Confrontés aux insuffisances qui caractérisent la gestion des déchets ménagers dans les grandes villes, les pouvoirs publics semblent se résoudre à déléguer la tâche à des opérateurs internationaux expérimentés.
Le groupe Suez Environnement, en charge déjà de la distribution de l’eau et de l’assainissement dans la capitale, est en pôle position pour suppléer à l’insalubrité « d’Alger la Blanche ». Les nombreux contacts avec des responsables de Suez Environnement, dont ceux avec Dominique Mangin d’Ouince, directeur exécutif pour l’Europe centrale, la Méditerranée et le Moyen-Orient, ont fini par convaincre la wilaya d’Alger de s’attacher le savoir-faire du groupe international. Un cahier des charges serait en voie de finalisation pour la concession de la gestion des déchets urbains dans la capitale.
Auparavant le responsable régional, de la multinationale française avait déclaré : « Nous avons proposé d’apporter notre expérience dans ce domaine et nous sommes confiants dans la réussite d’un tel partenariat, forts de notre expérience exemplaire avec la SEAAL. Nous sommes en mesure d’apporter notre expérience en recyclage et en gestion des décharges et, comme nous le faisons avec les pays voisins, en traitements des déchets industriels ». Nous pourrions travailler « en appui aux EPIC gérant la collecte des déchets municipaux des villes telles qu’Alger, Oran ou Constantine »….a t-il estimé.
Une situation préoccupante
Les autorités algériennes semble aujourd’hui préoccupées par toute la chaine des déchets : la collecte, le transport et l’élimination. Un cadre de l’Agence Nationale des Déchets (AND) a confié à Maghreb Emergent que la situation est désespérante : « chaque responsable qui vient croit résoudre le problème du ramassage et de l’élimination des déchets par l’annonce de mesures spectaculaires qui lui sont propres. Avant, la panacée c’était les Centres d’Enfouissement Technique, ensuite ce sont les incinérateurs à installer dans les 48 wilayas du pays et maintenant, ce sont les trains ». C’est de cette façon qu’a été, dans les faits, abandonné le programme national de gestion intégrée des déchets « pour lequel on a déboursé des millions en devise », ajoute notre interlocuteur.
De nombreux projets en attente
Il rappelle que le plan quinquennal 2010-2014 a doté le chapitre de l’environnement et de l’aménagement de pas moins de 6,7 milliards USD. Pour la gestion des déchets, il était prévu la construction de 300 CET et la confection de schémas directeurs de gestion des déchets ménagers, industriels et hospitaliers, l’introduction du tri sélectif et du recyclage des déchets, la réalisation de deux CET pour des déchets industriels spéciaux, dans les wilaya de Sidi Bel Abbes et Tébessa, la réalisation de laboratoires de contrôle de la qualité de l’air et du littoral, la mise en place d’incinérateurs, le montage de projets dits « Mécanisme de développement propre (MDP) (coopération entre l’Algérie, la France et l’Allemagne pour capter les gaz à effet de serre dans les décharges), la construction d’une station centrale pour l’élimination des déchets toxiques. Rien de tout cela n’a été mené à terme et, l’amoncellement des déchets de toute sorte parle d’elle-même, s’exclame notre interlocuteur.
L’enjeu de la récupération des déchets
Sur un autre plan et, selon toujours l’AND, 10,3 millions de tonnes de déchets sont générés chaque année dont seulement 2,9 millions seraient valorisées. Un cadre du ministère de l’environnement et de l’aménagement du territoire révèle que des entreprises suisses,via des expatriés , ont fait un forcing pour pouvoir exploiter des décharges contrôlées -hors CET- (récupération, compostage, méthanisation) en vain. La bureaucratie érigée en mode de gestion par les responsables de tutelle a découragé tout le monde, fait –il remarquer.
Plusieurs pays émergents ou en développement ont vérifié ,à leurs dépens, que la gestion des déchets managers dans les grands centres urbains n’est pas simplement une affaire financière et d’addition de moyens. Pour les experts du domaine, il s’agit du management et du savoir faire d’une branche de l’économie moderne qui considère que quelque soit le déchet produit, il a d’abord une valeur économique. C’est ainsi que les schémas directeurs mis en place et exécutés dans l’Union Européenne permettent de récupérer 39% des déchets produits (50% en Scandinavie
Il y a mieux. A l’horizon 2020, la ville de San Francisco qui récupère déjà 80% de ses déchets (entre recyclage et compostage) se fixe l’objectif de « Zéro déchet non recyclé ou composté » pour éviter d’utiliser des décharges ou des incinérateurs, très polluants !