix du pétrole depuis juin 2014, mais plutôt de la mauvaise réaction du gouvernement face à la corruption. L’Etat a préféré acheter la paix sociale, plutôt que de lancer des projets de développement », estime t-il.
Les augmentations des taxes sur les énergies prévues sont « dérisoires »
Mme Larfi Kessal du Groupe RND, plaide quant à elle pour l’adoption de ce qu’elle qualifie de « mesures de compensation », qui ne prévoient qu’une augmentation « dérisoire » des prix de l’essence et du gasoil. « Nous sommes le seul pays au monde qui subventionne les produits dérivés des hydrocarbures. La récupération de cet argent perdu dans les subventions pourrait être utilisée dans la mise en place des zones industrielles et dans la
création de petites et moyennes entreprises. Cela pourrait booster l’économie nationale », explique t-elle, par ailleurs membre permanente de la Commission des Finances et du Budget de l’APN. Elle rappelle que la réduction d’un dinar prévue sur le gasoil a été proposée pour soutenir les agriculteurs, ce qui ‘’permettra en quelques années de réduire les importations et promouvoir les exportations agricoles.’’Les trois partis islamistes regroupés au sein de l’Alliance Verte, voteront tous contre ces amendements de la Loi des Finances 2016, nous a confirmés Mme Hamdi Fatma, Députée MSP de l’Alliance Verte. « Il est défendu chez nous d’introduire des réformes qui touchent le pouvoir d’achat du citoyen. La majorité écrasante des parlementaires s’opposent à cette loi, aussi bien ceux de l’alliance que ceux de l’opposition, mais beaucoup doivent suivre les instructions de leur parti », a-t-elle indiqué.