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Algérie

Mohamed Dahmani : « Le citoyen doit s’investir davantage dans la gestion des communes » (interview)

Par Yacine Temlali
octobre 12, 2017
Mohamed Dahmani : « Le citoyen doit s’investir davantage dans la gestion des communes » (interview)

Dans cette interview accordée à Maghreb Emergent, Mohamed Dahmani, directeur du programme CapDel au ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales, expose les objectifs de ce programme pour l’application de la nouvelle loi sur les communes, mais aussi, initier les citoyens et autorités locales à une gestion participative à travers une charte établie entre tous les acteurs locaux.

 

 

Maghreb Emergent : Théoriquement, qu’est-ce que le CapDEL ?

Mohamed Dahmani : Dans le cadre des grandes réformes politiques menées par les pouvoirs publics et introduites depuis 2011, notamment la nouvelle loi sur la commune (la loi n°11-10 du 22 juin 2011), qui a consacré un titre entier, le titre 3, à la participation des citoyens à la gestion des affaires publique locales, le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales a engagé, en partenariat avec l’Union Européenne (UE) et le programmes des Nations unies pour le développement (PNUD), un programme pilote de démocratie participative et de développement local.

Ce projet est appelé le « Programme de renforcement des capacités des acteurs locaux du développement » (CapDel), ce qui veut dire que les acteurs sont les élus, les administrations locales, la société civile et les acteurs économiques.

Le projet CapDel s’articule autour de quatre axes principaux : l’implication des acteurs locaux dans une démocratie participative, la modernisation et la simplification des services administratifs au niveau communal, le renforcement de la planification stratégique, notamment en vue de créer des emplois et des revenus durables (développement économique local) et, enfin, une amélioration de la gestion multisectorielle et multi niveaux des risques majeurs au niveau communal.

La valeur économique est centrale dans le projet CapDel. Est ce qu’actuellement, on peut parler d’une économie locale participative en Algérie ?

Effectivement, la participation des citoyens est centrale dans le développement économique du territoire. Car, jusqu’à aujourd’hui, les collectivités locales et la société civile ne se sont pas trop investies dans la fonction de planification du développement de leurs communes.

C’est pour cela qu’on est là, pour appeler les citoyens à participer à cet effort de planification locale, qui vise principalement leur propre épanouissement. Les autorités au niveau communal sont obligées d’écouter aux citoyens, afin de prendre les décisions idoines et de planifier les actions qui, justement, vont dans le sens du développement économique. Cela en libérant les initiatives citoyennes, en étant un facilitateur de l’investissement économique au niveau local. Je pense surtout à la jeunesse, qui peut apporter beaucoup à travers les TPE, les PME et les coopératives de jeunes et de femmes, qui peuvent promouvoir une économie basée sur les potentialités des territoires : économiques, culturelles et artisanales.

Quelle a été le point de départ de ce processus ?

Le président de la république a instruit, en 2014, le gouvernement de travailler à la modernisation des services publics, à la lutte contre toute forme de bureaucratie, à la promotion de la démocratie locale et aussi au recours à la société civile dans la gestion des affaires publiques. Depuis, le ministère de l’Intérieur s’est attelé à mettre en place une démarche qui vise à promouvoir cette participation et à renforcer le rôle économique des collectivités locales.

En réalité, la conjoncture que l’Algérie a vécue n’a pas donné l’occasion au citoyen d’être des acteurs, mais aujourd’hui, vu que les moyens existent, nous devons passer à une étape naturellement postérieure : celle de promouvoir le développement du bas vers le haut, d’un développement local qui serait le produit des collectivités territoriales en complément à l’action de l’Etat.

Sur quelle base a été fait le choix des communes pilotes pour l’exécution de ce projet ?

Les communes choisies sont : Timimoune (Adrar), Ouled Ben Abdelkader (Chlef), Béni Maaouche (Bejaïa), Ghazaouet (Tlemcen), Tigzirt (Tizi-Ouzou), Messaad (Djelfa), Djemila (Sétif), El-Khroub (Constantine), Djanet (Illizi) et Babar (Khenchela).

Le choix de ces communes n’a pas été aisé. Il y a 1.540 communes en Algérie et le choix s’est porté sur 10 communes, en prenant en considération la taille des équipes chargées de l’unité de gestion du projet et les financements mis en place, à savoir 11 millions d’euros : 7.700.000 euros de l’UE, 2.839.320 euros du gouvernement et 190.000 euros du PNUD.

Ces dix communes pouvaient constituer un échantillon représentatif de la diversité du territoire algérien, en prenant en compte l’aspect géographique, naturel, culturel, social, le niveau de développement atteint, la vocation des communes, leurs potentialités économiques…

Le programme CapDel est à l’étape du diagnostic, selon vous. Selon vous, qu’est ce qui empêche ou bloque le citoyen d’intervenir dans la gestion des affaires de la commune ?

Tout d’abord, on ne peut pas parler d’un blocage de la participation du citoyen au développement des communes. On doit parler, d’abord, de la conjoncture historique du pays. Jusqu’à y a pas très longtemps, le pays fonctionnait avec une planification centrale. Celle-ci offrait très peu de place à l’initiative politique au niveau local, bien évidemment. Même avec le passage à une économie de marché, ainsi qu’à un système démocratique local, ceci ne mettait pas fin à une inertie qui se fait encore ressentir à travers et autour des grands projets d’infrastructure de l’Etat.

Aujourd’hui, les pouvoirs publics ont décidé à mettre en place un nouveau modèle économique qui attend beaucoup de la part des collectivités locales pour jouer un rôle important dans le développement des territoires locaux. En complément, bien évidemment, des efforts de l’Etat dans ce sens.

 

Interview réalisée par Aboubaker Khaled 

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