La reconduction par le roi Mohamed VI du SG du Parti Justice et Développement (PJD) Abdelilah Benkirane au poste de Chef de Gouvernement, après la victoire aux législatives de vendredi dernier, est unique dans l’histoire du Maroc.
Lundi 10 octobre 2016, le roi du Maroc a reconduit le »Chef » du parti islamique marocain, qui a remporté largement, mais sans avoir la majorité, les secondes élections législatives du pays organisées sous la nouvelle Constitution, imposée par la pression de la rue et des manifestations des jeunes pour un changement de régime politique au Maroc, dans le sillage du printemps arabe. Si le régime de la »monarchie parlementaire » n’est pas au rendez-vous de la Constitution de 2011, les islamistes du PJD en sont, eux, les grands gagnants, puisqu’ils viennent de gagner pour la seconde fois consécutive les élections législatives. Avec un score de 125 élus sur les 395 mis en jeu, le PJD a toute latitude pour mener des négociations en position de force avec les autres formations sorties des urnes. Le PJD est d’autant plus à l’aise pour mener les consultations pour la formation d’un gouvernement de coalition que le Parti Authenticité et Modernité (PAM), arrivé en seconde position avec 102 élus, a annoncé qu’il n’entrera pas au gouvernement, et qu’il va »chauffer » les bancs de l’opposition. »Non, nous avons déjà annoncé que le PAM ne va pas entrer au gouvernement », a affirmé à Maghreb Emergent Khaled Adnouni, chargé de presse du PAM. Contacté par téléphone à partir d’Alger, il a expliqué que »nous n’allons pas entrer au gouvernement, nous ne ferons pas partie de ce gouvernement. Nos positions sont clairs », avant d’annoncer que »nous allons entrer dans l’opposition. » Il a également affirmé que le PAM n’a pas été encore pour le moment ‘’contacté par le PJD. Même s’il le fera, notre réponse sera la même.’’ En face, il y a l’Istiqlal ( 46 sièges), le Rassemblement des Indépendants (RNI, 37 sièges), un parti de »l’administration » créé par Hassan II dans les années 1970 et l’Union Constitutionnelle (UC, 19 sièges), autre parti de l’administration (Makhzen) créé par Maati Bouabid, alors chef de gouvernement, en 1983 sur ordre de HassanII via Driss Basri. L’UC avait d’ailleurs remporté à la surprise générale les élections législatives de 1984, une année après sa formation ainsi qu’en 1993.
La Koutla réanimée ?
Hormis ces partis, qui sont susceptibles d’entrer au gouvernement, il y a également le Mouvement Populaire (MP) de M’hand Laenser, tout autant que le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS, 12 sièges) de Nabil Benabdallah, ministre de l’Habitat du gouvernement sortant. La grande inconnue de ces moments de tractations et de négociations pour la désignation des ministres du »troisième » gouvernement Benkirane, la précédente législature ayant été marquée par deux gouvernements après la défection de l’Istiqlal, sera quelle position vont prendre les partis de la »Koutla ». D’abord parce que l’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP, 20 sièges) avait boudé l’ancien gouvernement issu des élections de 2011, et annoncé entrer dans l’opposition. Ensuite, l’Istiqlal, membre historique du mouvement, était sorti du gouvernement Benkirane en 2012 avec l’arrivée au secrétariat général du parti de Hamid Chabat. Quant au PPS, il a toujours refusé de rester à l’écart de l’action publique, et a été la cheville ouvrière d’une rencontre en janvier dernier entre les ‘ »‘3 » de la Koutla et le PJD. Les 77 sièges de la Koutla plus les 27 du MP, indépendamment des positions du RNI et de l’UC, peuvent apporter la majorité au PJD pour former un gouvernement de coalition, avec un retour sur la scène politique locale de la Koutla.