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Algérie

Sellal trop optimiste ? Les réserves de change devraient tester le plancher des 100 MDS de dollars dès 2017

Par Saïd Djaafer
janvier 2, 2017
Sellal trop optimiste ? Les réserves de change devraient tester le plancher des 100 MDS de dollars dès 2017

Les réserves de change de l’Algérie resteront-elles au-dessus de la barre des 100 milliards de dollars? Les prévisions officielles l’affirment. Pourtant même avec une hausse du baril, elles semblent trop optimistes. 

 

 

Abdelmalek Sellal affichait en début septembre dernier l’objectif du gouvernement de maintenir les réserves de change du pays au-dessus du seuil symbolique de 100 milliards de dollars d’ici 2019.

 « Certains croient que l’économie algérienne connaîtra des difficultés durant les prochaines années, mais nous avons étudié la situation et jusqu’à 2019, les réserves de change algériennes ne baisseront pas sous le seuil des 100 milliards de dollars » avait-t-il assuré.

 Le modèle économique concocté au début de l’année 2016 par un groupe d’experts réunis autour du Premier ministre était encore plus optimiste et annonçait un objectif de réserves de change de 113 milliards de dollars en 2019. Un pari qui sera très difficile à tenir et qui risque même d’être mis à l’épreuve dès 2017.

 

114 milliards de dollars de réserves fin 2016

 

L’Algérie terminera finalement l’année 2016 avec 114 milliards de dollars de réserves de change. L’annonce a été faite, mercredi 28 décembre 2016 à la télévision nationale, par Abdelmalek Sellal lui-même. Un chiffre décevant et plus bas que prévu. 

Le 4 décembre, Le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Loukal, prévoyait encore que les réserves financières internationales du pays allaient terminer l’année « entre 117 et 118 milliards de dollars ».

 Au cours des derniers mois les autorités financières n’ont en tous cas pas été avares d’informations sur ce chapitre et semblent décidées à jouer le jeu de la transparence.  Après les informations livrées récemment devant les députés par le Gouverneur de la Banque d’Algérie, on savait déjà que les réserves de change étaient de 129 milliards de dollars à fin juin dernier et qu’elles avaient baissé à 121,9 milliards de dollars à fin septembre.

 On s’attendait donc à ce que, sur cette pente, elles atteignent environ 117 milliards de dollars fin 2016 contre 144 milliards de dollars à fin 2015. Une réduction des réserves qui est la conséquence directe du déficit prévisible de la Balance des paiements que la Banque d’Algérie estimait voici quelques mois à 27,5 milliards de dollars pour 2016.

 

La faute à l’ « effet de valorisation »

 

Le Premier ministre a reconnu au cours de son intervention télévisée que le chiffre de la fin de l’année aurait dû être plus élevé, mais, a-t-il précisé, la hausse du dollar a impacté les réserves. En effet, une partie des réserves de change est placée dans d’autres devises dont l’euro qui ont fortement baissé ces dernières semaines face au billet au vert.

 Explications d’un cadre de la Banque centrale : « Il y a encore une dizaine d’année la quasi-totalité des réserves en devises de l’Algérie étaient libellées en dollars. Au cours de la décennie écoulée on a diversifié les placements qui sont maintenant à peu près à égalité en dollar et en euros. Comme la valeur du dollar a grimpé sensiblement face à l’euro sur les marchés des changes internationaux au cours des derniers mois de 2016, nos réserves de change exprimées en dollars ont diminué indépendamment de leur réduction imputable par ailleurs au déficit de la balance des paiement ».

 Ce mécanisme que les cadres de la Banque centrale désignent comme un « effet de valorisation » négatif aura coûté 2 ou 3 milliards de dollars au montant des réserves de change en fin d’année.

 

 Le pessimisme de la Banque Mondiale

 

Compte tenu des derniers chiffres rendus publics par les autorités algériennes, le pari de M. Sellal apparait ainsi de plus en plus risqué. Dans un document qui a créé un début de polémique avec les autorités algériennes, la Banque mondiale estimait en octobre dernier, que le déficit de la balance des paiements devrait encore se situer entre 27 et 28 milliards de dollars au cours des trois prochaines années

 Elle en déduisait que les réserves de change ne dépasseraient pas 60 milliards de dollars à fin 2019. Un pronostic d’autant plus ennuyeux que le premier ministre avait précisément affiché quelques semaines plus tôt son ambition de maintenir en toutes hypothèses les réserves au-dessus du plancher de 100 milliards de dollars.

