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Tunisie – Les attentats terroristes menacent le tourisme mais aussi le naissant système politique tunisien (observateurs)

Par Yacine Temlali
juin 28, 2015
Tunisie – Les attentats terroristes menacent le tourisme mais aussi le naissant système politique tunisien (observateurs)

Effrayées par l’exode massif de touristes, les autorités tunisiennes ont annoncé que 1.000 policiers supplémentaires avaient été déployés sur les sites touristiques et les plages du pays.

 

 

L’attaque terroriste de vendredi dernier contre l’hôtel Marhaba à Sousse va-t-elle sonner le glas du tourisme ? La question mérite d’autant d’être posée que cette attaque a eu lieu seulement 3 mois après une autre, tout aussi meurtrière, qui avait été perpétrée contre le musée du Bardo à Tunis et avait également fait plusieurs victimes parmi les touristes.

Pour rappel, le tourisme représente quelque 7% du Produit intérieur brut (PIB) de la Tunisie et a rapporté à l’Etat en 2014 la somme de 1,59 milliard d’euros, soit 6,4 % de plus qu’en 2013, mais 14,5% de moins qu’en 2010, avant la Révolution tunisienne. Il fournit quelque 400.000 emplois directs et indirects, soit 12% de la population active.

 

Le tourisme britannique en Tunisie menacé

 

Les touristes britanniques, qui constituent une part importante des flux de touristes étrangers en Tunisie (424.707 en 2014 selon le Foreign Office sur un total de 6,06 millions), ont représenté aussi la plus grande partie des victimes de l’attentat de Sousse. Plus de 2.500 parmi les Britanniques restés en Tunisie devaient être rapatriés aujourd’hui, après les 1.000 déjà rentrés la veille dans leurs pays, selon les tour-opérateurs, cités par l’AFP. Ces rapatriements n’augurent rien de bon pour l’avenir du tourisme britannique dans ce pays qui, avant cet attentat, était attendu en hausse de 8,5% en 2015, selon les prévisions du ministère tunisien du Tourisme.

Des tours opérateurs d’autres pays que la Grande-Bretagne ont annoncé le rapatriement de leurs ressortissants. Il s’agit notamment des voyagistes belges Jetair, Sunjets.be et VIP Selection qui ont décidé de ne plus transporter de voyageurs vers la Tunisie. Un vol qui était déjà parti vendredi a fait demi-tour vers Bruxelles. Un autre vol qui était prévu vendredi soir a été annulé. Idem pour les 4 vols aller d’hier samedi. Les tour-opérateurs annoncent que 6 vols sont opérés afin de ramener en Belgique les voyageurs se trouvant en Tunisie. Hier, 6 vols ont regagné Bruxelles au départ de Tunisie (y compris Djerba) avec à leur bord 1.100 passagers. Un total de 10 avions a été mobilisé pour assurer le retour anticipé des vacanciers belges.

 

1.000 policiers supplémentaires pour les sites touristiques

 

Effrayées par cet exode massif, les autorités tunisiennes ont annoncé que 1.000 policiers supplémentaires avaient été déployés sur les sites touristiques et les plages du pays la sécurité des touristes étant, pour le ministre de l’Intérieur, Mohamed Najem Gharsalli, primordiale.

Au-delà des conséquences sur le secteur du tourisme en Tunisie, l’attentat de Sousse peut être aussi perçu comme ayant un effet déstabilisateur du système politique tunisien. C’est ce que souligne le journal français Libération estimant que l’attaque de vendredi déstabilisait  » un gouvernement (tunisien) déjà fragilisé  » par des conflits sociaux.

 » Trois mois seulement après celui du Bardo, qui en avait déjà fait 22, ce nouveau carnage, écrit le quotidien français, fait ressortir les fragilités d’un pays qui, malgré un processus de transition souvent loué, reste confronté à de lourds défis sécuritaires, mais aussi politiques et économiques. De plus en plus critiquées pour leur incapacité à y faire face, les autorités répliquent en multipliant les messages de fermeté, faisant craindre un tour de vis sécuritaire « .

C’est là notamment la posture adoptée par le Chef du gouvernement, Habib Essid, quelques heures après le drame en annonçant une série de  » douze mesures immédiates  » portant notamment sur le rappel de l’armée de réserve, le déploiement de la police touristique armée sur les plages, à l’intérieur des hôtels et dans les sites archéologiques et musées, la fermeture de près de 80 mosquées non-autorisées.

 

Des mesures tardives ?

 

Ces mesures ont été jugées tardives par certains observateurs tunisiens. La journaliste de La Presse Olfa Belhassine estime ainsi que  » au moins cinq points  » de ce plan d’action arrivent trop tard :  » Pourquoi a-t-on toujours l’impression que les hommes politiques sont en retard d’une guerre ou même de deux, en Tunisie ? C’est bien après que les plus illuminés des imams wahhabites aient gagné beaucoup de temps et de terrain en enrôlant dans les rangs de la culture de la mort des milliers de jeunes précaires, désorientés ou souffrant d’un syndrome identitaire aigu, qu’on décide de fermer 80 mosquées fonctionnant hors du contrôle de l’Etat. « 

De son côté, l’analyste Selim Kharrat pense que l’attentat de vendredi mine la confiance dans le système. Selon lui, la faille s’élargit entre la population et la nouvelle élite élue et, de fait,  » il faut s’attendre à un florilège de messages nostalgiques de Ben Ali « . Ce qui, prévient-il, fragilise la construction démocratique :  » Au nom de la sécurité, on va limiter les libertés publiques et individuelles. D’autant que la demande de sécurité va augmenter, donc on pourra toujours dire que c’est le souhait des Tunisiens. »

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