La question est sur toutes les lèvres: les marocains iront-ils voter en masse pour les secondes élections législatives »post printemps arabe », ou bouderont-ils les urnes comme cela a été constaté en 2011 ?
A Rabat et dans sa proche banlieue Salé ou dans les grandes villes du Maroc, l’ambiance ne reflète pas tellement l’événement politique que les marocains vont animer vendredi 7 octobre: rares sont les panneaux d’affichage, pas de listes des candidats, journaux presque muets sur l’événement, si ce n’est quelques articles des organes officiels de partis en lice. En ville, dans la médina de Rabat comme dans le quartier huppé d’Agdal, rien, aucune »odeur » de ces législatives n’est perceptible, alors que les commentaires sont rares. Bref, hormis les états-majors des partis et des candidats, rien n’indique que quelques 15,7 millions de marocains doivent ce vendredi aller voter pour un nouveau parlement, et désigner le gouvernement qui va »diriger » le pays pour les cinq prochaines années. Pourtant, les appels au vote ne sont pas rares. Dans l’éditorial de son dernier numéro, l’hebdomadaire Telquel, qui ouvre en Une »Comment Hassan II truquait les élections », affirme qu »’il est vrai que beaucoup d’orientations stratégiques que prendra le pays ne dépendront pas du gouvernement élu, mais ce sont nos votes qui façonneront le Parlement. » Il ajoute: »parce qu’il ne suffit pas de commenter, dénoncer ets e livrer à l’exercice salutaire de la critique (….) allons aux urnes donner la chance à ce Maroc ». Tous les autres partis, à commencer par celui qui a dirigé le gouvernement sortant, le parti de la Justice et du Développement (PJD), ainsi que son rival, la Parti Authenticité et Modernité, qu’on considère ici au Maroc comme un parti créé par le Palais royal, ont appelé les électeurs à participer à cette consultation lors de leurs meetings électoraux. Au sein de la société civile, on estime également que les marocains doivent aller voter et ne pas céder au fatalisme. »Il faut aller voter », estime dans une déclaration à Maghrebemergent Hichem Rachidi, membre du Conseil d’administration du Groupe d’Action de défense des étrangers et des migrants (GADEM). »Il faut aller voter, même avec un bulletin blanc. L’essentiel est de participer au vote et ne pas laisser d’autres décider à notre place », ajoute t-il.
La hantise de l’abstention
Par contre, chez les militants de l’extrême gauche marocaine, on appelle tout simplement au boycott de ces élections. Mustapha Brahma, SG d’Ennahdj Eddimocrati, estime que ces élections sont »une mascarade ». »De toute manière, quel que soit le parti qui remporte les élections, il appliquera le programme de l’Etat. Le pouvoir marocain n’est pas prêt pour une vraie alternance. » 27 partis et des »sans appartenance politique » participent, vendredi 7 octobre, aux secondes élections législatives au Maroc , dont le Front des Forces démocratiques, une coalition de plusieurs partis de l’extrême gauche marocaine, dont le Parti socialiste unifié (PSU). L’appréhension d’un faible taux de participation à ces élections dont sont favoris les islamistes du PJD est réelle. Déjà, lors des législatives de 2011, le taux de participation était tout juste, officiellement, de 45,4% sur les 13,6 millions d’électeurs inscrits. Aux élections régionales et locales organisées en septembre 2015, le taux de participation était de 53%, mieux que les dernières élections législatives de 2011. »Les marocains ont la tête ailleurs. La vie est difficile, trop de taxes, pas de perspectives pour les diplômés, inflation, hausse du chômage et baisse du niveau de vie meublent le quotidien des Marocains », explique Khalid, un habitué du marché aux puces de Bab El had, dans la médina de Rabat. Le taux de participation sera la grande inconnue de ces élections, qui se dirigent vers une recomposition du paysage politique du Maroc, avec l’emergence du PAM et le retrait discret des partis de la gauche marocaine, en particulier l’USFP.