 

 Polémique sur les chiffres

 

On se souvient que, par l’intermédiaire de la Banque d’Algérie, les autorités algériennes ont réagi très vivement aux prévisions de la Banque mondiale. Elles ont exprimé explicitement leur désaccord avec ces prévisions du fait  qu’elles estiment qu’elles ont mis en œuvre un certain nombre d’actions dont les résultats vont se faire sentir principalement en 2017 et 2018.

 C’est le sens du commentaire de la Banque d’Algérie selon lequel « le rapport de la Banque Mondiale sur la région Mena situant le montant des réserves de change de l’Algérie, à l’horizon de fin 2018, à 60 milliards de dollars paraît quelque peu alarmiste ».

 L’optimisme des autorités algériennes pour les deux ou trois prochaines années repose sur les signaux favorables qui concernent « les évolutions inverses des exportations et des importations qui vont réduire substantiellement les déficits de la balance commerciale et, par conséquent, les déficits des balances courante et globale » relevait la Banque centrale algérienne.

  

Sous les 100 milliards à fin 2017 ?

 

Pour que ces « évolutions inverses » produisent les effets attendus par les autorités algériennes, on sait désormais qu’il faudra qu’elles permettent de réduire le déficit de la balance des paiements de plus de 15 milliards de dollars en le ramenant à moins de 14 milliards de dollars en 2017.

Une autre façon de dire que le niveau plancher de 100 milliards de dollars de réserves évoqué par M. Sellal supposerait à la fois une nouvelle réduction des importations l’année prochaine ainsi qu’une très bonne surprise avec des prix du baril en forte hausse dès 2017.

 C’est pourtant le pari que semble faire désormais le premier ministre si on en juge par les prévisions qu’il a formulées en fin d’année.  Selon les chiffres mentionnés par M.Sellal, le gouvernement s’attend pour l’année en cours, à un montant de 27,5 milliards de dollars de recettes pétrolières. Le cours moyen du baril en 2016 était estimé dernièrement à 43 dollars selon des sources non officielles.

 Pour le Premier ministre les recettes pétrolières, portées à la fois par l’augmentation du prix du baril et la croissance des exportations en volume, devraient connaître une amélioration importante dès l’année prochaine avec une prévision de 35 milliards de dollars.

 Cette dernière suppose un prix du baril proche de 55 dollars en moyenne pour l’année prochaine et constitue donc déjà un pronostic révisé en forte hausse par rapport à la loi de finance 2017 qui est calée sur un baril à 50 dollars.  Elles ne paraissent cependant pas irréalistes compte tenu du niveau des prix pétroliers actuels et des prévisions formulées par la plupart des acteurs internationaux du secteur pour l’année à venir.

 

Baisse des importations et endettement

 

De telles recettes pétrolières resteront cependant encore insuffisantes pour empêcher, à elles seules, les réserves de change de plonger sous la barre des 100 milliards de dollars en 2017.

 Pour maintenir cet objectif, le gouvernement devra compter de surcroit sur une nouvelle diminution des importations de marchandises. Ces dernières qui étaient déjà en recul de près de 6 milliards de dollars en 2015 devraient encore diminuer du même montant environ en 2016.

 Les marges de manœuvre dans ce domaine semblent donc se réduire de plus en plus même si le modèle économique élaboré par le gouvernement évoque des importations de marchandise réduites à 43 milliards de dollars en 2017 (contre un peu plus de 46 milliards d’importations réalisées en 2016).

 Il devra aussi compter probablement sur un certain niveau d’endettement international que le Premier ministre a d’ailleurs évoqué dans son intervention télévisée en le qualifiant lui-même de « prudent».

 

La balance des paiements à l’équilibre en 2018 ?

 

Les prévisions du M. Sellal pour 2018 sont encore plus optimistes. Il compte désormais sur des recettes pétrolières qui devraient atteindre un niveau de 45 milliards de dollars en 2018.  Ce qui suppose clairement un prix du baril supérieur à 70 dollars et permettrait incidemment à la balance des paiements de retrouver un quasi équilibre dès l’année prochaine et aux réserves de change de se stabiliser.

 

Il faudra cependant beaucoup de chance à M. Sellal pour gagner son pari. Le Premier ministre a décidemment bien fait de ne pas oublier de saluer les travailleurs de la Sonatrach, « à la hauteur » durant la crise et qui permettent de « maintenir et d’améliorer la production pétrolière ».

 

 

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