Le PDG de Humilis Finance, qui était hier « L’invité du Direct » de Radio M, recommande, comme beaucoup d’acteurs de la Bourse d’Alger, de « libérer complètement l’évolution des cours. Il faut juste laisser le marché fonctionner et arrêter avec les règles paralysantes », affirme-t-il.
Lyès Kerrar pointe la responsabilité d’un système de cotation qui continue de « geler la valeur des actions et débouche sur des valorisations irréalistes des titres de la place ». « C’est l’épargnant qui est la principale victime car il ne peut pas vendre au prix qu’il veut ni acheter au prix qu’il veut », rappelle cet expert financier.
Très concrètement, le patron d’Humilis Finance mentionne, à titre d’exemples, les dernières séances de la Bourse d’Alger, « au cours desquelles des ordres d’achat ont été passés pour le titre Hôtel Aurassi pour une valeur de 1.000 DA alors que les transactions se sont effectuées à 470 dinars ».Ce qui est vrai pour le titre Hôtel Aurassi l’est également pour les autres titres cotés, comme Saidal, Biopharm, Alliance Assurance et NCA, soutient-il.
La nouvelle fourchette de variation des titres remise en cause
Le système de négociation en vigueur, très décrié par les opérateurs et qui rejette les offres supérieures à 5% à la hausse ou à la baisse du cours de référence, était censé avoir été remplacé depuis la mi- avril par une fourchette élargie à 20%. Une nouvelle plage de variation de la valeur des titres dont le fonctionnement « a été arrêté en pleine séance et refermé immédiatement », indique Lyès Kerrar.
Pour le PDG d’Humilis Finance, le dispositif d’encadrement actuel, qui est destiné selon les responsables de la Bourse d’Alger à protéger la place naissante des risques associés à une trop grande volatilité des titres, « n’existe nulle part ailleurs sous cette forme et empêche la valorisation des titres ». Plombée par le fonctionnement du système de cotation, la valeur des titres ne reflète, en outre, nullement les performance économiques des entreprises cotées, « qui sont toutes en excellente forme et annoncent toutes des résultats financiers souvent supérieurs aux attentes, alors que la valeur de leur titre en Bourse reste pratiquement gelée et s’éloigne de plus en plus de la valeur réelle des sociétés ».
Le programme d’introduction de nouvelles sociétés en Bourse dans l’impasse
Les conséquences de ce « système de négociation archaïque » ne s’arrêtent pas là. Le gel de la valeur des titres des sociétés cotées sur une longue période, qui peut dépasser une dizaine d’années pour certaines d’entre elles, est « un puissant signal adressé aux investisseurs et aux épargnants pour les éloigner de la Bourse d’Alger ». Il ne faut sans doute pas chercher beaucoup plus loin que dans cette situation la raison de l’échec retentissant de la dernière tentative d’introduction en Bourse de la cimenterie de Aïn Kebira, « alors même que cette cimenterie est une entreprise très rentable et très saine ».
Plus généralement, c’est l’ensemble du programme d’introduction de nouvelles entreprises qui se trouve actuellement dans une véritable impasse. La mise en œuvé de ce programmé était prévue initialement au cours des prochains mois et des prochaines années, grâce notamment à l’ouverture, annoncée depuis maintenant plus de 3 ans, du capital de 8 entreprises publiques, mais également à l’arrivée de nouvelles entreprises privées.
Le marché obligataire au point mort
Le département obligations de la Bourse d’Alger, qui a perdu en janvier 2016 son dernier titre coté, ne se porte pas beaucoup mieux. Il a vu son attractivité minée par la généralisation, depuis 2010, des bonifications des taux d’intérêt bancaires. Il pourrait, selon Lyès Kerrar, retrouver des couleurs au cours des prochaines années grâce à l’émission de nouvelles obligations, « à condition que les taux d’intérêt bancaires suivent ».
Selon le PDG d’Humilis Finance cet expert financier, ces derniers sont actuellement « anormalement bas, en particulier si on considère les rémunération servies au dernier emprunt obligataire d’Etat dont la plus grande partie a été souscrite par les banques publiques ». Il estime que la relance du marché obligataire, ainsi que son fonctionnement régulier, est, en outre, tributaire de la mise en œuvre d’un vaste chantier sur l’information financière et le rating des sociétés.