A titre d’exemple, un conseil qui a facturé son client pour un montant hors taxes de 100 au 31 décembre 2016 et qui a fait figurer sur sa facture 17% de TVA – soit un montant TTC de 117 – encaisse 117 à partir du 1er avril 2017 mais doit au Trésor une TVA calculée sur la base d’un taux de 19% !
C’est un principe sacré de la loi qui va être piétiné à partir du 1er avril prochain. Le contribuable est responsable de la TVA qu’il a collectée. Une entreprise algérienne qui a facturé des prestations avant le 1er janvier 2017 et qui encaisse ses factures à partir du 1er avril 2017 doit reverser au Trésor algérien 19% ou 9% du montant hors taxes qu’elle a collecté auprès de son client, selon l’administration fiscale algérienne.
A titre d’exemple, un conseil qui a facturé son client pour un montant hors taxes de 100 au 31 décembre 2016 et qui a fait figurer sur sa facture 17% de TVA, soit un montant TTC de 117, encaisse 117 à partir du 1er avril 2017 mais doit au Trésor une TVA calculée sur la base d’un taux de 19%.
En conséquence, le produit net HT du conseil est réduit de 2 points, sauf pour lui à obtenir de la part de son client une augmentation de sa facture de 2 points, augmentation très peu probable dans la mesure où son client est un consommateur final et où la TVA sur achat représente une sortie de trésorerie qu’il s’empressera de contester et il se contentera de régler un montant de 117 dès lors qu’il n’a aucune obligation de régler un montant supérieur à celui qui lui a été facturé.
Le prestataire va être amputé d’un écart TVA encaissée TVA restituée
Ainsi l’administration fiscale semble en avoir décidé, en considérant que tout montant encaissé par un redevable de la TVA sur des prestations de services à compter du 1er avril 2017 sera soumis à la TVA au taux de 19% ou de 9% suivant la nature de la prestation.
Le malheureux prestataire de services qui comptait encaisser un revenu net de 100, verra sa recette amputée d’une TVA qui sera calculée soit sur une base TTC de:
– 117 soit une TVA collectée de 18,69 et une recette hors taxes de 98,31 dès lors que la prestation est taxable à 19%
– 107 soit une TVA collectée de 8,83 et une recette hors taxes de 98,17 dès lors que la prestation est taxable à 9%.
Le contribuable voit sa recette nette réduite de 100 à 98,31 dans le cas d’une TVA à 19% et de 100 à 98,17 dans le cas d’une TVA à 9%.
Dans la mesure où on demande au contribuable de restituer une TVA supérieure à celle qu’il a facturée et encaissée du client, il réalise une perte de 1,69% sur son chiffre d’affaires pour une transaction soumise au taux de 19% et de 1,83% pour une transaction soumise au taux de 9%.
Dans les deux cas l’administration fiscale demande au contribuable de reverser plus de TVA qu’il en a collecté.
Deux principes fondamentaux négligés
Dans une note circulaire en date du 12 janvier 2017 référencée 16 MF/DGI/DCRF/SD1 2017, l’administration a consacré le mécanisme décrit ci-dessus en négligeant deux principes fondamentaux de la TVA.
Un contribuable est responsable de la TVA qui figure sur ses factures conformément à l’article 64 du Code des taxes sur le chiffre d’affaires.
Dans l’hypothèse envisagée ci-dessus, c’est bien de la TVA facturée au 31 décembre 2016 que le contribuable algérien est responsable.
Le contribuable algérien ne peut restituer au Trésor public que la TVA collectée qui, dans notre hypothèse, est de 17% ou de 7% et non pas de 19% ou de 9%.
Ainsi donc l’administration fiscale, confondant sa doctrine imparfaite et maladroite et les impératifs de la loi, néglige deux principes fondamentaux en ce qu’elle demande au contribuable algérien de lui resituer plus qu’il en a facturé et collecté auprès de son client.
Par une telle interprétation, elle convertit un impôt qui ne devrait pas constituer une charge pour l’entreprise en une charge sur le produit brut du malheureux conseil.
Une charge supplémentaire de 1,69% et de 1,89% sur le produit
Ainsi pour le résultat de 2016 constaté à la clôture de l’exercice, le contribuable algérien va devoir, dans le cadre des ses encaissements à compter du 1er avril 2017, constater une charge supplémentaire égale à 1,69% de son produit TTC au taux de 19% et de 1,83% de son produit TTC au taux de 9% dont la déduction pour les besoins d’IBS n’est pas confirmée.
Une telle analyse est inacceptable dans la mesure où la TVA ne peut, en aucun cas, être l’équivalent de la TAP, cet impôt qui constitue une charge d’exploitation grevant les comptes de résultat des entreprises dans des conditions exorbitantes. La TVA est un impôt de consommation qui doit être supporté par le consommateur et non pas par le producteur.
Des remèdes techniques à cette situation ont été suggérés à l’administration fiscale dans le strict respect de la loi. Il a été notamment suggéré que l’administration, pour les facturations intervenues avant le 1er janvier 2017 et dont le règlement serait réalisé au cours de l’exercice 2017, fasse l’objet d’une TVA au taux de 9% ou de 19% sur une base imposable tenant compte de l’encaissement effectif du montant facturé par le prestataire.
Ainsi pour reprendre l’exemple précité, notre conseil sur une facturation de 117 encaisserait 17 de TVA collectée qu’il remettrait au Trésor. Cette TVA serait réputée collectée à un taux de 19% sur une base taxable faisant l’objet d’une réfaction égale à 10,53 sur le montant hors taxes facturé. Cette réfaction sur la base taxable serait de 22,23 pour un taux de 9%. Elle serait purement extra-comptable et aurait pour objet de permettre de respecter les dispositions de la loi au regard du fait générateur de l’impôt.
La solution tombe sous le sens
Une solution technique simple permettant de respecter tous les principes de la TVA – et notamment celui qui veut que seule la TVA facturée et/ou collectée est due par le contribuable – n’a pas été adoptée par l’administration fiscale. Pourtant, elle tombe sous le sens et est dans l’intérêt du consommateur, de l’entreprise et du trésor algérien.
Compte tenu de la flagrante irrégularité du système préconisé par l’administration fiscale, celle-ci est obligée de traiter par dérogation les dossiers des contribuables au cas par cas.
On peut donc une fois de plus constater que l’entreprise de services algérienne est particulièrement maltraitée dans la mesure où à l’échéance du 1er avril 2017 ses encaissements sur prestations de services vont lui coûter près de 2 points de marge sur ses recettes brutes.
Une telle mesure contribue à alourdir la fiscalité brute des entreprises. Elle est particulièrement pénalisante dans les circonstances économiques actuelles.
Revenir au bon sens
Il serait souhaitable que l’administration fiscale ne dénature pas un impôt, la TVA, dont l’objet principal est d’imposer la consommation et non pas la production de services. Après les nombreux errements sur le remboursement de précompte de TVA, la TAP, les recettes brutes de l’opérateur économique algérien se trouvent encore une fois affectées.
La mise en place d’un système de réfaction extra-comptable sur les bases taxables permettrait d’éviter cette difficulté tout en respectant l’application du fait générateur de la TVA, à savoir l’encaissement au taux en vigueur à la date de l’encaissement.
Une telle mesure permettrait de résoudre de façon permanente la taxation des prestations encaissées postérieurement au 31 décembre 2016 alors qu’elles ont été facturées avant le 1er janvier 2017.
L’appel au bon sens s’impose au moment où les entreprises algériennes et notamment les entreprises de services ont besoin de préserver leurs marges dans un environnement particulièrement compétitif.