Des experts pétroliers soulignent que l’Iran n’a pas la capacité d’augmenter sa production de 500.000 barils par jour d’ici la fin 2016, ce qui rend, en théorie, possible la conclusion d’un accord sans tenir compte de son absence à la réunion*.
La réunion des pays pétroliers aujourd’hui à Doha, destinée à négocier un gel de la production afin de soutenir les prix, semble mal partie. L’Iran a confirmé qu’il n’enverra aucun représentant à cette rencontre qui regroupe une quinzaine de pays producteurs, dont l’Arabie saoudite et la Russie.
L’Iran, qui veut retrouver son niveau de production d’avant les sanctions, n’entend pas se soumettre à ce qu’il considère comme une pression injustifiée de l’Arabie saoudite voire un prétexte pour ne pas négocier un accord.
Une exigence renouvelée par le puissant vice-prince héritier d’Arabie, Mohammed ben Salmane, qui préside le Conseil suprême de la Saudi Arabian Oil Company (Aramco).
L’Arabie saoudite est en mesure d’augmenter immédiatement sa production de 11,5 millions baril/jour (mbj) à 12,5 millions mbj si « elle le veut », a déclaré le fils du roi en soulignant que si son pays décidait d’augmenter ses investissements dans le secteur pétrolier, la production totale pourrait atteindre 20 millions mbj.
« Je ne suggère pas que nous allons produire plus, mais que nous pouvons produire plus », a-t-il expliqué rappelant ainsi que l’Arabie saoudite a les moyens d’être le maître du jeu sur le marché pétrolier.
« Let them eat oil » (laissez-le bouffer du pétrole), a titré le HuffPost Canada devant une perspective peu réjouissante pour l’industrie pétrolière. Les déclarations de Mohammed ben Salmane ont refroidi les espoirs d’un accord à Doha alors que l’Iran n’y sera pas présent, bien décidé à ne pas renoncer à son objectif de revenir à son niveau de production d’avant les sanctions.
L’Iran, un prétexte?
Le ministre iranien du pétrole, Bijan Zanganeh, a indiqué que son pays ne peut pas « se joindre au plan pour stabiliser les prix du pétrole tant qu’il n’aura pas retrouvé son niveau de production et d’exportation d’avant les sanctions. ».
Le ministre saoudien du Pétrole Ali al-Nouaïmi n’a pas fait de commentaires. L’Arabie saoudite paraît davantage guidée par son animosité, voire sa fixation politique à l’égard de l’Iran, que par la réalité du marché.
Des experts pétroliers soulignent, en effet, que l’Iran n’a pas la capacité d’augmenter sa production de 500.000 barils par jour d’ici la fin 2016, ce qui rend, en théorie, possible la conclusion d’un accord sans tenir compte de son absence à la réunion.
Le Qatar, pays hôte, parle d' »atmosphère d’optimisme » mais les marchés pétroliers paraissent plus portés par le pessimisme. Un échec de la réunion de Doha pourrait entraîner un nouvel effondrement des prix qui replongeraient vers les 30 dollars alors qu’ils tournent actuellement autour de 40 dollars.
Le seul signe positif vient plutôt des producteurs du pétrole de schiste américain qui sont en train de baisser leur production. Le prix du baril étant inférieur au coût de production, l’AIE s’attend à une baisse de la production américaine au second semestre 2016 de 530.000 barils/jour.
La menace de mettre « immédiatement » un million de barils de plus sur le marché n’arrange guère les choses alors que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a estimé que même la conclusion d’un accord à Doha n’aurait qu’un « impact limité » sur l’offre.
L’OPEP peu optimiste
L’OPEP, elle-même, a quelque peu refroidi l’optimisme en soulignant que l’offre, déjà excédentaire, pourrait s’accentuer. L’organisation a aussi révisé à la baisse ses prévisions de croissance de la demande mondiale cette année et pourrait les réduire davantage.
Le prix du baril a chuté de près de 60% depuis la mi-2014 en raison d’un grand excédent de l’offre du à la conjonction d’une baisse de la demande mondiale, d’une très forte augmentation de la production de pétrole non conventionnel, dont le pétrole de schiste américain.
Les analystes estiment qu’il existe un excédent d’offres de 2 millions barils-jour sur le marché mondial actuellement. La situation a été aggravée par le fait que l’OPEP, sous l’impulsion de l’Arabie saoudite, n’a pas joué le rôle de régulateur en refusant de réduire sa production.
Les pertes pour les pays exportateurs sont faramineuses et se comptent en centaines de milliards de dollars. La plupart des pays pétrolières connaissent des difficultés budgétaires qui les contraignent à des mesures d’austérité.
(*) Cet article a été publié initialement dans le Huffington Post Algérie.