Selon l’Association nationale des établissements de formation agréés (ANEFA), «750 établissements privés de formation professionnelle risquent de disparaître, à cause des mesures de confinement suite à la crise sanitaire.»
Le retard qu’accuse l’Algérie en matière de la numérisation de l’économie et de l’administration n’épargne aucun secteur. Celui de l’enseignement et de formation professionnelle ne déroge pas à la règle.
Les établissements d’enseignement et de formation professionnelle privées n’ont pas le droit d’effectuer des formations en ligne, même en période de crise sanitaire et de confinement.
La cause ? Selon la législation en vigueur, les professionnels de la formation doivent remplir les conditions d’un cahier des charges qui n’existe pas. Outre leur forme primaire d’école, ces organismes doivent disposer d’un agrément spécifique.
Le hic, c’est que depuis l’arrivée au pouvoir de Abdelmadjid Tebboune, son Gouvernement n’a cessé de prêcher la bonne parole, au sujet de la promotion du digital et la numérisation de l’administration et de l’économie nationales. Mais au-delà des consignes et autres instructions, le passage à l’acte semble se heurter à la prééminence des rouages de la bureaucratie algérienne.
Preuve en est, dans le secteur de la formation professionnelle, rien ne se fait sans l’aval de l’administration centrale, et les initiatives ne sont pas permises. « Chaque nouveau ministre qui arrive a sa propre vision des choses. Il commence d’abord par annuler ce qui a été fait par son prédécesseur et bis repetita !», s’exclame un formateur dans une école privée à Alger.
Alors que dans les pays de l’OCDE, la formation en ligne (le E-learning) est une pratique normalisée à grand échelle depuis bien longtemps, de surcroît encouragée et recommandée depuis l’apparition de la pandémie du Coronavirus. Au Canada, en France, en Italie, au Royaume Uni et aux États-Unis, les recherches contenant les mots « formation en ligne » et « cours en ligne ouverts à tous », les MOOC, ont été multipliées par quatre entre la fin du mois de mars et le début du mois d’avril 2020, au moment où des mesures strictes de confinement étaient adoptées dans la plupart des pays de l’OCDE. Fin avril 2020, ces recherches étaient encore deux fois plus importantes qu’en temps normal, indique une étude de l’OCDE.
D’ailleurs, le télétravail est devenu un moyen privilégié pour assurer le confinement des citoyens sans arrêter l’activité professionnelle.
En Algérie, c’est tout une autre paire de manches !
Assia Bensalem, directrice générale du groupe INSC, gère plusieurs écoles de formation privées agréées. Elle fait part à Maghreb Émergent de sa propre expérience en la matière, notamment en période de crises sanitaire et économique, en expliquant pourquoi elle ne peut pas continuer à former ses apprenants à distance durant la période de confinement.
« Depuis le mois de mars dernier, nos pertes s’élèvent à plus de 5 millions de dinars et ce chiffre est à tendance haussière, étant donné que nous continuons à payer les loyers et les charges fiscales », déclare Assia Bensalem. La cheffe d’entreprise regrette que les autorités n’aient pas davantage pensé à venir en aide à son secteur d’activité. « Bien au contraire, la stratégie adoptée par le gouvernement nous a enfoncés ». Et d’ajouter : « Nous n’avons même pas le droit d’assurer les formations en ligne que nous pourrions éventuellement facturer », s’indigne la directrice de l’INSC.
Sur cette histoire de formation en ligne, Mme Bensalem nous a informé qu’après sollicitation de sa tutelle, « la ministre de la Formation et de l’Enseignement professionnels Hoyam Benfreha, s’est contenté de renvoyer la balle au ministère de l’Intérieur et au Premier ministre, en arguant que la décision d’accorder des autorisations pour des prestations de formation en ligne fait partie de leurs prérogatives ».
Le coup de Trafalgar du ministère !
Après un arrêt total de l’activité dans les centres de l’enseignement et de la formation professionnelle depuis le 12 mars dernier, un retour aux ateliers était initialement prévu le 30 août prochain. Une décision annulée par le ministère le 18 août dernier. la rentrée et reportée à une date ultérieure, au grand dam des établissements privés. Consternée Mme Bensalem nous confie qu’il s’agit d’un regrettable coup de Trafalgar, qui sonne comme un K.O pour les dirigeants des écoles en question.
De plus « Nous n’avons pas eu droit à des subventions, ni à des aides publiques durant la crise sanitaire, exceptée la mesure de report de l’acquittement de la Taxe de Formation par les entreprises au 31 décembre 2020 », ajoute la directrice de l’INSC.
A quand une démocratisation du E-learning en Algérie ?
Il est un fait que personne n’ose plus remettre en question : Le E-learning est l’avenir de l’apprentissage ! En Algérie, plusieurs PME et startups se sont lancées dans des projets innovants de plateformes E-learning, afin de répondre aux besoins des entreprises en termes de formation tous azimuts, sans les contraintes liées aux déplacements.
C’est l’exemple de BeeForm, une PME spécialisée dans les solutions E-learnig. Selon son patron, Omar Ali Yahia, « une demande d’introduction d’un cahier de charge allégé a été formulée au MEFP en 2016, mais à ce jour, ce document n’a pas vu le jour ».
« Du fait de l’interdiction du recours au E-Learning, les écoles privées agréées du secteur restent sans activités et depuis 6 mois. Les conséquences sont bien fâcheuse car on prive l’économie nationale d’exploiter une niche supplémentaire qu’est le marché des prestations à l’international.» Souligne Omar Ali Yahia.
Enfin, Il a ajouté que « les écoles privés sont des clients potentielles pour les STARTUP spécialisé dans le E-Learning. Grace à nos prestations, les écoles de formation professionnelle peuvent réduire leurs déficits cela couvrira leur leur taxe de formation ».