Le ramadhan aurait pu être vécu comme une trêve, un pied de nez au productivisme. Mais des voix s’élèvent de plus en plus pour dénoncer les comportements outranciers et prôner une réorganisation de certains secteurs de l’économie afin de limiter les pertes économiques. Parmi elles, celle de Driss Khoudry.
Cette année ne fait pas exception en matière de morosité économique ramadhanesque. La productivité baisse comme à l’accoutumée tandis que la demande et la consommation des ménages augmentent. Ces tendances conjuguées créent une tension inflationniste. Cet été, on enregistre une augmentation du prix du poisson de l’ordre de 150% dans certaines villes. Driss Khoudry, docteur en finances publiques reconverti en coach en gestion de budget, a invité les ménages à « rester dans l’éthique », au micro de la radio marocaine Altantic. « Le budget des ménages se multiple par trois et notre poubelle augmente de 24% ». « C’est un mois spirituel » a-t-il précisé, qui ne doit pas rimer avec « gabegie », ou « outrance ». Constatant qu’habituellement il y a trois repas, il interroge : « pourquoi augmenter un budget inutilement ? ».
Il faut amener les gens vers une correction budgétaire
A propos de ces risques de gaspillages, il déclare que la « sensibilisation se fait à travers les médias et la société civile, qu’il faut amener les gens vers une correction budgétaire et une rationalisation. » Il envisage le ramadhan comme la synthèse entre « un acte religieux, financier et comportemental ». La religion invite à l’équilibre. Il estime que l’acte comportemental n’est pas rationnel. Le risque, souligne-t-il, est de voir les familles « s’engloutir dans la spirale de l’endettement ». A cet égard, il met en avant, que la plupart des divorces ont lieu pour des raisons économiques. Le surplus des dépenses générées par la frénésie des dépenses alimentaires se répercute, par ailleurs, sur le budget des quatre mois suivants, ce qui inclut les dépenses éducatives pour la rentrée scolaire. Dans son ouvrage, où il donne des conseils budgétaires à l’endroit des couples et des familles, il explique que la bonne gouvernance commence au sein de la famille.
Secteur touristique, « une crise d’idée » ?
La coïncidence entre ramadhan et période estivale creuse le manque à gagner pour une économie tournée vers le tourisme comme celle Maroc. Une enquête du Haut commissariat au plan de 2012, évalue à 17% la baisse des nuitées touristiques. Le Ramadhan génère un « chamboulement » de l’activité, qui se concentre le soir. Le tourisme étranger boude ainsi la destination durant le mois sacré. « Le touriste n’est pas attiré par ce mode de vie qui s’impose à lui ». Des packages touristiques existent vers d’autres destinations, dans le but de faire découvrir d’autres rites culturels ou religieux. Ce modèle n’est pas encore développé au Maroc. Si certains secteurs, tels que le bâtiment, s’adaptent aux contraintes de ce mois particulier, de même que certains commerçants, qui réalisent 50% de leur chiffre d’affaires durant ce mois, le tourisme est en panne de « créativité » pour Driss Khoudry. Il plaide en faveur de la « transformation de la nonchalance en valeur ajoutée ». « Le business doit changer de forme pour devenir un business rentable, s’il y a plus de clients le soir, mon business doit reprendre forme pour s’adapter le soir », explique-t-il.