Le holding Contel Funkwerk Paletta est le « mieux disant » qui a remporté, en 2006, deux marchés destinés aux moins disant, et ce, grâce à une directive émanant du Pdg de Sonatrach l’époque Mohamed Meziane. Une directive qui enlevait à la direction des affaires juridiques des projets tout pouvoir de réaction.
L’audition des cent témoins dans l’affaire Sonatrach 1 s’est poursuivie aujourd’hui 13 janvier à la Cour d’Alger, avec l’audition de M. Bouchène Mouhamed, directeur des affaires juridiques au sein des directions de production en amont de Hassi Messaoud (l’équipement des structures opérationnelles de Sonatrach en systèmes d’alarme et de télésurveillance de la base-vie du 24 Février, Hassi Messaoud, et du Complexe industriel du Sud). Ces projets ont été attribués en 2006 au holding Contel Funkwerk Paletta, né en 2005 d’une fusion entre l’entreprise allemande Contel Funkwerk et sa filiale algérienne Contel Algérie (SPA), créée en 2005 par Al Ismale Djaafar, et dont devient actionnaire la même année, Fawzi Meziane, (fils de l’ancien Pdg de Sonatrach Redha Meziane), avec 200 actions sans contrepartie !
Une directive de 2006 interdisait la publication des appels d’offres dans le Baosem
Ces deux projets n’ont pas été soumis à la procédure de l’appel d’offres : ils n’ont pas été publiés dans le Baosem, bulletin des appels d’offres du secteur de l’énergie et des mines mais ont suivi un processus de consultation restreinte. « Cette dernière devrait pourtant être l’ultime recours en cas d’appels d’offres non fructueux et d’échec du processus de gré à gré », témoigne M. Bouchène.
Après insistance des avocats, le directeur des affaires juridiques de Hassi Messaoud lâche : « Le responsable HSE de la direction régionale de Hassi Messaoud, M. Marouch Ali (également témoin dans cette affaire), m’a informé de l’existence d’une directive interdisant la publication des appels d’offre de ces marchés dans le Baosem. » M. Maouch précise que sa direction n’a rien à voir avec le Baosem et que ce sont les maîtres d’œuvre de chaque activité qui lui transmettent les appels d’offres pour publication. Dans ce cas précis, c’était à la direction régionale de Hassi Messaoud de procéder à la soumission des marchés à la concurrence via ce bulletin. La passation des marchés à l’intérieur de Sonatrach, qui, d’ordinaire, se fait suivant la directive interne de Sonatrach A408 R15, s’est faite cette fois-ci, par signature de M. Mostafa Hassani, en sa qualité de directeur des activités amont.
M. Bouchène qui reconnaît à demi-mot que la signature de ces deux contrats était une dérogation aux règles, témoigne que cela s’est réalisé sur la base d’une « demande d’opportunité » émanant du PDG de l’époque M. Mohamed Meziane.
La direction juridique n’a pas vérifié les statuts des entreprises formant Contel Funkwerk Paletta
Ces deux contrats signés le 24 février 2006 semblent ne pas avoir été soumis à la vérification de la direction de M. Bouchène. « Comment avez-vous laissé passer un contrat constitutif d’un holding dont le fils du Pdg Fawzi Meziane est actionnaire? N’aviez-vous pas vérifié ses statuts avant de soumettre les contrats à l’approbation? », interroge le juge Reggad Mohamed. Et M. Bouchène de répondre : « Si, Monsieur le juge. Lors de la réception des deux contrats nous les avons, bien sûr, vérifiés, mais nous n’avons pas remarqué que Fawzi Meziane figurait dans le statut de l’une des entreprises formant le Holding. Nous avons juste remarqué que la durée de vie du holding arrivait à terme et nous l’avons signalé l’urgence du renouvellement du statut. »
Le mieux disant Contel Funkwerk Paletta remporte deux offres destinées au moins disant
Si ce type de projets de réalisation est d’ordinaire attribué au moins disant, les deux projets su-cités ont été remportés par le mieux disant (Contel Funkwerk Paletta). Une dérogation à la règle que le directeur des affaires juridiques des productions en amont peine à expliquer : « Je ne sais pas que c’est une dérogation. Je dirais simplement que d’autres facteurs auraient été pris en considération au moment du choix du partenaire. »
M. Mohamed Bouchène n’apporte pas de réponse non plus aux questions relatives au pouvoir de signature dans chaque structure. Il se contente de dire que si sa direction avait enregistré des anomalies, elle les aurait signalées, mais qu’elle ne pouvait pas le faire dans ce cas, car « l’accord spécifique » du P-dg, correspondant à cette demande d’opportunité leur enlevait tout pouvoir de réaction.