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Quelques rappels à M. Amar Saadani sur le « génial » Chakib Khelil et ses « bienfaits »

Par Maghreb Émergent
novembre 13, 2015
Quelques rappels à M. Amar Saadani sur le « génial » Chakib Khelil et ses « bienfaits »

 

L’Algérie, à en croire M.Amar Saadani, secrétaire général du FLN, doit sa survie au cours des quinze dernières années à M.Chakib Khelil, ancien ministre de l’énergie. Même pas à la « baraka » de Bouteflika comme disent ses partisans, non. Elle la doit au génie supérieurement supérieur de M.Chakib Khelil.

C’était sur Ennahar TV, un véritable morceau d’anthologie où le secrétaire général du FLN tentait de convaincre qu’une machination « interne » et « externe » a privé le pays des services d’un homme honnête, compétent, qui nous a pratiquement sauvés de la famine.

On a donc eu la totale. Chakib Khelil victime d’un complot ourdi, lui et Sonatrach et, par ricochet, le président Bouteflika pour l’empêcher de faire un 4ème mandat. Tant pis, si le général Toufik – car c’est lui qui est implicitement mis en cause – n’a guère manifesté d’opposition à ce 4ème mandat. Mais comme l’ancien patron du DRS ne cause pas, Saadani peut se permettre de dire ce qu’il veut.

Le retour contrarié au régime des concessions

Par contre, la politique énergétique du pays sous Chakib Khelil ne relevant pas du secret d’Etat, on peut discuter de son assertion selon laquelle « Sonatrach n’a jamais connu un ministre aussi compétent et intègre que Chakib Khelil qui a permis à l’Algérie d’engranger environ 1500 milliards de dollars ». Chakib Khelil, ministre de l’énergie de 1999 à 2010, qui était bien meilleur communicateur que M.Amar Saadani, a pris le destin du secteur de l’énergie avec des idées arrêtées: produire le maximum pour engranger le maximum de devises.

Il a rapidement lancé le chantier d’une nouvelle loi sur les hydrocarbures qui suscitait les critiques des experts puisqu’elle rétablissait le régime des concessions au profit des compagnies étrangères et mettait fin à celui du partage de production en vigueur (51/49%) qui avait fait ses preuves. Le projet a été suspendu jusqu’à l’après élection présidentielle de 2004 où il a été relancé et adopté en avril 2005. L’UGTA qui était  » contre » s’est miraculeusement convertie, par la grâce d’une simple discussion avec Ahmed Ouyahia, aux « aspects bénéfiques de la loi ». Les patrons du FCE qui étaient également montés au créneau contre la loi Khelil se sont tus, eux, aussi.

Quelques experts solitaires notamment Hocine Malti ont continué à batailler dans les médias contre la loi de manière solitaire. La loi, promulguée, ne sera jamais appliquée. Certains affirment que le président Hugo Chavez serait intervenu auprès du président Bouteflika pour lui démontrer que cette loi était néfaste aussi bien pour l’Algérie que pour l’OPEP. « L’Algérie et les pays de l’OPEP devaient une fière chandelle au président vénézuélien Hugo Chavez, dont l’intervention fut sans doute décisive dans cette affaire. Il avait réussi, lors d’une visite à Alger spécialement programmée à cet effet en mai 2006, à convaincre son homologue algérien de changer d’avis, compte tenu de l’immense dommage que son initiative causerait à tous les pays producteurs de pétrole » écrit Hocine Malti dans son livre « l’histoire secrète du pétrole algérien ».

Le marché contre Khelil

On ne sait pas si ce rôle présumé d’Hugo Chavez est aussi important dans le gel de cette loi. Par contre, le marché, ce satané marché, rendait caduc l’esprit même de cette loi: favoriser une prospection et une exploration intensive pour engranger le maximum de dollars. La hausse des prix du baril a commencé dès 2002 et elle s’est largement installée en 2005. Les dollars rentraient en grande quantité sous le régime en vigueur du 51/49%, il n’était pas nécessaire d’aller au régime des concessions. Les opposants à la « loi khelil » n’étaient pas, le plus souvent, des libéraux mais c’est bien le « marché » qui l’a rendue caduque

Et c’est bien ce marché, Monsieur Saadani, ce marché sur lequel ni l’Algérie et encore moins le sieur Chakib Khelil, n’ont de prise « qui a permis au pays d’engranger environ 1500 milliards de dollars ». Ceux qui connaissent des rudiments élémentaires de l’économie pétrolière et sur la manière dont se fixent les prix du baril sur le marché mondial ont du rire avant d’être choqués d’entendre un chef d’un parti qui porte un nom sérieux se laisser à de telles affirmations. L’explication irrationnelle par la « baraka de Bouteflika » est bien plus « sérieuse » que le génie présumé de M.Khelil.

Nous lui devons l’épuisement des gisements !

Les « bienfaits » de Khelil ont été particulièrement couteux pour l’Algérie où son choix productivistes s’est fait au détriment de l’entretien des puits. Si dans l’affaire Saipem, il est question de pots-de-vin de l’ordre 200 millions d’euros, les couts de la politique de surexploitation des gisements sont autrement plus lourds.

L’ancien PDG de Sonatrach, Nazim Zouioueche, a expliqué sur Radio M pourquoi les gisements se sont essoufflés en raison du non-respect du la règle de la réinjection d’une partie des gaz extraits afin de maintenir la pression (cyclage). « Il était normalement question de réinjecter 60 sur les 92 milliards de m3 extraits et de ne commercialiser que 32 milliards de m3. Mais des arbitrages ont été fait, il y a près de dix ans, en faveur de l’augmentation des volumes à commercialiser au détriment de la vie du gisement. Cela a pour conséquence une baisse de pression et donc des taux de récupération moindre ». Ce constat fait par un ancien PDG de Sonatrach est bien plus grave que l’affaire Saipem.

Nazim Zouioueche qui a incité le gouvernement actuel à agir pour nous guérir des « bienfaits » de Khelil nous a donné une idée de ce qu’il nous coute réellement en donnant des éléments chiffrés de ce qu’on pourrait nommer le désastre de Hassi R’Mel. « Si on ne fait rien maintenant, ce sont 40% des volumes de ce gisement qui vont être piégés à jamais, soit 1500 milliards de mètres cubes de gaz d’une valeur d’environ 450 milliards de dollars US… Ces 1500 milliards de m3 de gaz que l’Algérie risque de ne pas produire représentent une dizaine d’années de recettes d’exportations en hydrocarbures ».

Cela se passe de commentaire. Les choix de politique énergétique, contrairement aux pots-de-vin, ne sont pas passible du pénal. Mais il est utile de rappeler ce que ce génie, selon Saadani, a coûté à l’Algérie.

 

 

 

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