Plusieurs personnalités politiques tunisiennes, dont des dirigeants du mouvement islamiste Ennahdha, ainsi que des journalistes et des influenceurs, ont été condamnées, le 5 février 2025, à de lourdes peines de prison dans le cadre de l’affaire Instalingo.
Rached Ghannouchi, 83 ans, leader historique du parti Ennahdha, a été condamné à 22 ans de réclusion criminelle par la deuxième chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis. Cette peine est l’une des plus sévères prononcées dans cette affaire qui a éclaté en 2021, lorsque les autorités tunisiennes ont perquisitionné les locaux de Instalingo, une société spécialisée dans la production de contenus numériques. L’entreprise, située à Kalâa Kebira dans le gouvernorat de Sousse, est accusée de manipulation de l’opinion publique et de blanchiment d’argent via les réseaux sociaux.
Outre Ghannouchi, plusieurs figures politiques d’Ennahdha ont également été lourdement condamnées. L’ex-chef du gouvernement, Hichem Mechichi, a écopé de 35 ans de prison par contumace. Rafik Abdessalem, ancien ministre des Affaires étrangères et haut dirigeant du parti, a été condamné à 34 ans, tout comme son beau-fils, Mouadh Ghannouchi, qui a également été condamné à 35 ans de réclusion criminelle. La fille de Rached Ghannouchi, Soumaya Ghannouchi, ainsi que Seyed Ferjani, un autre dirigeant du parti, ont respectivement écopé de 25 ans et 13 ans de prison.
Des personnalités médiatiques, accusées de complicité dans les activités de la société Instalingo, ont aussi été lourdement condamnées. Chadha Haj Mbarek, journaliste salariée de la société, a été condamnée à cinq ans de prison, tandis que la journaliste indépendante Chahrazed Akacha a été jugée par contumace et condamnée à 27 ans. Parmi les influenceurs, Salem Lekhili a écopé de la peine la plus lourde, soit 54 ans de prison.
Le procès a été vivement critiqué par Ennahdha, qui dénonce un « procès politique injuste », accusant les autorités de porter atteinte aux droits et libertés fondamentales et de violer l’indépendance du pouvoir judiciaire. Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a également exprimé de vives préoccupations, estimant que cette décision affecte gravement la liberté du travail journalistique, notamment au sein des entreprises de production de contenus destinés aux médias.