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Algérie

Qui a fait quoi pour faire perdre 16 milliards de dollars en gestion de réserves de change à la Banque d’Algérie ? (Analyse)

Par Maghreb Émergent
février 3, 2017
Qui a fait quoi pour faire perdre 16 milliards de dollars en gestion de réserves de change à la Banque d’Algérie ? (Analyse)

L’absence de transparence sur les placements et la gestion des réserves de changes de la banque d’Algérie, ne permet pas de savoir si les pertes subies sont le fait d’une gestion statique ou à l’inverse dynamique mais catastrophique.

 

Les dernières déclarations du Gouverneur de la banque d’Algérie, à l’assemblée Nationale, sur le solde au 31 décembre des réserves de change du pays, ont recelé un élément assez curieux relatif, à la composante des dépenses ayant participé à l’érosion de ces réserves de 29.9 Milliards de dollars entre le 31 Décembre 2015 et la même échéance en 2016.
Ainsi on constate, selon ses dires, que ce montant en inclut un autre de 4,3 Milliards de dollars, relatif à une perte de change enregistrée par les placements fait dans d’autres monnaies que le dollar, par rapport à ce dernier qui sert de référence au décompte total de nos réserves.

Pourquoi ne pas publier aussi le solde dans les autres monnaies ?

Le premier questionnement sur cette affirmation est d’ordre pratique et éthique. En effet qu’est ce qui empêche la banque d’Algérie, d’établir un Solde définit dans les différentes monnaies de placement, et en parallèle une conversion au cours du jour d’établissement des soldes fractionnés, pour présenter le résultat intégral en dollars US, en fin de tableau. Cela permettrait déjà de savoir, qui fait quoi et qui a perdu combien sur quelle monnaie, et en vertu de quelle logique des placements dans des monnaies sur une pente baissière sont maintenus malgré les pertes enregistrées d’année en année.
Cela permettrait aussi, de savoir si les placements sont fait dans une logique statique ou dynamique, et cela change beaucoup en matière de résultats finaux.
En effet des Brookers, bien inspirés, réussissent à fructifier un capital de départ de manière quasi continue, sur simple jonglage avec les monnaies et les valeurs en fonction de leurs anticipations des fluctuation, avec cette capacité de revenir à la fin de l’année, vers la monnaie de départ avec un solde majoré de leurs bénéfices et ce quelle que soit le valeur de ladite monnaie à cette date précise.
Il est clair, que si vous vendez 100 dollars en phase haussière pour racheter pour l’équivalent dans d’autres monnaies en dollars en phase baissière de cette monnaie vous aurez plus que les 100 dollars de départ, même si entre temps ce n’est plus le même dollar, en attendant encore une hausse pour vendre.

Gestion statique ou gestion dynamique catastrophique ?

Mais au vu des érosions permanentes de nos réserves calculées en dollars depuis la fin 2013, il est clair, que nos pertes en contrevaleur par rapport au dinar, qui sont à ce jour déclarées de l’ordre de 16 Milliards de dollars, sans les données de 2015, ne peuvent être due qu’à une gestion statique de ces réserves, dont le solde subit régulièrement les contrecoups des chutes des monnaies de placement, sans rien tirer comme bénéfice des hausses sporadiques de ces monnaies. Ou à une gestion dynamique catastrophique de ces mêmes réserves, dans laquelle un attrait pour les monnaies en tendance haussière sous l’effet de la panique, fait que nous achetons toujours quand elles sont chères pour revendre quand elles commencent à baisser pour limiter la casse dans l’esprit des gestionnaires, et la multiplier dans les faits.
Conclusion qui nous mène vers la logique du bas de laine ménager, qui fluctue entre l’attachement à la valeur nominale des avoirs sans trop s’inquiéter de leur pouvoir d’achat, et la panique qui pousse à ne bouger que quand il y a le feu en la demeure et à perdre sur les valeurs quel que soit le sens du flux.,

Les placements hors dollars essentiellement en euros

Pour revenir, à ce fameux montant de 4,3 Milliards de dollars, monsieur le gouverneur n’a pas précisé s’il a été calculé sur la base des fluctuations de 2016 uniquement ou sur celles de 2015 et 2016 réunies, du moment que nous n’avons pas encore le détail de la balance de paiements à 2015, qui n’a pas encore été publiée par la banque d’Algérie.
Contraints à faire avec une communication opaque et hors timing des données financières nationales, nous devons de ce fait faire deux lectures de ce montant en fonction des deux variantes, 2016-2017 et 2015-2017, pour voir si cette perte annuelle ou biennale est le résultat d’une gestion statique ou d’une gestion dynamique de ces fameuses réserves.
Pour ce faire il faut déjà commencer par déterminer le Ratio de cette érosion de 4.3 Milliards de dollars sur le solde de 2014, et celui de 2015, qui sont respectivement de 178.9 et 144.1 Milliards de dollars, et cela donne quelque chose comme 2,4% par rapport à 2014 et 2,98% par rapport à 2015.
En contrepartie nous avons en face du dollar les monnaies potentielles de placement de nos réserves, qui par ordre de priorité en fonction de nos échanges extérieurs sont l’euro en première position, suivi de la livre sterling, et du franc suisse pour finir avec le yen japonais.
Mais il est fort à parier que du fait de nos flux de transactions en monnaie européenne unique, le gros de nos réserves non libellées en dollars, est détenu en euros, et pas dans une autre monnaie à part le dollar bien sur.
Mais là, et contrairement à la chute vertigineuse de 2014, l’euro n’a pas subi de baisse conséquente en 2016, et a subi une baisse de 3.79% en 2015, avec une baisse globale de 4,39% entre la fin 2014 et la fin 2016, soit en deux ans.
Par contre la livre sterling a été laminée par une baisse de sa valeur e l’ordre de 4.45% en 2014 et 11.71% en 2016, soit 16,52% en deux ans.
Comme il est fort peu probable que nos réserves non libellées en dollars soient détenues dans cette monnaie, sa baisse n’a du avoir qu’une incidence insignifiante sur ces détentions.

