Le président de Jil Jadid a appelé à engager immédiatement des mesures pour rendre le pouvoir au peuple. Le coup d’envoi de cette transition viendrait du président Bouteflika.
Le président de Jil Jadid, Soufiane Djillali, a proposé lors d’une conférence de presse ce matin une feuille de route en 8 points pour « transférer le pouvoir au peuple ». Le point de départ de cette transition serait donné par une « lettre du président de la République » dans laquelle il « reconnaît son inaptitude à gouverner et annule les élections présidentielles d’avril 2019 ».
Jil Jadid propose que dans cette « lettre » aux Algériens, le président de la République charge une personnalité consensuelle ou un comité d’engager immédiatement des consultations avec la classe politique, les syndicats, la société civile, et des personnalités nationales ».
Soufiane Djillail a appelé à la mise en place d’un « forum national », qui peut recouper l’idée de la conférence nationale évoquée depuis plusieurs semaines. « Le forum national » désignera par consensus une personnalité ou un comité, pour assurer les fonctions de Chef de l’Etat pour la continuité de l’Etat ». Entretemps, un gouvernement neutre non partisan dont la durée et les missions seront également négociées (entre 6 et 12 mois).
Parmi les autres mesures proposées, la Constitution est suspendue, le chef de l’Etat et les membres du gouvernement transitoire s’engagent à ne pas être candidats aux prochaines présidentielles. Sur la feuille de route proposée par Jil Jadid, le rôle du président Bouteflika prend fin le 26 avril avec l’extinction légale de son mandat.
Les actions à conduire par le gouvernement de la transition sont également encadrées dans les propositions de Jil Jadid : mise en place d’une commission indépendante pour organisation de l’élection, refonte de la loi électorale, ouverture des médias. La transition passe à une seconde étape après l’élection présidentielle (au plus tard dans 12 mois) avec l’engagement par le nouveau président de la République « d’un processus constituant ». La nouvelle Constitution serait adoptée par référendum. Ce qui bien sûr est un processus différent de celui du recours à une assemblée constituante, évoquée par de nombreux acteurs du mouvement populaire et de l’opposition.
Gaid Salah aussi doit partir
Le président de Jil Jadid a eu à répondre à des questions sur le mécanisme de la transition qu’il a décliné en 8 points. Il pense que l’armée devrait y prendre part mais sans Ahmed Gaid Salah, qui « a menacé le peuple » et qui a soutenu le quatrième et le cinquième mandat de Bouteflika. « Lui aussi doit partir ». Il a donné des précisions sur le mécanisme du « Forum National » qui devrait être le lieu de la négociation qui doit dégager une instance présidentielle (ou un chef de l’Etat) avant le 26 avril, « afin que Abdelaziz Bouteflika puisse remettre les clés au peuple en partant ».
« Le forum national devrait être ouvert aux acteurs du mouvement, à la classe politique effective, aux syndicats, aux associations actives et aux personnalités nationales », a précisé le conférencier ajoutant que c’est dans ce cadre que sera également désignée la personnalité qui devra former le gouvernement neutre de la transition.
Le président de Jil Jadid n’a pas exclu que dans le cadre de Mouwatana dont son parti est l’une des principales composantes, des propositions soient faites pour incarner ces différentes propositions et conduire la transition, « un enjeu essentiel car le risque est réel que les fruits de ce mouvement populaire exceptionnel soient détournés en fin de parcours ». Jil Jadid s’est posté en « vigie de la révolution » pour empêcher le détournement du cours du mouvement populaire par le pouvoir ou, plus présent comme préoccupation, par une partie de l’opposition qui est restée en retrait lorsqu’il fallait s’engager contre le 5 e mandat il y a plusieurs mois.
Nous créons notre propre modernité
Soufiane Djillali a évoqué lors de son intervention liminaire, « un saut anthropologique de la société révélé avec ce mouvement exceptionnel ». Les Algériens ont fait une extraordinaire démonstration de maturité civique. Une nouvelle société est en train de d’apparaitre qui « avançait en arrière plan de l’immobilisme politique de surface » : Cette société qui émerge sur les décombres « de la société traditionnelle qui a implosé », est « ouverte, sans peur, tolérante.
Les Algériens ont équilibré leur rapport à leur identité. On a vu défilé les emblèmes nationaux à cotés du drapeau Amazigh, sans aucun problème. Ils acceptent une présence plus forte des femmes dans l’espace public, des Algériens sont sortis de la Mosquée lorsque l’imam a prêché en faveur de l’obéissance au « Hakem ». Pour le président de Jil Jadid, « les Algériens sont en train de créer leur propre modernité, qui n’est pas celle des Européens ».