Le procès marathonien de l’affaire de l’autoroute Est-Ouest s’est poursuivi ce vendredi matin à la Cour d’Alger, par la lecture du réquisitoire du ministère public.
Après six jours de révélations, d’accusations et de contre accusations, un lourd réquisitoire du ministère public contre Chani Medjdoub, le principal accusé dans cette affaire de corruption désormais internationale, ainsi que les 15 autres personnes physiques et les sept personnes morales, représentants d’entreprises étrangères citées dans ce dossier. Les accusés ont été auditionnés en 2009 par le juge d’instruction, informe le ministère public en arborant des documents datés du 6 octobre 2009. « Les accusés qui bénéficient du choix de réponse ou du maintien du silence conformément à l’article 100-105 du code des procédures pénales, ont tous préféré répondre verbalement au juge d’instruction », a-t-il confirmé. Les représentants des sept entreprises étrangères mises en cause dans cette affaire (CITIC-CRCC, Coba, Cojaal, Sming, Pizzaroti, Caraventa SA, et Isolux Corsan), ont également été auditionnés par le juge d’instruction, qui a transféré le dossier d’accusation de 150 pages, l’accompagnant des documents d’expertises ad hoc, à la chambre d’accusation. « La défense a usé de tous ses droits et prérogatives auprès de la chambre d’accusation, de la Cour pénale, puis de la Cour Suprême », déclaré le procureur général, documents à la main. Celui-ci, informe qu’une demande d’audition avait été envoyée au ministre des Travaux Publics (Amar Ghoul, ndlr), qui refusa d’y répondre.
Association de malfaiteurs
Après ce survol de l’affaire, le procureur général passe au chapitre des accusations. Les inculpés sont désignés en deux groupes d’ »association de malfaiteurs ». Le premier groupe est composé de Addou Sid Ahmed, Addou Tadj Eddine, Allab El Kheir, Khelladi Mohamed, Bouchema Mohamed, Hamdan Selim, et Chani Medjdoub considéré comme le chef de groupe. Ce dernier aurait blanchi des sommes d’argents estimées à 3 millions d’euros, à travers le transfert via son entreprise fictive AGG, ainsi que de corruption, de fraude et de malversation. Le deuxième groupe, composé de Addou Sid Ahmed, Addou Tadj Eddine, et Hamdan Selim, est accusé de corruption, de blanchissement d’argent, de réception de cadeaux contre des services illégaux.
Des sommes versées par les entreprises étrangères
Le ministère public expose par la suite les arguments attestant du versement illégal de : 700.000 euros par l’entreprise suisse Caraventa, 41.500euros par l’espagnole Isolux, et de 600.000 euros par l’italienne Pizzaroti, à la société Mittal Sol de Addou Sid Ahmed, sise à Londres. Ces sommes auraient été versées pour l’obtention de marchés dans le projet de l’autoroute Est-Ouest. Le procureur général présente même le témoignage d’un dénommé Bomel, qui révèle le 8 mai 2011 que l’entreprise suisse Caraventa avait versé ces sommes à Addou Sid Ahmed pour l’obtention de marchés dans le secteur des travaux publics.
Les entreprises Isolux et Pizzaroti payaient également les services de médiations de Addou Sid Ahmed et Hamdan Selim. Ce dernier, ex-directeur de la planification au MTP, aurait transféré la somme de 20.000 euros pour chacun des comptes bancaires en France de son épouse « Ghrib W. » et ses deux sœurs (également mises en cause dans cette affaire), selon les affirmations d’un juge d’instruction suisse. L’entreprise portugaise Coba a payé les services de Addou Tadj Eddine après son obtention d’informations fournies par l’autre accusé dans cette affaire, Ghazali Ahmed Rafik, cadre au ministère des travaux publics.
Des preuves sur des infractions à la législation des changes commises par les frères Bouzenacha Naim et Bouzenacha Madani, par leur transfère illégal de plus de 100.000 euros, ont également été présentées ce matin.
Après cet exposé, le ministère public a requis une peine de 20 ans de prison ferme et d’une amende de 800 millions de dinars à l’encontre de Chani Medjdoub pour tous les faits qui lui sont reprochés. Le procureur général a également requis 20 de réclusion ferme et 5 millions dinars à l’encontre de Khelladi Mohamed. Pour Addou Tadj Eddine et Hamdan Selim, une peine de 15 ans fermes et une amende de 8 millions DA ont été requises pour chacun d’entre-eux. La peine réclamée pour Addou Sid Ahmed est de 8 années de prison ferme et 8 millions DA. 8 années fermes contre Allab El Kheir et un million DA d’amende, ainsi que 3 années fermes et un million DA contre Ouazane Mohamed, surnommé le colonel Khaled. Une peine de 2 années fermes a été également requise à l’encontre de Bouchema Mohamed et Ghazali Ahmed, assortie d’une amende d’un million DA chacun. La même peine a été requise pour les trois sœur Ghrib. Quand aux frères Bouzenacha, le ministère public a demandé une amende ainsi que la saisie de tous leurs biens immobiliers et leurs dépôts bancaires en Algérie et à l’étranger. Une amende cinq millions DA a été requise contre chacune des sept entreprises étrangères citées dans cette affaire.
La séance a été suspendue à midi. Elle reprendra à 15h pour les plaidoiries des avocats.