L’élection présidentielle en Tunisie aura lieu demain dimanche 6 octobre. À quelques heures de ce rendez-vous, la contestation s’amplifie sur fond de crise économique et politique.
Le président sortant Kaïs Saïed est candidat à sa propre succession après un mandat marqué par une gouvernance populiste et autoritaire, qui a sonné le glas de la transition démocratique initiée par le Printemps arabe en 2011.
En effet, cette élection se tient dans un climat tendu, marqué par l’arrestation d’opposants et l’exclusion de nombreux candidats. « Elle s’annonce à haut risque », commente l’expert de Crisis Group Michaël Ayari.
Selon, Hatem Nafti, essayiste membre de l’Observatoire tunisien du populisme, « Kaïs Saïed a mis en œuvre plusieurs procédés pour verrouiller le régime et ce scrutin : il a par exemple empêché, via une commission électorale qu’il a lui-même nommée, des personnes de concourir ». « La commission a ainsi refusé d’inscrire trois candidats issus de l’ancien régime, des personnes qui pouvaient lui faire concurrence en raison de leur poids électoral, alors qu’elles avaient tout à fait le droit de se présenter.
Sur les trois candidats restants, un des trois se trouve actuellement en prison et a cumulé jusqu’à 14 ans de détention pour trafic de parrainage citoyen, selon le motif officiel. Il est très probable que cette personne voie les suffrages qui se sont portés sur elle purement et simplement annulés par la commission électorale » a-t-il ajouté.
A l’approche de ces élections, les manifestations contre la répression au pays et parmi les tunisiens de l’étranger ne faiblissent.
Vendredi, les rues de la capitale ont été le théâtre de manifestations pour dénoncer les conditions entourant l’organisation de ce scrutin. Les manifestants, principalement des jeunes, ont exprimé leur refus de participer à cette élection, dénonçant un processus dénué de garanties démocratiques.
Quelques jours plutôt, le Comité du respect des libertés et des droits humains en Tunisie (CRLDHT) organisait en France une journée internationale de solidarité avec le peuple tunisien pour les libertés, l’Etat de droit et la démocratie. Une centaine de tunisiens ont alors répondu présents à Belleville dans le 20e arrondissement de Paris. Cette contestation témoigne de la régression qui a marqué la démocratie en Tunisie, premier espoir dans le monde arabe.
En 2019 pourtant, lors de son élection, Kaïs Saïed portait les espoirs des Tunisiens en leur promettant une « nouvelle Tunisie » avec un pouvoir pour les jeunes. Deux ans plus tard, il opère exactement le contraire : il gèle le parlement et s’approprie les pleins pouvoirs, avant de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature et d’instaurer un décret réduisant la liberté d’expression. Plusieurs dizaines de militants et journalistes ont ensuite été mis en prison.