La Mauritanie entre-t-elle dans le scénario «algérien» de 2008 consistant à lever le verrou constitutionnel qui limite à deux les mandats présidentiels et donc à permettre au président Mohamed Abdelaziz de rempiler pour un troisième mandat voire plus? La question qui n’était pas prévue dans le «dialogue national inclusif » entamé le 29 septembre dernier a été ouvertement introduite par le porte-parole du gouvernement, Mohamed Lamine Ould Cheikh. L’opposition dénonce.
Une manœuvre que l’opposition mauritanienne voyait venir, les militants de l’Union Pour la République (UPR) -parti de l’actuel président- tentent de forcer la lecture du document qu’ils ont présenté au dialogue qui propose notamment la modification du drapeau national et davantage de pouvoir au président de la République pour amender les projets de loi.
L’UPR a ainsi appelé à l’instauration d’une « seconde république avec un nouveau drapeau et un nouvel hymne national. ». Une sorte tabula rasa qui remettrait les compteurs à zéro et qui permettrait à M. Ould Abdelaziz de projeter un troisième mandat et voire même « une présidence à vie » selon certains de ses partisans.
Dans le cercle du président Ould Abdelaziz on fait valoir ses vertus de «grand bâtisseur d’infrastructures» qui a «rendu leur dignité aux pauvres.» De l’avis du porte-parole du gouvernement, le Président devrait avoir le droit de bénéficier d’autant de mandat qu’il voudrait. Pour l’opposition qui s’oppose à toute remise en cause de la limitation des mandats présidentiels, l’opération s’apparente à un détournement de la vocation du « dialogue national inclusif ».
L’opposition crie à la manoeuvre et… au putsch
Une partie de l’opposition qui participe au dialogue a aussitôt réagit à la manœuvre. Le parti de l’Alliance populaire progressiste (APP) a souligné que «sa participation au dialogue s’en tient au respect des questions convenues initialement.» L’Alliance nationale démocratique a qualifié les déclarations « émanant d’un haut responsable de l’Etat » de «provocation pour les forces politiques engagées dans le dialogue et une menace pour la continuité de ses assises.»
Le Forum national pour la démocratie (FNDU) qui boycotte le dialogue a qualifié les déclarations du porte-parole du gouvernement de prémices d’un «coup d’Etat contre la Constitution. »
Initialement et selon la version officielle, il s’agit d’ateliers de dialogues lancés depuis le 29 septembre autour de thèmes institutionnels tels que « la séparation des pouvoirs, le renforcement de l’Etat de droit, l’encouragement à la décentralisation, ou encore la réalisation d’un développement environnemental équilibré. »
« Au total 600 participants issus de 70 partis de la majorité présidentielle, de 28 partis de l’opposition, de 24 centrales syndicales et 90 organisations de la société civile, en plus des personnalités indépendantes et des mauritaniens de l’étranger prennent parts aux ateliers, selon la commission à l’information du dialogue national inclusif » rapporte l’agence de presse officielle, Ami. Le ‘’dialogue inclusif‘’ a été prolongé jusqu’à jeudi 13 septembre.
Arrivé au pouvoir 2005 à la suite d’un coup d’Etat contre le colonel Maaouiya Sid Ahmed Tayaa, le général Mohamed Ould Abdelaziz en est à son deuxième mandat qui prend fin en 2019. Sauf si le verrou est levé.