Le Comité des droits de l’homme de l’ONU considère que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale promeut l’impunité et est incompatible avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Suite à des communications introduites par le Collectif des familles des disparu(e)s en Algérie (CFDA) concernant la disparition forcée d’Ali Lakhdar Chaouch et de Mohamed Mehalli, ainsi que les violations des droits de la famille de ce dernier, le Comité des droits de l’homme de l’ONU constate, pour les 25ème et 26ème fois, que l’Etat algérien a violé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). C’est ce qu’a indiqué lundi la porte-parole du Collectif, Nassera Dutour, lors d’une conférence de presse au siège du CFDA. Il s’agit aussi, selon elle, de la 19e condamnation de l’Algérie par le Comité des droits de l’Homme « pour des cas de disparitions forcées ». Le Comité, selon elle, appelle l’Etat algérien à mener des enquêtes approfondies sur le sort des disparus et à poursuivre, juger et punir les responsables des violations des droits humains. Il rappelle, a encore ajouté Nassera Dutour, ses observations générales formulées à l’issue de l’examen périodique de l’Algérie en 2007 dans lesquelles il a considéré que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale promeut l’impunité et est incompatible avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Harcèlement policier contre les familles de disparus
Le Collectif des familles des disparu(e)s en Algérie a condamné le « harcèlement » dont a fait l’objet la famille Mehalli entre 1992 et 2006 de la part d’« agents de sécurité » algériens. « Les agents intervenaient régulièrement au domicile familial, a rappelé la porte-parole du CFDA. Le frère, les enfants et l’épouse du disparu ont tous été arrêtés et torturés à différentes reprises. » Avant de disparaître, Mohamed Mehalli « a été incarcéré une première fois pendant 14 mois. A sa libération en 1997, le harcèlement a repris de plus belle. Le 29 juin 1998, parti en voiture au marché, il a été arrêté pour la dernière fois avant de disparaître à l’âge de 62 ans », a souligné le CFDA. L’un des fils du disparu, Abderrahmane, a-t-il encore noté, a été de nouveau arrêté en 2006 : « Pendant 12 jours, aucune nouvelle n’est parvenue à sa famille. Il a encore une fois subi des actes de torture. Il souffre aujourd’hui de syndromes post-traumatiques. »
Pour le cas d’Ali Lakhdar Chaouch, le CFDA a souligné que ce chirurgien orthopédiste a été arrêté le 1er avril 1997 à l’hôpital où il travaillait. « Entre 1997 et 2004, ses parents ont déposé plusieurs plaintes afin qu’une enquête soit menée sur sa disparition. Toutes ont abouti à un non-lieu », a déploré Mme Nassera Dutour.
Condamnation onusienne
Rappelons que pour le comité onusien des droits de l’homme l’Algérie a violé, concernant les cas des disparus Ali Chaouch-Lakhdar et Mohamed Mehalli, le droit de ne pas être torturé (article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques), le droit de ne pas être détenu arbitrairement (article 9) et le droit à la personnalité juridique.
Le CFDA appelle les autorités à mener « des enquêtes approfondies et rigoureuses sur les disparitions en fournissant des informations aux familles », à libérer les « disparus au cas où ils seraient toujours en détention au secret, à restituer leurs dépouilles en cas de décès » et à poursuivre, juger et punir « les responsables des crimes commis ». Il revendique également une indemnisation des victimes « de manière appropriée » et l’abrogation de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale et ses textes d’application ».