La marche de soutien aux populations du Rif à laquelle ont appelé des partis et organisations de la société civile marocaine, aura bel et bien lieu, en dépit de l’interdiction de la préfecture d’Al Hoceima. Ennahdj Eddimocrati pense que les ‘’années de plomb’’ sont de retour.
Dans un communiqué rendu public mardi, l’Association marocaine Al Adl wal Ihsane (Justice et Bienfaisance) a dénoncé la décision d’interdiction de la marche de soutien aux populations du Rif et au mouvement Hirak, né en octobre dernier pour réclamer la fin de la marginalisation de la région. Sous le slogan ‘’La manifestation pacifique est un droit légitime’’, Al Adl Wal Ihsane souligne que ‘’les autorités du Makhzen sont déterminées à ignorer les demandes légitimes de la population du Rif, en continuant de réprimer les citoyens et porter atteinte à leurs droits.’’ ‘’L’une des dernières violations, ajoute l’association, est sans doute la décision des autorités d’Al Hoceima d’interdire la marche du 20 juillet 2017’’. Pour l’association islamique, tolérée par les autorités marocaines, la liberté de manifestation est ‘un droit garanti par toutes les religions et les lois’’. Elle ajoute : ‘’nous condamnons cette interdiction arbitraire d’une protestation pacifique, et renouvelons notre soutien à toutes les activités pacifiques appelant à la réalisation des revendications légitimes de la province.’’ La résolution de la crise dans le Rif réside, selon Al Adl Wal Ihsane, dans ‘’la libération de tous les détenus’’ du Hirak.
Ennahdj : On sera présents à la marche de jeudi
A Ennahdj Eddimocrati (La Voix Démocratique), il ne fera aucun doute que le parti participera à la marche de jeudi. »Comme l’ensemble des coordinations et des mouvements, nous participerons à ce rendez-vous et ne ferons pas marche arrière. Nous assumons notre responsabilité quel qu’en soit le prix », affirme Abdelmajid Radi, membre du secrétariat national d’Annahj. Cité par »Yabiladi », il affirme que »tout le monde connaît notre position, nous sommes contre toute forme de répression, d’interdiction et d’embargo sur toutes les formes de protestation. Que dire de l’approche sécuritaire et la dangereuse escalade de l’Etat contre le Hirak, au lieu de répondre aux revendications de la population, à savoir la libération des détenus et le dialogue. » Pour lui, cette approche sécuritaire dans la gestion de la crise au Rif est »négative, voire catastrophique sur la situation du pays en général », et affirme que »nous revenons à la logique des années de plomb. »
Une interdiction absurde
Pour Abdeslam El Aziz, SG du Conseil national Ittihadi (CNI), membre de la Fédération de la gauche démocratique (FGD), »cette interdiction n’a pas de sens ». »Les arguments présentés dans le communiqué sont dépassés. Les marches et les manifestations pacifiques rentrent dans le cadre de la liberté des citoyens. Le fait d’avancer que les appels émanent de collectifs et de coordinations qui ne disposent pas d’un statut juridique est une discrimination et un abus », estime t-il. ‘’Le gouvernement doit se diriger vers la résolution des réels problèmes des zones marginalisées et enclavées », estime t-il, avant de relever que »ce retour aux années de plombs à travers ces interdictions et cet autoritarisme n’est pas dans l’intérêt du Maroc et des Marocains. »
Les autorités de la province d’Al Hoceima ont interdit cette marche de soutien au Hirak et ses militants, ainsi qu’à la population du Rif, prévue jeudi. Dans son communiqué, la préfecture d’Al Hoceima a prévenu qu’elle prendra toutes les mesures pour empêcher la tenue de cette marche, et que »le Parquet a été informé de toutes les circonstances et aspects de la question ». L’une des raisons d’interdiction de cette marche invoquée par les autorités locales est »l’atteinte au droit de la population à un climat sécuritaire sain, surtout que cet appel coïncide avec la saison estivale ».
La semaine dernière à Rabat, une marche organisée par des femmes membres de mouvements associatifs, dont l’AMDH, en soutien au mouvement Hirak et aux populations du Rif, avait été violemment réprimée, avec de nombreuses blessées. A la mi-juin, toujours à Rabat, une marche de soutien aux militants du Hirak arrêtés et emprisonnés à Casablanca et Al Hoceima, avait rassemblé près d’un million de personnes.
Le Hirak est né après la mort atroce d’un poissonnier à Al Hoceima, broyé dans un camion benne à ordures, alors qu’il voulait sauver sa marchandise, qui a été saisie par la police.