Les professionnels déplorent le fait de ne pas avoir été consultés par le gouvernement.
»Dangereuse, absurde et incompréhensible ». C’est ainsi que la fédération des éditeurs de journaux aux Maroc a qualifié la nouvelle mesure fiscale, qui taxe de 5% désormais la publicité sur des supports digitaux.
Au sein de la communauté des éditeurs de la presse digitale marocains, c’est la consternation. La loi de Finances 2018 dispose en effet dans un de ses articles que les investissements publicitaires sur le digital seront désormais taxés à hauteur de 5%. La mauvaise nouvelle est venue sous la forme d’une note de la direction générale des impôts (DGI), selon laquelle le gouvernement de Saad Eddine El Othmani prévoit « un élargissement de l’assiette du droit de timbre proportionnel relatif aux annonces publicitaires diffusées sur tous types d’écrans numériques (écrans publicitaires LED, écrans d’ordinateurs, androïdes, tablettes etc..) ».
Un coup de massue pour ces éditeurs, qui arrivent difficilement à récolter de la »pub » sur leurs supports. Le drame pour eux est que cette mesure fiscale les assigne dorénavant aux mêmes taxes sur la publicité que les télévisions, car ce dispositif, relatif au droit de timbre de 5 % sur les annonces publicitaires sur écran, concernait jusqu’à fin 2017 les spots publicitaires diffusés à la télévision ou sur les écrans de cinéma. »Dans un souci d’adaptation au développement de nouvelles technologies de l’information dans le domaine publicitaire, il a finalement été élargi à l’ensemble des annonces diffusées sur tous types d’écrans numériques », indique la note de la DGI.
Dans un communiqué, la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ) a estimé mardi 30 janvier que cette mesure est « dangereuse, absurde et incompréhensible ». Comme elle déplore le fait de ne pas avoir été consultée par le gouvernement.
La corporation sous le choc
»On est tous sous le choc ! Cette taxe va rendre encore plus vulnérable un modèle économique déjà très fragile car la pub est notre principale source de revenu », explique le directeur de publication de Horizon Presse Groupe, Samir Chaouki, cité par ‘’Telquel’.
Mohamed Ezzouak, directeur de publication du site Yabiladi, estime quant à lui que cette taxe risque de « pousser dans la tombe » les médias les plus fragiles et « asphyxier » ceux qui s’en sortaient jusqu’ici un peu mieux.
Pour le patron du site Yabiladi, également président de l’Association de la presse marocaine digitale, qui réunit une dizaine de pure-playeurs marocains (Hesspress, H24, Yabiladi, Huffington Post Maroc, Le Desk, Medias24.com…), « il y a énormément de sites en ligne qui ne font pas les 5% de marge bénéficiaire », et qu’avec cette taxe, »cela va être de pire en pire ».
Seul alternative pour les plus malins, comme le dira encore le directeur de publication de Yabilad: délocaliser son entreprise de presse en France pour « lui aussi passer entre les mailles du filet ».
Pour autant, la nouvelle mesure fiscale du gouvernement El Othmani, ne sera pas appliquée aux annonces publicitaires marocaines, qui atterrissent sur des médias internationaux ou les réseaux sociaux (Facebook) ou Google, les GAFA.
Google et Facebook, 70% des annonces au Maroc
« Environ 400 millions de dirhams de publicité ont basculé de la presse écrite vers le canal digital. Mais seuls 15% à 20% au maximum ont choisi la presse digitale. Le reste est allé vers Google, Facebook, les supports étrangers, les sites marchands à grande audience… », relève de son côté dans une tribune le fondateur du site Medias24.com, Nacereddine El Afrite.
Le dossier sera au menu, lundi prochain, d’une réunion entre la direction de la DGI et les différents acteurs concernés, indique Mounir Jazouli, président du Groupement des Annonceurs du Maroc (GAM).
L’inquiétude est d’autant perceptible que les annonceurs comme Google et Facebook prennent 70% de la publicité des annonceurs marocains, et le reste va pour les supports locaux..