La banque d’Algérie a t’elle gardé des livres sterling après le Brexit ?

Sur l’euro, la baisse de nos réserves représente, 56% de la baisse de cette monnaie sur deux ans, ce qui dans un scenario statique renvoie au même pourcentage de détentions de nos réserves en devises, libellé dans cette monnaie, soit quelque chose comme 80 Milliards de dollars, représentant 73.5 Milliards d’euros, et ceci si le chiffre du gouverneur représente deux ans de pertes en contrevaleur.
Mais si le chiffre représente les pertes du seul exercice 2016, la situation devient plus complexe et sa lecture d’autant.
Du fait que cette monnaie n’a baissé que de 0,57% par rapport au dollar en 2016, ce qui ne correspond nullement à nos pertes de change, même si la totalité de nos avoirs était dans cette monnaie ce qui n’est pas me cas du moins en apparence.
Dans ce cas de figure, la seule monnaie dont la baisse est assez significative pour impacter de 2,40% sur le volume initiale de nos réserves de change à fin 2015, est la livre sterling, et dans ce cas précis, il aurait fallu détenir quelque chose comme 24,58 Milords de livres sterling, équivalents à 35,02 Milliards de dollars en 2015, et à 30,92 Milliards de dollars en 2016.
Dans ce cas de figure nous aurons une perte de l’ordre de 4,1 Milliards de dollars imputables à la chute de la livre sterling, et de 200 Millions imputables à la chute de l’euro.
Toujours dans cette hypothèse, la chute de cette monnaie ayant été déjà entamée en 2015, il faudrait, justifier le maintien de certaines réserves dans cette monnaie, alors que le Brexit était aux portes en 2015 et effectif début 2016.
S’il s’avère que c’est effectivement le cas, on peut dire que les pertes engendrées par cette gestion, statique et bureaucratique sont pires que toutes celles engendrée par d’autres secteurs économiques dans le pays.

Une perte de 45 jours d’importations annoncée avec légèreté

Dans un autre cas de figure, et si la livre sterling n’est pas la principale cause de cette perte en valeur de 2,8% de nos réserves de change, sur un an, un tel montant ne peut être perdu qu’à la faveur d’une gestion dynamique, et de placements hasardeux des différentes monnaies, non pas en fonction de la rentabilité des opérations, mais sous l’effet de tentatives de limitation des pertes à chaque baisse d’un monnaie par rapport à l’autre, ou sous les conseils de brookers ou de banquiers dont il reste à définir le mandat et le commanditaire exact, si cela devait s’avérer le cas.
Dans tous les cas de figure, une telle perte, représentant 10% de nos importations Brutes en dollars, soit 45 jours d’importations, annoncée avec une telle légèreté, sans que personne dans l’auditoire n y prête la moindre attention, appelle deux traitements urgents:
Le premier consiste à faire un audit de la gestion précise de toutes nos réserves depuis le premier dollar engrangé à ce jour, pour essayer de savoir ce qui a été fait exactement et par qui, mais surtout pour quelle raison.

Obliger la banque d’Algérie à la transparence sur ses comptes en temps utile

Le deuxième traitement, une refonte des textes régissant la banque d’Algérie et toutes les autres institutions financières, en vue de rendre obligatoire, la publication des comptes exacts au mois près, en temps utile, soit au plus tard deux mois après leur fermeture, et ceci pour l’intégralité des comptes touchant aux finances du pays en interne et en externe, avec une précision pour les réserves de change, qui doivent être présentée en détail avec les monnaies de détention et la nature des dépôts. Se prévaloir d’un secret bancaire, n’est pas valable pour l’argent public qui n’appartient pas plus à ses gestionnaires que les renseignements le concernant, et se prévaloir d’un secret d’état pour motifs stratégiques n’obéit à aucune logique dans la mesure ou ceux qui sont en droit de savoir ce qui se fait de leur argent ne sont d’aucun danger pour la nation, et ceux qui peuvent représenter un danger savent exactement ou est placé le moindre centime nous appartenant, étant donné qu’il est chez eux, et que contrairement à ce qui se dit dans le public, tout ce beau monde s’échange ou même se vole les renseignements utiles pour préparer ses manœuvres futures en toute connaissance de cause.
A cet égard, il n y a aucune raison pour la que la FED ou la BCE, publient leurs comptes intégraux en temps réel, et qu’une banque centrale d’un pays qui n’a de politique monétaire que l’émission de coupons locaux de contrevaleur des monnaies internationales, sous la dénomination de dinars, ait plus de secrets que ces banques contrôlant le globe sous toutes ses coutures.
Faute de quoi, les réserves de change connaitront une érosion imprévisibles et non conforme aux calculs des balances commerciale et de services, par adjonction d’un facteur imprévu, qui a déjà couté au pays, au bas mot 16 Milliards de dollars en 2 ans, et probablement plus en 10 ans, durant lesquels les soldes positifs de ces balances, écartaient tout questionnement sur le reste des comptes.
Et ceci est un impératif de transparence et de survie en même temps.

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