L’ONG Reporters Sans Frontières a une nouvelle fois accusé les autorités marocaines d’entrave à la liberté d’expression dans la couverture médiatique des événements dramatiques qui se déroulent dans le Rif.
L’ONG française a, dans un communiqué, dénoncé samedi « l’attitude des autorités marocaines d’entraver la couverture de la contestation » dans le Rif, en particulier à Al Hoceima où une manifestation de soutien aux militants emprisonnés du Hirak avait été interdite, et les manifestants ont été bastonnés, d’autres arrêtés. »Depuis le début des manifestations du »Hirak », (nom donné localement au mouvement populaire) en octobre dernier, RSF a »recensé de nombreuses violations de la liberté d’informer », indique RSF dans un communiqué. »A vouloir empêcher la couverture médiatique de la révolte du Rif, les autorités marocaines font peu à peu de cette région une zone de non-droit à l’information indépendante », explique la directrice du bureau Afrique du Nord de RSF, Yasmine Kacha. La connexion Internet a été également ralentie, parfois interrompue, et le réseau téléphonique perturbé dans toute la ville, ce qui a »compliqué le travail des journalistes sur place », ajoute RSF. Selon l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH), des affrontements ont opposé jeudi à Al Hoceima forces de l’ordre et manifestants, faisant des dizaines de blessés des deux côtés. Plusieurs manifestants ont été arrêtés : six selon les autorités locales, 35 d’après les organisations ayant participé à cette marche de soutien au Hirak, dont Ennahdj Eddimocrati.
Parmi les personnes arrêtées, figure Hamid El Mahdaoui, un journaliste engagé à la tête du site d’information marocain »Badil », et soupçonné d’avoir appelé à la participation à la manifestation de jeudi, interdite par les autorités d’Al Hoceima, et d’avoir »contribué à son organisation » », selon le parquet d’Al-Hoceïma. Selon RSF, sept »journalistes-citoyens et collaborateurs de médias » ont été arrêtés dans la région depuis le début de la contestation dans le Rif, en octobre dernier, après la mort d’un poissonnier, broyé dans un camion à ordures après avoir voulu sauver sa marchandise, saisie par la police.
»Un acte lâche »
Après Ennahdj Eddimocrati, qui avait dénoncé l’interdiction de la marche pacifique du jeudi 20 juillet 2017, pour demander la libération des militants du Hirak, ainsi que l’association Al Adl Wal Ihsane, Nabila Mounib, SG du Parti socialiste unifié (PSU) et coordinatrice de la Fédération de la gauche démocratique FGD, a dénoncé « l’interdiction de la manifestation d’Al Hoceima », qui est, selon elle, »un acte lâche ». « L’approche choisie par le gouvernement est inacceptable et lâche. C’est inadmissible que des méthodes pareilles soient encore employées aujourd’hui », a-t-elle ajouté. Auparavant, Ennadj Eddimocrati et plusieurs autres partis avaient estimé que le Maroc a fait un grand retour vers les »années de plomb » dans la gestion de la crise actuelle dans le Rif.
Plusieurs partis, dont le PPS, et des parlementaires ont dénoncé l’approche sécuritaire de la contestation populaire dans le Rif adoptée par le gouvernement, et l’arrestation de pratiquement tous les militants du Hirak et les animateurs de radios et sites indépendants proches du mouvement. Leurs procès sont en cours, dont celui de Nasser Zefzafi, leader du Hirak.