L’idée de légaliser la culture du cannabis progresse au Maroc, premier producteur mondial de cette drogue. Lancée par un parti dont le »patron » est proche du Roi, le débat parlementaire sur la légalisation de cette culture a commencé.
Le débat sur la légalisation de la culture du cannabis, lancé la semaine dernière sous forme de journée d’étude organisée par les groupes de la majorité au parlement, a commencé, même si officiellement, le thème de cette rencontre parlementaire portait sur »les perspectives de développement dans le monde rural ». L’objectif de cette journée d’étude portait sur l’identification »des dysfonctionnements cumulés depuis plusieurs années, en dépit des efforts fournis » dans le monde rural, selon un député du PJD (islamiste, au pouvoir). Pour autant, l’ordre du jour de la rencontre portait sur les positions des partis sur le débat autour de la légalisation de la culture de cannabis, une idée lancée et défendue par le parti de l’Authenticité et de la Modernité (PAM), et de l’Istiqlal, un des plus vieux partis du Maroc. En fait, la proposition de débat parlementaire lancée par ces deux formations politiques sur la légalisation de la culture du cannabis, notamment à des fins thérapeutiques, avait pris de court la majorité parlementaire, en particulier le PJD de Abdelilah Benkirane. Le débat devenait d’autant musclé entre l’opposition et la majorité au parlement dès lors que le PAM et l’Istiqlal défendent ouvertement la légalisation de la culture du cannabis et réclament une amnistie au profit des agriculteurs poursuivis par la justice.
Le PJD out du débat sur le cannabis
Mais, cette idée est farouchement combattue, pour le moment, par les députés du parti au pouvoir. Abdallah Bouanou, chef du groupe parlementaire du PJD, estime, lors de cette rencontre, que »la présentation de la légalisation de la culture de cannabis dans le Rif comme outil de développement social est plutôt lié à des surenchères électorales. Surtout que les mêmes positions ont été affichées par ces partis avant les élections de 2009 ». Cité par l’Economiste, il souligne que le PAM et l’Istiqlal veulent »renforcer les rangs de leurs électeurs en profitant de la misère des gens, ou encore de chercher des sources de financement de leurs campagnes électorales en donnant des promesses de légaliser la culture de cannabis ». Et puis, »le traitement de ce dossier est l’affaire de l’Etat, et non pas d’un parti politique », relève-t-il. Le PJD serait-il en perte de vitesse par rapport à l’opposition sur ce dossier ? Le PAM, selon la presse marocaine, serait en passe de déposer une proposition de loi au Parlement portant sur la légalisation de la culture du cannabis à des fins thérapeutiques.
Une loi pour les producteurs de cannabis
Le PAM, dont le fondateur, Fouad El Himma, ancien ministre délégué à l’intérieur est un des proches du roi Mohamed VI, va plus loin et veut fédérer à ses efforts de légaliser la culture d cannabis le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH). Il a transmis, selon la presse marocaine, une lettre à son président, Driss El Yazami, l’invitant à constituer une commission d’enquête sur les abus dont les agriculteurs-producteurs (de cannabis) seraient victimes. Selon le PAM, des dizaines de milliers de cultivateurs seraient actuellement poursuivis dans des affaires relatives à la culture du cannabis. A l’hiver dernier s’était tenue à Brrered, dans l’Atlas, une réunion qui avait regroupé plus de 2.000 petits et grands cultivateurs de cannabis, à l’initiative du PAM et l’Istiqlal. Objectif: »trouver des réponses aux problèmes de ces cultivateurs d’un genre particulier », dont l’insécurité et la clandestinité. Selon le ministère marocain de l’Intérieur, près de 48.000 agriculteurs versés dans la culture du cannabis vivent dans la plus grande clandestinité dans les montagnes du Rif, entre Nador, Koutama et El Hoceima. Le rapport 2014 de l’office des Nations Unies contre le crime et la drogue indique le Maroc est toujours le premier producteur mondial de résine de cannabis (Kif). La production marocaine de cannabis a été de 38.000 tonnes, avec 760 tonnes de kif. La production marocaine de cannabis s’étale sur un peu plus de 47.000 hectares, principalement dans les montagnes du Rif.