Après RSF, l’organisation Human Rights Watch dénonce la condamnation du journaliste marocain Hamid Mahdaoui, qui n’a fait, selon elle, qu’exprimer son opinion sur le Hirak, le mouvement de contestation au Rif. Le pire est à venir pour le journaliste qui est sous le coup d’autres « affaires ».
Le 25 juillet 2017, un tribunal marocain a condamné Hamid Mahdaoui un journaliste renommé à trois mois de prison, en vertu d’un chef d’inculpation « qui viole son droit à la liberté d’expression pacifique », estime Human Rights Watch dans un communiqué rendu public aujourd’hui.
Le journaliste qui est détenu à Casablanca fait l’objet d’une autre enquête qui pourrait alourdir sa peine. Son site, badil.info, a écopé d’une amende de 20 000 dirhams (2 000 dollars) pour avoir contribué à organiser et « incité le public à participer à une manifestation non autorisée. »
Une accusation qui se fonde sur les opinions exprimées par Mahdaoui, le 19 juillet dernier à Al Hoceima. Le journaliste avait dit son soutien au mouvement protestataire Hirak, dans le Rif et avait dénoncé l’interdiction d’une manifestation prévue le 20 juillet.
Pour Sarah Leah Whitson, directrice exécutive de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch, « Exprimer son désaccord avec une décision de l’Etat et apporter son soutien à un mouvement protestataire ne devraient conduire personne en prison. «Au lieu d’interdire des manifestations et d’emprisonner des journalistes, le Maroc devrait faire respecter sa propre constitution, qui garantit les libertés d’expression et de réunion. » a-t-elle ajouté.
Très suivi pour ses vidéos postées sur les réseaux sociaux, Hamid Mahdaoui fait preuve d’un engagement politique et social peu apprécié par les autorités.Il a déjà été condamné pour diffusion de « fausses informations » dans des affaires impliquant celui qui était alors ministre de la Justice, un gouverneur et le chef de la police nationale.
Dans les deux premières affaires, le tribunal avait condamné Mahdaoui à des peines d’emprisonnement avec sursis, des verdicts qui doivent toujours être examinés en appel. La troisième affaire a pris fin avec l’abandon des charges par le plaignant.
L’avocat du journaliste Lahbib Hajji, à a expliqué que les propos tenus le 19 juillet à Hoceima ont été fait dans des discussions avec des citoyens qui ont demandé à « prendre des selfies avec eux » et lui ont demandé de «s’exprimer sur le mouvement Hirak » Human Rights Watch. Filmée par un policier, une vidéo de ce rassemblement spontané a été utilisée comme élément de preuve dans le procès de Mahdaoui. » note Human Rights Watch.
L’ONG dit avoir visionné la vidéo et a pris connaissance de la transcription, « n’a rien trouvé dans l’une ou l’autre qui relève d’une incitation directe de Mahdaoui à participer à la manifestation interdite du 20 juillet. ». «Un journaliste jouit du même droit que n’importe quel autre citoyen marocain de critiquer l’interdiction d’une manifestation sans avoir à être jeté en prison pour incitation », a estimé Sarah Leah Whitson.
Écoutes téléphoniques
Une deuxième affaire s’appuie sur des écoutes téléphoniques où, selon les autorités, Mahdaoui aurait discuté avec un certain « Noureddine », un opposant établi aux Pays-Bas qui aurait indiquer qu’il avait « lui et d’autres personnes avaient l’intention de faire entrer illégalement au Maroc des armes et d’« acheter des tanks » pour provoquer des attaques armées en appui au mouvement Hirak.
Même si la transcription montre que « Mahdaoui insiste à plusieurs reprises auprès de Noureddine pour que celui-ci renonce à ce projet, soulignant que les manifestations de Hirak sont pacifiques et doivent le rester », le procureur a demandé au juge d’instruction d’incarcérer Mahdaoui et de déterminer « s’il n’avait pas failli à son obligation de porter à la connaissance des autorités une tentative de nuire à la sécurité intérieure de l’État ».Une infraction pouvant être punie de cinq ans de prison en vertu de l’article 209 du code pénal.
Le 25 juillet dernier Reporters Sans frontières a souligné que « Hamid El Mahdaoui n’a pas sa place en prison ».Yasmine Kacha, directrice du bureau Afrique du Nord de RSF a souligné le caractère «injuste » et « expéditif » de la condamnation.
“Nous demandons la libération immédiate d’Hamid El Mahdaoui,. Ce journaliste reconnu n’a fait que son métier : informer. Pourquoi est-il alors poursuivi sur la base du Code pénal ? Par cette condamnation injuste et expéditive, les autorités marocaines cherchent-elles à punir un média qui révèle depuis plusieurs années des affaires embarrassantes pour le Royaume?”