Le torchon brûle entre le gouvernement et les syndicats au Maroc. L’absence de dialogue social et la volonté du gouvernement de maintenir le cap des réformes des régimes de retraite et fiscaux, ont poussé trois des principaux syndicats à annoncer une grève générale le 29 octobre prochain, date symbole de la disparition de Mehdi Ben Barka.
Les syndicats représentant la gauche et l’extrême gauche marocaine (FDT, UMT et CDT) ont annoncé, jeudi, une grève générale à travers le pays pour le 29 octobre prochain. Le choix de cette date n’est pas fortuit, puisqu’elle coïncide avec le jour de l’enlèvement à Paris, en 1965, du leader de la gauche marocaine, Mehdi Ben Barka. Pour les trois syndicats marocains, rejoints par l’UGTM, il s’agit de montrer au gouvernement dirigé par le PJD (parti justice et du développement – islamiste) qu’il y a une limite à sa politique de refus du dialogue social. Et, surtout, répondre concrètement aux revendications des syndicalistes : reprise du dialogue social, gel des réformes des caisses de retraite et de la compensation, maintien de la politique de subvention des prix des produits de première nécessité.
Le dialogue social est en panne depuis avril 2011. Les trois syndicats veulent donc reprendre ‘’langue’’ avec le gouvernement dirigé par Abdelilah Benkirane et organiser un sommet social autour de ces grandes questions socio-professionnelles. Ces revendications, portées par l’Union Marocaine du Travail (UMT), la fédération Marocaine du Travail (FDT) et la Confédération Démocratique du Travail (CDT), portent principalement sur la nécessité de mettre en œuvre tous les engagements pris par l’exécutif, notamment ceux restés en suspens, lors de l’accord du 26 avril 2011, dont l’augmentation des salaires et des pensions, le respect des libertés collectives et individuelles, particulièrement la liberté syndicale et le droit de grève. La décision du gouvernement de réformer la caisse de compensation de soutien des prix des produits de première nécessité, qui va permettre à l’exécutif d’économiser 20 milliards de Dh par an, a également été dénoncée par les syndicats.
Le gouvernement sous pression, les syndicats en bloc
En face, le gouvernement Benkirane, qui ferraille dur actuellement pour terminer le projet de loi de finances 2015, avec comme ligne de fond la relance de la croissance et la réduction du déficit budgétaire, doit trouver des réponses sociales urgentes avant le 29 octobre. Il doit aussi convaincre les syndicats du bien fondé de sa politique sociale. D’autant que la FDT, l’UMT et la CDT sont très bien implantées dans l’enseignement, les collectivités locales, la justice et la santé. Le porte-parole du gouvernement marocain Mustapha El Orfi a répondu la semaine dernière aux préoccupations des syndicats, assurant que (le gouvernement) est « engagé dans la mise en œuvre de ses engagements pris dans le cadre du dialogue social ». Mieux, selon lui, « le dialogue social, n’est pas gelé ». Selon lui, le gouvernement a consacré 24,8 milliards de dirhams entre 2012 et 2014 à la mise en œuvre de l’accord du 26 avril 2011 et a signé plusieurs accords sectoriels. En mai dernier, et pour calmer le front social, le gouvernement Benkirane avait annoncé une hausse de 10%, en deux tranches, du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et du salaire minimum agricole garanti (SMAG), soit 5% à partir du 1er juillet 2014 et 5% en juillet 2015. Selon des syndicalistes, deux autres centrales marocaines, l’UGTM, proche de l’Istiqlal, et l’UNMT, pourraient rejoindre le mouvement de protestation du 29 octobre prochain. Et, probablement, des ONG et la société civile, seraient aussi de la partie à l’occasion de la commémoration de la disparition de Mehdi Benb Barka.